FranceMarion, 13 ans, harcelée jusqu’au suicide
Les parents d’une adolescente ayant mis fin à ses jours en février 2013 se pourvoient mercredi en cassation, après la prononciation d’un non-lieu en 2018.
Pour ses parents, c’est l’accumulation qui a tué Marion. Pas le premier «salope», pas le «sale pute» d’après mais, injure après injure, l’envie de vivre a quitté la collégienne, qui met fin à ses jours à l’âge de 13 ans. En 2018, la justice conclut à des actes «isolés» et prononce un non-lieu que la famille conteste mercredi en cassation.
Un mercredi de février 2013, la mère de Marion découvre son corps sans vie dans sa chambre, dans la petite ville de Vaugrigneuse (Essonne). L’adolescente a laissé une lettre manuscrite. Elle y énumère les mots qui l’ont blessée à mort et les attribue à des camarades, qui l’ont «insultée, ignorée», «pas soutenue» ou qui n’ont «fait qu’aggraver les choses». «Vous êtes allés beaucoup trop loin dans cette histoire (…) Ma vie a dérapé et personne ne l’a compris», écrit-elle.
Pour la famille de la victime, c’est un climat général d’alors – problèmes de discipline en classe, moqueries répétées – qui, depuis plusieurs mois, génère un mal-être persistant chez Marion. Elle rentre en pleurs à la maison, ses bons résultats chutent et, autrefois joyeuse, elle devient maussade. Les demandes de changement de classe restent sans effet et les signaux faibles envoyés par la jeune fille ne sont pas relevés par l’administration.
La responsabilité partielle de l’État est reconnue en janvier 2017 par le tribunal administratif de Versailles qui lui reproche de n’avoir ni détecté ni empêché le harcèlement et le condamne à verser 18’000 euros de dommages et intérêts à la famille de l’adolescente. Sur le plan pénal, les parents portent plainte contre X pour violences volontaires, menaces de mort, provocation au suicide, homicide involontaire, omission de porter secours, désignant implicitement des collégiens et l’établissement scolaire que les parents accusent d’inertie.
Une juge d’instruction d’Évry auditionne le directeur de ce collège de l’Essonne, des professeurs, des parents d’élèves. Les SMS de Marion, ses résultats scolaires, son dossier médical sont examinés. L’enquête prouve une pluie d’insultes sur les réseaux sociaux voire des menaces non voilées: «Quand tu vas en recevoir plein la gueule, tu vas comprendre». Ainsi qu’une violente prise à partie de Marion par un groupe hostile lors d’un cours de sport.
«Jeu de collégiens»
Toutefois, la juge relève un manque «d’éléments objectifs et concordants» dans les déclarations des adolescents. Puis elle conclut à des événements «isolés et concernant différentes personnes n’agissant pas dans une même intention» ne pouvant caractériser une situation de harcèlement, dédouanant de facto la direction et le personnel encadrant qui n’auraient pu faire de lien et songer à une situation de mort imminente.
Les faits relatés s’inscrivent dans un «jeu auquel se livrent habituellement les collégiens», estime-t-elle, écartant toute notion de délit. Elle prononce donc un non-lieu en août 2018.
En mars 2021, le non-lieu est confirmé en appel. La famille se pourvoit en cassation.