FranceAffaire des écoutes: décision mercredi en appel pour Nicolas Sarkozy
Dans un jugement sans précédent, l’ancien président avait été condamné en première instance, le 1er mars 2021, à trois ans d’emprisonnement, dont un an ferme, pour corruption et trafic d’influence.
Nicolas Sarkozy sera-t-il de nouveau condamné pour corruption ? La cour d’appel de Paris se prononce mercredi dans l’affaire dite des «écoutes» sur le sort de l’ancien chef de l’Etat, de son avocat et ami Thierry Herzog et de l’ex-haut magistrat Gilbert Azibert.
Dans un jugement sans précédent pour un ancien président de la Ve République, M. Sarkozy avait été condamné en première instance, le 1er mars 2021, à trois ans d’emprisonnement, dont un an ferme, pour corruption et trafic d’influence. Celui qui n’a eu de cesse de clamer son innocence avait immédiatement fait appel.
Au premier jour de ce nouveau procès, le 5 décembre 2022, il a affirmé être venu «défendre son honneur bafoué» et assuré n’avoir «jamais corrompu qui que ce soit».
A l’issue des débats, le parquet général a fustigé une «affaire d’une gravité sans précédent au cours de la Ve République», mais n’a pas demandé de prison ferme contre l’ancien locataire de l’Elysée, 68 ans aujourd’hui. Trois ans de prison totalement assortis du sursis ont été requis contre l’ex-chef de l’Etat et ses deux coprévenus.
Le ministère public a en outre réclamé une interdiction des droits civiques de cinq ans pour M. Sarkozy et M. Azibert, 76 ans, ainsi qu’une interdiction d’exercer la profession d’avocat pendant la même période pour Me Herzog, 67 ans.
Cette décision est attendue alors que l’ex-homme fort de la droite est sous la menace d’un autre retentissant procès: le parquet national financier (PNF) a requis jeudi son renvoi en correctionnelle dans l’affaire des soupçons de financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007.
Coup de pouce
Ce dossier judiciaire, qui met également en cause trois anciens ministres de Nicolas Sarkozy, est indirectement à l’origine de l’affaire des «écoutes», aussi appelée «Bismuth».
Fin 2013, les juges d’instruction chargés de l’enquête sur les soupçons de corruption libyenne décident en effet de «brancher» les deux lignes de Nicolas Sarkozy. Ils découvrent alors l’existence d’une troisième ligne, officieuse. Achetée le 11 janvier 2014 sous l’identité de «Paul Bismuth», elle est dédiée aux échanges entre l’ex-président et son avocat et ami de longue date, Thierry Herzog.
Leurs conversations téléphoniques, diffusées pour la première fois à l’occasion du deuxième procès en décembre, constituent le coeur du dossier et le socle de l’accusation.
Pour le ministère public, se dessinent dans ces écoutes un pacte de corruption noué avec Gilbert Azibert, alors avocat général à la Cour de cassation, accusé d’avoir oeuvré en coulisses pour peser sur un pourvoi formé par Nicolas Sarkozy dans l’affaire Bettencourt, en échange d’un «coup de pouce» pour un poste honorifique à Monaco.
Le 7 février, la cour d’appel de Paris a rejeté les deux questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) soulevées par la défense de MM. Sarkozy et Herzog pour contester la régularité des poursuites.
Ricochets
Ces QPC concernaient en particulier une enquête parallèle vivement contestée par la défense, menée par le PNF. Ouverte en 2014, elle visait à trouver une «taupe» qui aurait informé Nicolas Sarkozy et Thierry Herzog que leur ligne «Bismuth» était sur écoute.
Dans ce cadre, le parquet financier avait examiné les factures détaillées ("fadettes") de neuf avocats et géolocalisé trois d’entre eux, sur une durée de quelques heures. L’enquête a été classée sans suite fin 2019 et transmise à la défense en 2020.
Cette affaire dans l’affaire, dite des «fadettes», a entraîné par ricochets le renvoi devant la Cour de justice de la République (CJR) de l’actuel garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti, pour avoir lancé des enquêtes administratives visant trois magistrats financiers.
Le ministre a formé un pourvoi en cassation contre ce renvoi.
Début avril, une autre formation de la cour d’appel de Paris, saisie par le barreau de la capitale, a confirmé que l’Etat n’avait pas commis de «faute lourde» dans ce dossier.
Sous forte pression judiciaire, Nicolas Sarkozy sera rejugé en appel à l’automne dans l’affaire «Bygmalion», qui porte sur les frais de sa campagne présidentielle de 2012. Il avait été condamné à un an de prison ferme en septembre 2021.