Coupe du monde: Valon Behrami: «On a de grosses chances de passer»

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Qatar 2022Valon Behrami: «On a de grosses chances de passer»

L’ex-patron de l’équipe de Suisse, invité par la FIFA pour quelques jours au Qatar, se montre optimiste avant le huitième de finale de mardi contre le Portugal.

Simon Meier Doha
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Simon Meier Doha
Valon Behrami (83 sélections avec la Suisse entre 2005 et 2018), a joué quatre Coupes du monde. Il est ravi de ne pas participer à une cinquième.

Valon Behrami (83 sélections avec la Suisse entre 2005 et 2018), a joué quatre Coupes du monde. Il est ravi de ne pas participer à une cinquième.

freshfocus/Toto Marti

Invité par la FIFA, Valon Behrami est arrivé à Doha samedi, au lendemain de la victoire de l’équipe de Suisse contre la Serbie. Mardi soir, il sera dans les tribunes du stade Lusail pour suivre, en supporter, le huitième de finale contre le Portugal. Lundi, en compagnie d’un autre ex-international – Alain Sutter - il a visité le musée de l’Olympisme et du sport et tapé un petit moment dans le ballon avec des enfants. Il nous a ensuite accordé une dizaine de minutes, pour évoquer le grand soir, ce Mondial au Qatar et quelques souvenirs.

L’équipe de Suisse vous semble-t-elle mieux armée cette année pour atteindre les quarts de finale qu’en Russie en 2018?

Oui, c’est clair que cette équipe est devenue meilleure, depuis quatre ans. Les jeunes de mon époque, les Xhaka, Shaqiri ou Akanji, ont désormais bien plus d’expérience. Cette génération dorée, qui a reçu l’apport de très bons jeunes, me semble former désormais une équipe plus complète, par rapport à la nôtre. Le Portugal est une grosse équipe, bien sûr, mais surtout devant. Il y a Ronaldo et aussi beaucoup de qualité au milieu de terrain, mais…

Mais?

Je trouve qu’ils manquent un peu de densité dans l’entrejeu, avec souvent un seul milieu défensif. Et derrière, je ne les trouve pas si impressionnants que cela, ce n’est pas la grande équipe dont tout le monde parle. Pour moi, il y a de grosses chances de passer. Si on travaille bien tactiquement, on va trouver des espaces derrière le milieu de terrain, dans leur dos. Il va falloir en profiter, comme on l’a fait contre la Serbie. 

«Je suis très content de pouvoir regarder ce Mondial à côté du terrain, sans la moindre pression.»

Valon Behrami, ex-international.

C’est la première fois depuis 1994 que la Suisse joue une Coupe du monde sans Valon Behrami, ça vous fait quoi?

Ça fait toujours plaisir de se dire qu’on a joué quatre Coupes du monde (ndlr: 2006, 10, 14 et 18), mais ça montre aussi que le temps passe vite à tous les niveaux. Je suis surtout très content de pouvoir regarder celle-là à côté du terrain, sans la moindre pression - parce que je n’ai pas connu que des bons moments non plus. J’ai évidemment plein de bons souvenirs mais c’est un mélange, j’ai aussi connu des expériences plus négatives, notamment avec mon carton rouge contre le Chili en Afrique du Sud. C’est un mélange de sentiments, même si évidemment, avec du recul, je suis très content de ce que j’ai réalisé.

Donc même avec une baguette magique, vous n’aimeriez pas être sur le terrain mardi soir contre le Portugal?

Non, je ne raisonne jamais comme ça. Aujourd’hui (ndlr: lundi), j’ai joué deux minutes contre des petits enfants et c’était dur physiquement.

D’ailleurs, comment expliquez-vous cette défaite 2 à 1 avec Alain Sutter face à deux gamins japonais?

Hé, vous avez vu, le Japon est une nation en plein progrès, donc c’était un adversaire très difficile à affronter (il se marre).

Valon Behrami n’a pas boudé son plaisir au moment de taper dans le ballon avec quelques gamins. Mais il avoue avoir souffert physiquement.

