États-UnisLe tueur en série de Gilgo Beach est un vrai «démon»
L’homme arrêté jeudi, suspecté d’au moins trois meurtres mais qui pourrait en avoir commis bien d’autres, est décrit comme l’un des pires assassins jamais vu.
- par
- Michel Pralong
Jeudi 13 juillet, Rex Heuermann, un architecte new-yorkais de 59 ans, faisait de l’exercice à Manhattan lorsqu’il a été entouré et arrêté par plusieurs policiers. Il a été accusé de trois des quatre meurtres de jeunes femmes connues sous le nom de «Gilgo Four». L’homme a déclaré qu’il était innocent. Les médias américains ont depuis donné des détails sur la longue enquête qui a abouti à ce suspect et rappelé qu’il pourrait bien être le responsable de plus d’une dizaine de meurtres supplémentaires.
Les premiers indices de cette histoire sont recueillis en 2010, mais les meurtres auraient débuté avant. En décembre 2010, cherchant Shannan Gilbert, une jeune femme de 24 ans disparue depuis le mois de mai, la police découvre les restes d’une autre femme sur la plage de Gilgo Beach, près de New York. Ils sont identifiés comme ceux de Melissa Barthelemy, 24 ans. En continuant à fouiller, les enquêteurs découvrent les restes de trois autres femmes éparpillés sur un rayon de 800 mètres: Maureen Brainard-Barnes, 25 ans, Amber Costello, 27 ans et Megan Waterman, 22 ans.
Les quatre cadavres étaient enroulés dans une toile de jute de camouflage et toutes ces femmes étaient connues comme étant des escort girls. Elles étaient portées disparues entre septembre 2007 et septembre 2010. Ce sont elles qu’on appellera les «Gilgo Four» qui ont inspiré des documentaires et également le film «Filles perdues» sur Netflix en 2020.
Entre mars et avril 2011, six autres cadavres sont découverts dans la région: une petite fille, sa mère, une femme dont les premiers restes avaient été trouvés en 1996, une autre dont des restes avaient été découverts en 1997, Jessica Taylor une escort girl, ainsi qu’un homme asiatique qui avait pu être une escort transgenre. Il faut attendre décembre 2011 pour découvrir les restes de celle qui a déclenché l’affaire, Shannan Gilbert. Elle avait été vue pour la dernière fois à 800 mètres de là, appelant à l’aide en frappant contre la porte d’une maison avant de disparaître dans la nuit.
Le meurtrier appelle les familles
Le 26 août 2009, alors que le corps de Melissa Barthelemy n’a pas encore été retrouvé, sa famille reçoit un appel téléphonique passé avec le téléphone de la jeune femme: «Pensez-vous que vous la reverrez un jour? dit une voix masculine. Vous ne la reverrez pas, je l’ai tuée». Cet homme passera sept appels en tout avec ce téléphone, décrivant notamment ce qu’il avait fait subir à sa victime.
La police a longtemps piétiné sur l’affaire des «Gilgo Four». Plusieurs suspects ont été envisagés, dont des tueurs avérés, d’autant qu’avec le temps ce sont 18 cadavres qui ont été retrouvés en tout dans la région, peut-être pas tous avec le même meurtrier.
Des appels liés à Heuermann
En janvier 2020, la police publie la photo d’une ceinture trouvée près des lieux des crimes et qui pourrait avoir été manipulée par l’assassin. Elle comporte les initiales HM ou WH. Mais c’est en mars 2022 que les enquêteurs ont commencé à trouver des indices les reliant à Rex Heuermann. Ils découvrent ainsi qu’il possédait une Chevrolet Avalanche du même type que celle que conduisait l’homme qui avait embarqué Amber Costello, selon un témoin, explique CNN. Les appels téléphoniques passés par le tueur aux familles de victimes provenaient tous d’endroits liés au suspect.
Les relevés de téléphones portables utilisés par Rex Heuermann montrent qu’il a contacté des travailleuses du sexe ou des salons de massage et, sur internet, il a créé de faux noms pour un compte de messagerie utilisé pour rechercher des travailleuses du sexe, de la pornographie sadique, liée à la torture et de la pédopornographie. Il s’est aussi beaucoup renseigné sur les avancées de l’enquête sur les «Gilgo Four». Restait à trouver un élément de preuve plus convaincant.
De l’ADN sur une pizza
Les enquêteurs avaient de l’ADN qui pouvait être celui de l’assassin de Megan Waterman. Un cheveu d’homme avait été retrouvé sur la toile enveloppant son cadavre. Les policiers ont surveillé le suspect pendant des semaines avant qu’ils ne parviennent à récupérer un échantillon de son ADN sur un reste de pizza jeté à la poubelle. Il correspondait à celui du cheveu. Des cheveux de la femme d’Heuermann ont également été retrouvés à proximité de trois lieux de crime. Les enquêteurs ont réussi à déterminer qu’elle et les enfants du couple étaient hors de l’État au moment des meurtres. C’est donc que les cheveux étaient sur les habits de Rex Heuermann.
Si les policiers ont décidé de passer à l’action, c’est parce qu’ils craignaient que le suspect ne sente que l’on se rapprochait de lui et s’enfuie. Ils redoutaient également qu’il ne commette d’autres crimes puisqu’il continuait à voir des escort girls.
«L’un des pires, sinon le pire»
«C’est un démon, et il est vraiment difficile d’entrer dans l’esprit de quelqu’un qui est capable de commettre les crimes qu’il a commis», a déclaré Anthony Carter, l’un des enquêteurs à CNN. «Cette personne avait l’intention de faire ce qu’elle a fait à ses victimes. Et c’est pourquoi je dis que c’est l’un des pires, sinon le pire».
Heuermann a plaidé non coupable des trois meurtres pour lesquels il a été accusé (Melissa Barthelemy. Amber Costello et Megan Waterman) et a été placé en garde à vue vendredi. Il est également le «suspect principal» du meurtre de Maureen Brainard-Barnes, ont déclaré les procureurs. L’agent Carter a répondu à la question de savoir s’il pouvait avoir commis d’autres meurtres: «Je pense que dans les prochains jours, alors que nous continuons à rassembler des preuves, tout est possible. Je ne peux pas imaginer la douleur que ces familles ont dû endurer au cours de la dernière décennie et savoir que ce démon était capable de faire un acte aussi pervers à ces familles, c’est juste, vous savez, au-delà de l’entendement. Quand cette arrestation a finalement eu lieu, la première chose qui m’est venue à l’esprit, c’est: nous l’avons eu!»-
La femme et les enfants de Rex Heuermann, qui semble avoir mené une double vie, celle du père et architecte et celle de tueur en série, coopèrent avec la police.