HOCKEY SUR GLACEHumeur: comment j’ai attaqué Linus Omark par la face Nord
Le Suédois de GE Servette a été décisif vendredi contre Zoug (3-1). Mais à l’interview, il est moins simple de lui arracher trois mots que de lui prendre le puck sur la glace.
![Simon Meier](https://media.lematin.ch/4/image/2023/10/26/8ddc399d-8685-4305-9ba3-40662a5f4546.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=crop&w=400&h=400&rect=0%2C0%2C1181%2C590&fp-x=0.5004233700254022&fp-y=0.5&crop=focalpoint&s=e5b4430f793b371373f9a0ce6eef4463)
![Linus Omark tout sourire. Le Suédois des Aigles préfère manifestement s’exprimer sur la glace qu’en dehors. Linus Omark tout sourire. Le Suédois des Aigles préfère manifestement s’exprimer sur la glace qu’en dehors.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/03/7938df21-9433-45be-ad0c-a9ec9ca8348a.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C2048%2C1365&fp-x=0.5&fp-y=0.5003663003663004&s=b922ff74ae4df4c8a409b53a5ca07ff1)
Linus Omark tout sourire. Le Suédois des Aigles préfère manifestement s’exprimer sur la glace qu’en dehors.
BASTIEN GALLAY / GALLAYPHOTOLes play-off constituent une jungle à nulle autre pareille. Un monde où le danger est permanent, fait de mille défis, petits et gros, essentiels ou plus futiles. Chacun y mène ses propres combats, fût-ce à l’arme blanche comme cet officiel du HC Ajoie. Chacun y relève ses propres challenges et nourrit ses rêves intimes. Il y a ceux qui doivent sauver leur peau et ceux qui veulent celle des autres. Moi, vendredi soir, je me suis attaqué à Linus Omark par la face Nord.
L’aussi génial que fantasque Suédois de GE Servette venait de marquer de son empreinte l’acte I de la demi-finale contre Zoug, remporté par les Aigles (3-1). Pour le pire, avec cette passe dans le dos potentiellement bien jolie mais au final très vilaine, puisqu’elle amena l’ouverture du score zougoise (26e). Et pour le meilleur, avec le goal décisif du 2 à 1 à la 45e. Du pur Linus Omark dans le texte. De là à tenter de lui extorquer trois mots…
Linus Omark à l’interview d’après-match, c’est un pic à glace, un cap à barbe, une péninsule inaccessible.
J’ai bien vu la stupéfaction amusée des collègues, en tribune de presse, au moment où les plumitifs doivent passer commande au sujet des interlocuteurs désirés. «Soit t’es complètement malade, soit tu n’as pas du tout envie de bosser», disaient les sourires, quand j’ai maintenu avec aplomb que je voulais parler à Linus Omark – et, donc, défi ultime, tenter de faire parler celui qui entretient si bien sa réputation de type qui ne dit rien.
Linus Omark à l’interview d’après-match, c’est un pic à glace, un cap à barbe, une péninsule inaccessible. Son sentiment sur cette retournante soirée? «C’est un bon début de série.» Point final, hyper cordial mais parfaitement décourageant, avec ce petit sourire qui jette le gant: «Alors, t’as une deuxième question ou on s’arrête là?»
La cuirasse du guerrier
Comme c’est les play-off, je fonce, prêt à tous les sacrifices et sous les regards sarcastiques environnants. Et bim, ma deuxième question dans la cuirasse du guerrier. Y a-t-il eu l’ombre d’un doute sous les casques, après deux tiers, face à ce Zoug qui semblait alors si solide? «L’esprit, c’est toujours de gagner un match de hockey. On devait continuer à travailler en équipe et avoir confiance.» Relance immédiate, sans laisser respirer la proie: la confiance, ça lui arrive de vous quitter? «Non, ni pendant ce match, ni pendant aucun autre de la saison.»
Et ce petit sourire qui revient à la charge, comme pour dire cette fois: «Bon, gars, tu n’as quand même pas de quatrième question sous le coude?» L’adversaire est clairement en train de vaciller, il faut porter l’estocade, le cuisiner habilement sur ses débuts de play-off mitigés, son but si important pour la confiance et son apport sur la suite. En deux salves, le champion me met K.O. D’abord, un uppercut qui sonne: «Pour gagner, on a besoin de marquer des buts.» Puis le crochet qui dézingue: «Je prends un match à la fois, je me sens de mieux en mieux.»
Record battu?
L’interviewer, lui, va de plus en plus mal. Gentiment, je me délite, me liquéfie, m’efface. Pour ne pas la perdre complètement, la face, et pour franchir la barre hautement symbolique des trois minutes d’entretien (3’14 exactement, peut-être un record), je m’offre un petit bonus sur la répétition des efforts, avec ces matches un jour sur deux, à commencer par l’acte II de dimanche à Zoug. Linus Omark coupe, sûr de sa force: «Si j’avais le choix, je jouerais tous les jours, pas un jour sur deux.» Ça donnerait deux fois plus souvent l’occasion d’aller lui causer. En plus du terrible défi, ça donne toujours un moment sympa, décalé.