Valon Behrami n’a pas boudé son plaisir au moment de taper dans le ballon avec quelques gamins. Mais il avoue avoir souffert physiquement.

freshfocus/Toto Marti

C’est dur d’être sur le terrain, mais à quel point cela sera-t-il difficile pour vous, de suivre ce huitième de finale en tant que supporter?

Quand tu ne joues pas, évidemment, c’est plus dur au niveau des nerfs, parce que tu n’as pas d’influence. Tu regardes le match et tu vois des choses que tu ne vois pas quand tu es sur le terrain, tu as envie de dire aux autres: «Vas-y, prends cet espace, pourquoi tu vas à droite, tu dois aller à gauche…» C’est toujours plus facile d’avoir la solution, quand tu regardes le match et que tu ne le joues pas. Mais comme supporter, évidemment, on souffre. Mais bon, avant le match contre la Serbie, j’étais déjà très positif et là, je le suis aussi. 

Vous étiez le «grand frère» dans cette sélection. Aurez-vous des contacts avec vos anciens coéquipiers dont certains sont des potes, avant le match?

Non, je les laisse tranquilles. De toute façon, je ne suis pas tellement du genre à utiliser les moyens de communication modernes. Je n’aime pas le téléphone. Si on se voit, on se parle, on va manger ensemble - ça c’est magnifique. Mais sinon, je laisse les gens tranquilles, spécialement dans ces moments-là.

Et après le match, aurez-vous envie de partager avec eux cette grande joie ou cette rude déception?

Non, non plus. On est en Coupe du monde et j’espère vraiment qu’ils vont gagner. Mais de nouveau: dans ces moments-là, il faut laisser un groupe vivre son truc, profiter de ce qu’il est en train de faire.

«On a enfin compris qu’il fallait être courageux. C’est la leçon de ce match contre la Serbie.»

Valon Behrami, ex-international.

Plus généralement, quel est votre sentiment sur le jeu pratiqué durant ce Mondial?

Ce qui a changé par rapport au passé, c’est que si tu joues trop défensif, pour essayer de faire 0-0, tu finis par prendre le but qui te fait perdre. L’Australie, par exemple, a commencé son premier match contre la France de façon très offensive, très haut dans le terrain. Elle a fini par perdre 4 à 1, mais elle a gagné les deux suivants et elle s’est qualifiée. On voit que la mentalité offensive paie davantage qu’une attitude défensive. On l’a aussi vu avec la Suisse. Contre le Brésil, elle est restée derrière, en essayant de ne pas prendre de but. Et contre la Serbie, en étant ouverts, agressifs, offensifs, ils ont fini par gagner. Se montrer spectaculaire, prendre des risques, c’est pour moi la mentalité de ce Mondial.

Est-ce un message à l’attention du sélectionneur Murat Yakin?

Non, il n’en a pas besoin. Je pense qu’on a enfin compris qu’il fallait être courageux. C’est la leçon de ce match contre la Serbie. Et c’est aussi une façon d’envoyer un message au Portugal. Si on va de l’avant, si on joue pour créer et qu’on commence à pousser, cela rendra les choses inconfortables pour eux, derrière. Parce que je le répète: ils ont beaucoup de joueurs à l’aise en phase offensive, mais qui apprécient moins défendre.

Voilà qui nous amène à la question que beaucoup de Portugais se posent: ne serait-ce pas finalement une bonne nouvelle pour la Suisse, si Cristiano Ronaldo commençait le match?

Non, on ne peut pas dire ça, jamais. Les joueurs comme lui, tu peux ne pas les voir pendant 25 minutes et sur un ballon, il fait la différence. Il a une telle qualité, une telle intelligence de mouvement, une telle expérience… Lui et Messi ont dominé toute une génération, ils ont été les meilleurs et, même si d’autres sont arrivés maintenant comme Mbappé, il faut les respecter jusqu’à la fin.

Quelle équipe vous a impressionné le plus, jusqu’ici?

Le Brésil, c’est sûr, qui s’est montré très équilibré devant comme derrière. Après, l’Angleterre. Et puis l’Argentine qui, après avoir mal commencé, semble avoir trouvé la bonne formule en procédant à quelques changements.

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