JuraBAT: l’État n’achètera pas un «patrimoine bâti considérable»
Le gouvernement jurassien a réagi par la voix de trois ministres à l’annonce définitive du cigarettier de quitter Boncourt, après deux siècles de production.
- par
- Vincent Donzé
La fermeture confirmée aujourd’hui de la fabrique de cigarettes BAT met fin à une histoire d’amour de deux siècles entre la clope et Boncourt (JU), une relation soulignée régulièrement par l’émission humoristique «52 minutes» de la RTS. Avec plusieurs vagues de licenciements prévues l’an prochain pour un total de 220 employés, l’ambiance n’est pas seulement morose au Café du Battoir, à la route de France 34, mais dans toute la commune ajoulote.
Ce qui pend au nez des contribuables boncourtois, avec le départ progressif de l’ancien cigarettier F. J. Burrus, c’est une augmentation de la quotité d’impôts de 1.45 à 1.85, histoire de compenser une perte fiscale de 1,5 à 2 millions de francs par an, sur un budget de 8 à 9 millions.
Avec le conseiller communal en charge du développement territorial, Josué Boesch., trois ministres jurassiens ont commenté ce soir la décision prise à Londres par British American Tobacco, propriétaire de l’ancienne usine F. J. Burrus depuis 1999: le ministre de l’Économie et de la Santé Jacques Gerber, Rosalie Beuret en charge des Finances et le président du gouvernement David Eray, chargé de l’Environnement.
Dans un village de 1200 habitants, que deviendra l’usine surdimensionnée? Le ministre de l’Économie Jacques Gerber indique que dans un marché libre, l’État n’en deviendra pas propriétaire, mais il créera «des liens entre les différents acteurs» et il «accompagnera les discussions».
Son service de promotion économique tentera de favoriser de nouvelles implantations. «Ce site a rapidement suscité de l’intérêt» parmi les acteurs économiques, confie Jacques Gerber, en évoquant un «patrimoine bâti considérable» qui reste pour l’heure la propriété de BAT.
Quels types d’activités sont-elles préconisées? «Pendant la phase de consultation, on n’envisage pas d’alternative à une fermeture», tempère Jacques Gerber. «Nous avons eu des discussions exploratoires sur le futur du site», a-t-il ajouté, en disant son espoir d’aboutir à une solution «novatrice».
Les 220 employés perdront leur travail par vagues. Quel est leur profil? «Opérateurs ou automaticiens, ceux engagés dans la production ont la chance d’avoir ce profil: en période de haute conjoncture, ils sont bien placés pour retrouver un emploi en échange d’une formation complémentaire», estime le ministre Jacques Gerber. Il y a selon lui «de la demande dans l’économie jurassienne pour ces métiers pratiques», tandis que certains employés partiront à la retraite.
Compassion et soutien
Le conseiller communal Josué Boesch a eu pour le personnel des mots qu’on emploie pour un deuil: «Nous disons notre compassion et notre soutien en ces moments difficiles», a-t-il déclaré en faisant part de son «immense tristesse» devant des vies «profondément affectées» au sein des familles.
Pour Boncourt, c’est la fin d’une époque, celle d’une «épopée industrielle» initiée en 1814 par une famille alsacienne et qui s’achèvera en 2023. Il était hier question d’une décision claire prise par BAT dans un secteur caractérisé par des résultats excellents. Une décision regrettée «amèrement» qui laisse un «sentiment de gâchis».