Défense: La Chine gonfle encore une fois son budget militaire

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DéfenseLa Chine gonfle encore une fois son budget militaire

Pékin a annoncé mardi augmenter son budget militaire de 7,2%, une hausse identique à celle de 2023.

La session annuelle du Parlement chinois s’est ouverte mardi 5 mars 2024 à Pékin.

La session annuelle du Parlement chinois s’est ouverte mardi 5 mars 2024 à Pékin.

AFP

La Chine a annoncé mardi un budget militaire en hausse de 7,2% pour 2024, dans un contexte de corruption dans l’armée et de tensions persistantes autour de Taïwan et en mer de Chine méridionale. Identique à celui de 2023, ce taux a été confirmé par le ministère des Finances durant la session annuelle du Parlement. 

La Chine prévoit de dépenser 1665,5 milliards de yuans (204,79 milliards de francs) pour sa défense – ce qui reste plus de trois fois inférieur aux États-Unis.

Le géant asiatique maintient une «croissance raisonnable» de son budget militaire pour «sauvegarder sa souveraineté, sa sécurité et ses intérêts de développement», a justifié lundi Lou Qinjian, le porte-parole de la session parlementaire. Il augmente depuis plusieurs décennies, globalement au diapason de la croissance économique.

Le pays consacre 1,6% de son PIB à son armée, bien moins que les États-Unis (3,5%) ou la Russie (4,1%), selon l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (Sipri).

Suspicion

L’essor militaire chinois est toutefois vu avec suspicion par les États-Unis, le Japon ou les Philippines, pays avec lequel la Chine se dispute le contrôle d’îlots en mer de Chine méridionale. Il suscite également des craintes à Taïwan, île de 23 millions d’habitants que la Chine espère «réunifier» avec son territoire, ou encore en Inde, avec laquelle des escarmouches éclatent parfois le long de leur frontière contestée dans l’Himalaya.

De son côté, la Chine dit s’inquiéter des alliances militaires nouées par ses rivaux régionaux avec les États-Unis ou encore de l’Otan, qui la présente désormais comme un «défi» pour les «intérêts» de ses membres.

Le chef de l’Otan, Jens Stoltenberg, a encore déclaré en janvier que la Chine «se rapproche de nous» car «nous la voyons en Afrique, nous la voyons dans l’Arctique, nous la voyons essayer de contrôler les infrastructures critiques».

Ogives nucléaires

Dans ce contexte, la Chine a notamment mené l’an passé «une augmentation substantielle du nombre d’ogives nucléaires», déclare à l’AFP James Char, expert de l’armée chinoise à l’Université de technologie de Nanyang (Singapour). Selon le Sipri, Pékin comptait ainsi 410 têtes nucléaires en 2023 (+60 en un an), loin derrière Washington (3708) et Moscou (4489).

«Les récents scandales de corruption dans l’armée soulèvent néanmoins des doutes quant à l’efficacité de sa force de missiles et au professionnalisme des forces militaires», indique à l’AFP Adam Ni, rédacteur en chef de China Neican, une lettre d’information sur l’actualité chinoise.

La Chine a changé deux fois de ministre de la Défense l’an passé. Retraité depuis mars 2023, l’ex-ministre Wei Fenghe n’apparaît plus en public, comme son successeur Li Shangfu, limogé en octobre sans explication après quelques mois. D’autres hautes personnalités militaires, notamment dans la branche de l’armée chargée des missiles nucléaires, ont été congédiées.

Interrogé sur ces remous en août, le ministère de la Défense n’avait pas formellement confirmé qu’il s’agissait de corruption mais s’était engagé à «sévir contre tout responsable corrompu».

Washington loin devant

La corruption «doit être traitée» pour que l’armée puisse «espérer atteindre l’objectif du (président) Xi Jinping, qui est de supplanter les forces armées américaines en tant que première puissance militaire mondiale», note James Char.

Washington reste pour l’heure loin devant. D’après le Sipri, les États-Unis sont le pays ayant les dépenses militaires les plus élevées, avec 877 milliards de dollars en 2022, selon les derniers chiffres disponibles. Suivent la Chine (292), la Russie (86,4), l’Inde (81,4), l’Arabie saoudite (75), le Royaume-Uni (68,5), l’Allemagne (55,8) et la France (53,6).

De plus, les États-Unis ont «une présence mondiale et des réseaux d’alliances, ce que la Chine ne peut avoir sur le court terme», souligne Adam Ni. Washington compte des centaines de bases militaires à l’étranger, Pékin seulement une, à Djibouti.

«Compte tenu des lacunes de l’armée chinoise (...) il paraît logique que Pékin n’ait ni les moyens ni l’envie de s’engager dans un conflit contre Washington ou de lancer une invasion (...) de Taïwan», note James Char. «Ce qui reste préoccupant, toutefois, ce sont les frictions (avec) les autres armées de la région, qui peuvent potentiellement déraper et dégénérer en conflit ouvert.»

(AFP)

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