France«La Meuse n’est pas une poubelle nucléaire»
Une marche de protestation à l’encontre du projet Cigéo a réuni plusieurs centaines de militants antinucléaires, dont des Suisses, samedi à Bure.
Plusieurs centaines de personnes ont manifesté samedi à Bure (Meuse) contre le projet, baptisé Cigéo, d’enfouissement des déchets nucléaires les plus radioactifs, en clôture des «Rencontres des luttes paysannes».
«Entre 700 et 800» manifestants
Le cortège, ouvert par une banderole «La Meuse n’est pas une poubelle nucléaire», a réuni des militants antinucléaires de différentes nationalités (Français, Allemands, Suisses, Brésiliens, Colombiens), des riverains et des familles dans une ambiance bruyante et festive pour une marche jusqu’à la commune voisine de Mandres en Barrois. Des drapeaux de La France insoumise, de la Confédération paysanne, du réseau Sortir du nucléaire ou encore du syndicat Solidaires étaient visibles.
«Près d’un millier de personnes ont participé aux Rencontres, et nous étions entre 700 et 800 pour la marche», a déclaré à l’AFP Fred, maraîcher et membre du comité d’organisation, qui n’a pas souhaité préciser son nom. «Certains internationaux n’ont pas pris part à la marche, ils estiment que le maintien de l’ordre en France est trop violent», a-t-il assuré.
«Déni démocratique»
La manifestation visait à dénoncer le «passage en force» de l’Etat pour «imposer le centre d’enfouissement malgré l’opposition des habitants de la Meuse», selon les mots de Marie-Neige Houchard, co-secrétaire départementale d’Europe-écologie-Les Verts (EELV). «Il y a un déni démocratique complet autour de ce projet. Et puis on arrose les élus d’argent public pour acheter les consciences», a-t-elle déploré, en évoquant les 30 millions d’euros distribués chaque année par les deux Groupements d’intérêt public (GIP) en Meuse et Haute-Marne pour le développement économique local.
«Cigéo, ça donne l’impression qu’on peut se servir du nucléaire, que les déchets sont gérables, alors qu’ils sont là pour des dizaines de milliers d’années», a estimé Pierre Ferté, apiculteur de 58 ans, venu de la Marne. «Les enfouir, c’est vraiment faire l’autruche, ce n’est pas une solution.»
Important dispositif sécuritaire
Chargée de mission en agriculture paysanne, Marie Michaud, 30 ans, se dit préoccupée par «l’accaparement des terres par l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, qui porte le projet Cigéo, ndlr) et la Safer» (Société d’Aménagement Foncier et d’Etablissement Rural, ndlr) au bénéfice de Cigéo. «C’est très compliqué pour un jeune agriculteur de s’installer ici, parce que l’Andra a la mainmise sur les terres», assure la jeune femme venue de Moselle. «Or aujourd’hui, on a besoin d’agriculteurs pour faire vivre ce territoire».
La manifestation s’est déroulée sans heurts. Un important dispositif sécuritaire avait été mis en place par la préfecture, qui avait autorisé la surveillance par drones et par hélicoptères. «Le dimensionnement (du dispositif) est relativement important, avec plusieurs unités de forces mobiles engagées», a indiqué la préfecture à l’AFP, sans toutefois préciser le nombre d’agents mobilisés. En janvier, l’Andra a déposé une demande d’autorisation de création (DAC) pour Cigéo, visant à concrétiser le projet d’enfouissement des déchets nucléaires à Bure. Pour l’heure, le site meusien de l’Andra n’accueille qu’un laboratoire scientifique, aucun déchet radioactif n’y est entreposé.