FranceClaude Guéant jugé pour escroquerie de frais de campagne
L’ex-ministre français de l’Intérieur doit comparaître mardi et mercredi à Nanterre, après la diffusion d’un tract en sa faveur par le maire de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine) en 2012.
L’ex-ministre de l’Intérieur Claude Guéant doit être jugé mardi et mercredi à Nanterre pour escroquerie des frais de sa campagne législative de 2012, après la diffusion d’un tract en sa faveur par le maire de Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). L’homme incontournable de la présidence Sarkozy, âgé de 77 ans, encourt ainsi jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et 375’000 euros d’amende. Celui qui fut aussi préfet et directeur général de la police nationale doit également comparaître devant le tribunal correctionnel pour financement illicite de campagne.
Ce procès devait avoir lieu en février dernier, mais avait été renvoyé au mois d’octobre car M. Guéant avait dû être hospitalisé d’urgence. Cette fois-ci, il sera présent, selon son avocat. «Après plusieurs hospitalisations et soins jusqu’à récemment, M. Guéant va mieux», a déclaré Me Philippe Bouchez El Ghozi, précisant toutefois qu’un expert médical avait recommandé «des pauses fréquentes» et «d’éviter la station debout».
M. Guéant n’en est pas à sa première péripétie judiciaire. Il est le premier ex-locataire de Beauvau à avoir été incarcéré, à la prison de la Santé du 13 décembre 2021 au 9 février dernier, avant d’obtenir une libération conditionnelle. Il avait été emprisonné car la justice avait estimé qu’il ne faisait pas les efforts nécessaires pour s’acquitter des sommes qu’il avait été condamné à payer, en 2017, dans l’affaire des primes en liquide du ministère de l’Intérieur.
«Aucun préjudice»
L’affaire du tract remonte, elle, au 3 janvier 2012, lorsque Pierre-Christophe Baguet, maire UMP (devenu LR depuis) de Boulogne-Billancourt et député sortant des Hauts-de-Seine, avait annoncé soutenir Claude Guéant pour lui succéder à l’Assemblée nationale. Dans une lettre à ses administrés, l’élu avait détaillé les raisons de son appui au ministre de l’Intérieur. Et aussi joint sa déclaration de candidature. «On ne peut rêver meilleur candidat pour notre ville», écrivait-il. Cette lettre avait été signalée par Thierry Solère, candidat UMP dissident – et victorieux – qui soupçonnait M. Baguet de l’avoir financée pour partie avec l’argent de la municipalité.
L’enquête, ouverte en février 2014, avait été confiée à un juge d’instruction en mai 2017. Dans ce dossier, l’accusation reproche à MM. Baguet et Guéant d’avoir cherché à faire financer par la ville de Boulogne-Billancourt des dépenses de propagande électorale au soutien de la candidature de Claude Guéant. Ce que les deux prévenus contestent.
Boulogne-Billancourt n’a «subi aucun préjudice», a assuré à l’AFP l’avocat du maire, Me Mario Stasi. L’édile reconnaît «une erreur» mais affirme qu’il pensait pouvoir prendre en charge «personnellement» la facture et qu’il a ensuite été décidé que ce serait l’UMP, poursuit son conseil. M. Baguet encourt jusqu’à un an d’emprisonnement et 3750 euros d’amende pour «financement illicite» de campagne.
De son côté, M. Guéant est notamment accusé d’avoir «sciemment minoré» des éléments de ses comptes de campagne et «dépassé le plafond fixé», d’après la lecture des faits par le tribunal de Nanterre en février dernier. L’avocat de M. Guéant note que la Commission nationale des comptes de campagne «a eu pleinement connaissance» de la situation. «Où est l’escroquerie, à partir du moment où la Commission savait?» s’indigne Me Bouchez El Ghozi.
Un autre volet de l’affaire concerne le délit de favoritisme, pour lequel trois personnes comparaissent – deux employées de la mairie et le gérant d’une imprimerie – ainsi que l’imprimerie en tant que personne morale. Au cours de leurs investigations, les enquêteurs ont en effet estimé que cette imprimerie se voyait attribuer plus de commandes publiques que prévu et que son gérant avait pris en charge une partie de la facture de l’impression de la lettre, ce qui constituerait un don. M. Guéant avait été battu au second tour des législatives de 2012 par Thierry Solère.
Outre ce procès, l’ex-ministre de l’Intérieur doit être rejugé dans le dossier des sondages de l’Élysée, après avoir fait appel de sa condamnation, le 21 janvier, à un an d’emprisonnement – dont huit mois ferme – pour favoritisme. L’ancien homme de confiance de Nicolas Sarkozy reste également mis en examen dans l’affaire des soupçons de financement libyen de la campagne présidentielle en 2007.