Editorial: Le Conseil fédéral traverse une mauvaise passe

Publié

ÉditorialLe Conseil fédéral traverse une mauvaise passe

Il n’y a pas de trêve estivale pour Alain Berset, Viola Amherd ou Ignazio Cassis. Quand les fuites pèsent sur l’ambiance au Palais fédéral.

Eric Felley
par
Eric Felley
Le 30 juin dernier, le Conseil fédéral était en excursion aux chutes du Rhin, avant de se rendre au Tessin chez son président Ignazio Cassis.

Le 30 juin dernier, le Conseil fédéral était en excursion aux chutes du Rhin, avant de se rendre au Tessin chez son président Ignazio Cassis.

Twitter/Chancellerie fédérale

«Le Conseil fédéral traverse une mauvaise passe», c’est le constat du chef du groupe socialiste aux Chambres fédérales, Roger Nordmann (PS/VD) dans «Le Matin Dimanche». Alors que les sept Sages sont en vacances, c’est peu dire que ces dernières semaines, les nouvelles qui viennent du Gouvernement tiennent davantage de la discordance que de la concordance. Ce qui se passe autour de l’achat des F-35 et du Département de la défense dirigé par Viola Amherd est symptomatique d’une situation, où la collégialité est mise à mal par de nouvelles fuites.

Du discrédit pour Viola Amherd

Si le dossier du F-35 continue d’évoluer de la sorte, l’achat de l’avion américain risque de connaître le même sort que celui du Gripen, le «griffon» suédois, du temps d’Ueli Maurer. La gauche n’a jamais fait mystère de son opposition au contrat avec Lockheed Martin. Mais aujourd’hui, les réticences au projet de Viola Amherd semblent venir aussi de certains milieux de droite mécontents de la manière. La ministre valaisanne doit donc se battre sur plusieurs fronts et surveiller ses arrières. Tout ce qui ajoute du discrédit à sa gestion du dossier la rend plus fragile.

Un coup dur pour Alain Berset

Les fuites sont une réalité embarrassante dans la politique fédérale. D’un côté elles font sortir des informations, de l’autre, elles sont déloyales et cachent souvent une volonté de nuire. La violation du secret de fonction à Berne est un sport à haut risque. Ce sont des fuites dans l’affaire Crypto AG, qui ont conduit à la démission du bras droit d’Alain Berset, Peter Lauener. Pour le chef de la Santé, la perte de ce collaborateur fidèle est un coup très dur. Après la longue période du Covid19, l’affaire du chantage, ses adversaires politiques du côté de l’UDC doivent se frotter les mains. S’ajoute à cela l’épisode rocambolesque du vol en avion en France, qu’il aurait caché à ses collègues.

L’entourage proche des conseillers sous enquête

Mais il n’y a pas qu’Alain Berset qui est visé. L’enquête sur Crypto AG concerne aussi un haut fonctionnaire bien connu à Berne, Markus Seiler, d’obédience PLR, secrétaire général d’Ignazio Cassis et ancien chef du renseignement. L’enquête est menée par un juge à la retraite, Peter Marti, qui met un zèle inédit à vouloir confondre le ou les auteurs de cette fuite en frappant dans l’entourage proche des conseillers fédéraux. La couleur politique de cet ancien élu de l’UDC zurichoise n’est pas sans éveiller certains soupçons.

Un président «absent»

Bref, l’ambiance de la politique fédérale n’est pas très bonne en cet été 2022. Elle n’est pas meilleure au Département fédéral des affaires étrangères d’Ignazio Cassis. Le site «L’impertinent» a révélé que depuis le début de l’année, 28 collaborateurs des RH du DFAE auraient démissionné et son chef a été dépeint comme «démissionnaire et absent». Le président Ignazio Cassis, qui s’est beaucoup investi dans la Conférence de Lugano pour la reconstruction de l’Ukraine au début juillet, devrait aussi jouer de sa fonction pour calmer le jeu en Suisse. Mais ici aussi, ses relations difficiles avec sa collègue du PLR Karin Keller-Sutter sont régulièrement un sujet de tensions au sein du collège.

Beaucoup de nervosité

Comme on le voit, les occasions sont multiples pour diviser les sept Sages ou les monter les uns contre les autres. On sent une volonté de créer un certain chaos au Conseil fédéral à une année des élections fédérales. On sent aussi beaucoup de nervosité à droite à l’approche des votations du 25 septembre sur l’AVS et la suppression de l’impôt anticipé. Un rendez-vous devant le peuple qu’elle ne doit absolument pas manquer.

Ton opinion

96 commentaires