EspaceAprès six mois sur Mars, l’hélicoptère de la NASA dépasse toutes les attentes
La NASA ne prévoyait de faire voler Ingenuity que cinq fois. Son hélicoptère en est aujourd’hui à douze vols et il n’est pas question d’en rester là. Devant son succès, la mission a été prolongée à l’infini.
Il n’était censé décoller que cinq fois maximum. Pourtant, l’hélicoptère de la NASA sur Mars, Ingenuity, en est aujourd’hui à son douzième vol. Et il n’est pas encore question de s’arrêter là. Devant le succès éclatant de la mission, l’agence spatiale américaine l’a prolongée indéfiniment. Et l’hélicoptère est devenu le compagnon de route du Rover Perseverance, dont la mission est de chercher des traces de vie ancienne sur Mars.
«Tout se déroule tellement bien», jubile Josh Ravich, responsable de l’équipe d’ingénierie mécanique d’Ingenuity. «Nous nous débrouillons mieux que prévu sur la surface martienne.»
Des centaines de personnes ont contribué au projet, bien qu’une dizaine seulement soit encore vraiment impliquées aujourd’hui. Josh Ravich, lui, a rejoint l’équipe il y a cinq ans. «Lorsque j’ai eu l’opportunité de commencer à travailler sur l’hélicoptère, j’ai eu la même réaction que beaucoup: est-ce qu’il est même possible de voler sur Mars?»
Le défi est de taille, car l’air martien est d’une densité équivalente à seulement 1% celle de l’atmosphère terrestre. Par comparaison, sur Terre, cela reviendrait à faire voler un hélicoptère à une altitude de 30 km.
Ingenuity a en outre dû résister à un décollage à bord d’une fusée, et à un atterrissage sur la planète rouge, le 18 février dernier, après sept mois de voyage accroché au Rover duquel il s’est ensuite détaché.
Autres difficultés: survivre aux glaciales nuits martiennes, en se réchauffant grâce à des panneaux solaires chargeant ses batteries le jour. Et voler en autonomie grâce à une série de capteurs, puisque les délais de communication entre la Terre et Mars empêchent l’envoi d’instructions en temps réel.
12 vols à son actif
Le 19 avril, Ingenuity effectue le premier vol, historique, d’un engin motorisé sur une autre planète. Dépassant toutes les attentes, il en réalise ensuite onze autres. «Nous avons été capables de faire face à des vents plus forts que nous le pensions», se félicite Josh Ravich.
«Au troisième vol, nous avions atteint tous les objectifs mécaniques (…) et récolté toutes les informations que nous espérions», explique à l’AFP cet employé du mythique Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA, en charge de l’engin. Depuis, ce dernier s’est élevé jusqu’à 12 mètres de haut et son dernier vol a duré deux minutes et 49 secondes. Au total, il a parcouru une distance de 2,6 kilomètres.
Début mai, Ingenuity a effectué un premier vol aller sans retour, en se posant à l’extérieur de la piste qui avait initialement été choisie avec soin pour son premier mois. Son sixième vol a ensuite été mouvementé: après s’être balancé dangereusement à cause d’un dysfonctionnement dans les photos prises en vol pour l’aider à se stabiliser, il a finalement réussi à se poser sain et sauf, et le problème a été réparé.
Envoyé en éclaireur
Ingenuity est désormais envoyé en éclaireur pour prendre des photos à l’aide d’un appareil couleur – le seul instrument embarqué n’étant pas indispensable à son bon fonctionnement.
L’objectif est double: s’assurer que la route est sûre pour le Rover, mais aussi qu’elle présente bien un intérêt scientifique, notamment du point de vue géologique.
Ken Farley, responsable scientifique de Perseverance, a ainsi expliqué comment, lors du douzième vol, les photos prises par Ingenuity d’une région appelée South Seitha ont montré qu’elle se révélait moins intéressante que préalablement envisagé. Les chercheurs pourraient donc abandonner l’idée d’y envoyer le Rover.
Conditions favorables
Après plus de six mois sur la planète rouge, le petit engin de 1,8 kg a gagné en notoriété auprès du grand public, et s’affiche tant sur des tasses que des t-shirts en vente sur internet.
Quel est son secret de longévité? L’environnement a été «très coopératif jusqu’ici: les températures, le vent, le Soleil, la poussière dans l’air…», explique Josh Ravich. «Il fait quand même très froid, mais cela aurait pu être pire». En théorie, l’hélicoptère peut encore fonctionner un bon bout de temps. Mais la période hivernale approche et pourrait compliquer les choses.
Alors déjà, grâce aux données de vol d’Ingenuity, les ingénieurs planchent sur son remplaçant – la prochaine génération d’hélicoptères sur Mars. «Quelque chose dans les 20 ou 30 kilos, capable de transporter des équipements scientifiques», détaille Josh Ravich.
Qui sait, ces futurs chargements seront peut-être les échantillons de roche actuellement prélevés par Perseverance. La NASA prévoit d’aller les récupérer lors d’une future mission, dans les années 2030.
Version originale publiée sur 20min.ch