La Chaux-de-Fonds - Révolution en marche: un Pod sans feux rouges!

Un Pod sans feux rouges, c’est la révolution qui est en marche à La Chaux-de-Fonds, une ville où la voiture prend trop de place. Orchestrée par le conseiller communal Théo Huguenin-Élie, une mue s’opère sur Léopold-Robert (Pod), une avenue qui constitue la colonne vertébrale de la métropole horlogère: il s’agit de réguler la circulation autrement que par une succession de feux rouges… ou verts.

Premier signe de ce changement: le carrefour du théâtre et du conservatoire, entre le Zoo du Bois du Petit-Château et le Musée des beaux-arts, a perdu sa signalisation lumineuse. Théo Huguenin-Élie sait que le changement produira du mécontentement: «Comme d’habitude en matière d’urbanisme, des inquiets ont l’impression que rien ne fonctionnera.» Mais sa conviction est faite: «La signalisation lumineuse ne sert pas à fluidifier le trafic mais à le réguler quand certains usagers ne parviennent pas à s’insérer dans la circulation.»

En 1978, des feux rouges ont remplacé la priorité de droite. Les cyclistes évitent cette allée à quatre pistes, préférant les chemins de traverse. Mais un impératif s’est glissé dans les chantiers routiers: «Les piétons qui traversent deux voies allant dans le même sens doivent pouvoir bénéficier soit d’un feu lumineux, soit d’un îlot central», indique Théo Huguenin-Élie, selon qui des giratoires réduiraient trop la surface piétonne.

«Chi va piano va sano»: le premier carrefour modifié servira de test. La circulation s’y resserre sur une seule voie, ce qui a permis d’aménager une bande cyclable et d’élargir les trottoirs. Un tel système fonctionne déjà à satisfaction devant le supermarché des Entilles, où la voie réservée aux bus est utilisable la plupart du temps par tous les usagers.

Avec la suppression des feux rouges à l’horizon 2025, il s’agit de diminuer le flot des voitures tout en laissant le centre-ville accessible. Le changement est déjà en route, avec la place du Marché devenue piétonne qu’il s’agira de réinventer après la suppression du parking.

«Les urbanistes font trois constats en arrivant en ville: la voiture est trop présente partout, il manque une zone piétonne d’envergure et hors des parcs nombreux souvent luxuriants, la végétation est étriquée», déclare Théo Huguenin-Élie.

Partout, les centres-villes font leur mutation, jusqu’à la proposition émise à Bienne d’interdire toute circulation. La Chaux-de-Fonds ne veut pas rater ce virage pour, selon l’objectif poursuivi par Théo Huguenin-Élie, «améliorer l’attractivité et l’habitabilité de la cité».

Selon le média «ArcInfo», les Chaux-de-Fonniers ont déjà connu un Pod «sans» feux lors du grand chantier de la nouvelle place de la Gare, inaugurée en 2015. Les témoignages d’alors indiquaient que «ça ne marchait pas si mal» et que les automobilistes faisaient preuve de fair-play.

Appelée Le Pod, contraction de Léopold-Robert et abréviation de «podium», l’avenue Léopold-Robert est à La Chaux-de-Fonds ce que les Champs-Elysées sont à Paris. Autrefois, selon les aînés, cette allée servait à courtiser les filles, à pied ou à vélo, en partant de la Grande Fontaine. Aujourd’hui, l’avenue Léopold-Robert a des allures très routières, tout au long de ses 1130 mètres.

La ville a été pensée autour du Pod, imaginé après le grand incendie de 1794. Cette avenue identitaire forme la colonne vertébrale d’un plan en damier salué par l’Unesco. Sa physionomie date de 1892, avec 175 érables plantés sur l’allée centrale et 20 bancs publics posés tous les 50 mètres, sauf en hiver, en raison du déneigement.

En 2019, le Conseil général s’est prononcé à la surprise générale en faveur d’une utopie: faire du Pod un Central Park à 1000 mètres d’altitude. Cette proposition émanait du socialiste Oguzhan Can, chargé ensuite et pour un temps de la promotion de la Ville. Tout le problème résidait dans une question irrésolue: où dévier la circulation?