Prévoyance professionnelle – Oui aux suppléments de rentes LPP, mais pas pour tout le monde

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Prévoyance professionnelleOui aux suppléments de rentes LPP, mais pas pour tout le monde

Le Conseil national a suivi le projet moins généreux de sa commission par rapport à celui du Conseil fédéral pour compenser la baisse du taux de conversion. Au grand dam de la gauche.

Christine Talos
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Christine Talos
Avec le modèle choisi par le National, seuls les plus de 50 ans toucheront un supplément de rente.

Avec le modèle choisi par le National, seuls les plus de 50 ans toucheront un supplément de rente.

AFP

Comme prévu, le taux de conversion dans la LPP sera bel et bien abaissé de 6,8% à 6%. Cette baisse, qui n’était pas contestée, a été largement acceptée mercredi par le National qui a quand même refusé une proposition de gauche qui voulait arrêter à 6,4% ce taux qui détermine le niveau des rentes. Ainsi si un employé dispose d’un capital de 100’000 francs en quittant le monde du travail, il ne touchera plus que 6’000 francs par année au lieu de 6’800 francs.

Après avoir pris déjà des décisions mardi, le gros morceau de la réforme ce mercredi était de savoir comment les pertes de rentes engendrées par cette baisse allaient être compensées. Ceci afin de maintenir le niveau des rentes de la génération transitoire et d’améliorer la prévoyance pour les personnes travaillant à temps partiel. Deux modèles s’opposaient: celui du Conseil fédéral, fruit d’un compromis entre les patrons et les syndicats et soutenu par la gauche; et celui de la commission préparatoire, nettement moins généreux envers les futurs rentiers. C’est ce dernier modèle qui a passé la rampe, à 125 voix contre 64.

Dans ce modèle, les Suisses de la génération transitoire toucheront donc un supplément de rente LPP pendant 15 ans après l’entrée en vigueur de la réforme. Un supplément qui s’élèvera à 2400, 1800 et 1200 francs selon l’âge des rentiers. Mais tous n’y auront pas droit. Car la commission refuse le principe de «l’arrosoir» en versant des suppléments, même à ceux qui n’en ont pas besoin. Elle a donc estimé que si le montant de la rente prévu par la caisse de pension était plus généreux que le montant minimal légal annuel, il fallait réduire le coup de pouce. Le modèle du Conseil fédéral proposait lui de verser un supplément de rente à tout le monde via une cotisation sur la masse salariale de 0,5%.

«La réforme est injuste et ponctionne les jeunes»

Du coup, la gauche est fâchée. «Ce critère élimine 60 à 70% des assurés qui ne recevront pas ce supplément», a critiqué Pierre-Yves Maillard (PS/VD). Le Vaudois a aussi descendu en flammes la limitation de ce supplément de rente à 15 ans, alors que le Conseil fédéral proposait un supplément pour tous les assurés. «Cela signifie que tous ceux qui sont à plus de 15 ans de la retraite ne recevront rien quand bien même ils subiront la baisse du taux de conversion. Ils devront compenser par eux-mêmes», a-t-il dénoncé.

«Voilà pourquoi cette solution dénature complètement la proposition des partenaires sociaux. Elle est injuste, et le pire c’est qu’elle est faite au nom d’une réforme faite dans l’intérêt des jeunes», a-t-il tonné. «La solution proposée ici ne leur redonne rien puisqu’ils sont exclus du supplément de rente. Au contraire, elle les ponctionne avec une augmentation de leur salaire assuré et également avec la cotisation de 0,15%», a-t-il dénoncé.

«Pas de hausse généralisée des rentes»

La baisse du taux de conversion ne va pas s’arrêter après 15 ans, a argumenté la droite. «Comment voulez-vous expliquer à une vendeuse de 23 ans que ses déductions LPP servent à financer les rentes de retraités aisés?», a ainsi souligné Regine Sauter (PLR/ZH). Il ne faut pas que cette réforme conduise à une augmentation généralisée des rentes, ce n’est pas responsable, a-t-elle plaidé. L’UDC s’est ralliée à cet avis.

Le ministre des assurances sociales Alain Berset a tenté en vain de renverser la vapeur. «Ce modèle est beaucoup plus restrictif que celui proposé par le Conseil fédéral. Il limite fortement la durée des compensations et le cercle des bénéficiaires. Cela signifie que ceux qui n’auront pas encore atteint 50 ans au moment de l’entrée en vigueur de la réforme doivent s’attendre à des diminutions importantes de rente allant jusqu’à 10%, voire plus», a-t-il expliqué.

Pas de déductions supplémentaires pour le 3e pilier

Par ailleurs, les déductions d'impôts sur les cotisations au 3e pilier ne seront pas augmentées. Le National a refusé par 112 voix contre 80 cette tentative de la droite. Selon cette proposition, le montant des déductions des cotisations versées pour l’épargne privée aurait été revu à la hausse. «Une possibilité notamment pour les jeunes qui veulent déjà épargner pour les vieux jours», a souligné Philippe Nantermod (PLR/VD). «Vous allez faire un cadeau fiscal aux riches, à nouveau», a rétorqué Pierre-Yves Maillard (PS/VD). Seuls 10 à 15% des personnes imposables peuvent se permettre de verser le montant maximum annuel autorisé pour le 3e pilier, 6500 francs, a-t-il rappelé.

Pour rappel, mardi le National avait déjà décidé de faire cotiser les jeunes au 2e pilier dès leur 20e année, contre l’avis de la gauche qui voulait en rester à l’âge de 25 ans comme aujourd’hui. Le seuil d’accès à la LPP devrait lui être abaissé à 12’548 francs afin de mieux soutenir les travailleurs qui cumulent plusieurs temps partiels, selon la commission. Par ailleurs, les plus de 55 ans ne devraient plus être pénalisés sur le marché du travail par un taux trop élevé de bonification salariale. Il ne restera plus qu’un taux de 9% entre 20 et 44 ans, puis un taux de 14% dès 45 ans jusqu’à l’âge de la retraite. Actuellement, ce taux évolue par palier tous les 10 ans entre 7% et 18%.

Le dossier part aux États.

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