Session parlementaireLe Conseil des États roule pour les pistes cyclables
La Suisse pourra se doter d’un réseau de voies cyclables interconnecté et sûr. Les sénateurs ont soutenu la nouvelle loi qui découle du vote du peuple en 2018. Ils veulent toutefois plus de liberté pour les cantons.
- par
- Christine Talos
Bonne nouvelle pour les cyclistes: le Conseil des États a accepté par 38 voix contre 4 la nouvelle loi sur les voies cyclables. Ce projet fait suite à la votation sur le vélo plébiscitée par le peuple à 73,6% en septembre 2018. Celle-ci demandait un réseau interconnecté et sûr et précisait que les voies cyclables devaient être à l’avenir mentionnées dans l’article 88 de la Constitution et mises sur un pied d’égalité avec les chemins et sentiers de randonnée pédestre.
«Ce projet de loi est équilibré. Les différents utilisateurs de la route ne devraient pas le percevoir comme une entrave supplémentaire mais comme l’espérance d’une amélioration de la situation actuelle» a expliqué la sénatrice Marianne Maret (Centre/VS). «Aujourd’hui, le confort des cyclistes, mais également celui des chauffeurs de voiture, moto, camion, bus et celui des piétons est parfois perturbé par des situations où le trafic n’est plus fluide et où l’on ne sait plus très bien qui peut faire quoi», a souligné la présidente de l’Alliance Cycla pour le vélo. «Il est temps de mettre fin à l’opposition stérile entre les cyclistes et les automobilistes.»
Comme pour les chemins de randonnée
La loi est très similaire à celle sur les chemins et sentiers de randonnée, a indiqué le rapporteur de commission Stefan Engler (Centre/GR). Mais elle n’a pas été intégrée à cette dernière, ce qui n’a pas eu l’heur de plaire à une minorité emmenée par l’UDC Werner Salzmann. Selon lui, le projet va trop loin et force trop la main aux cantons et communes. «La loi sur les voies cyclables ne doit pas aller plus loin que celle sur les chemins et sentiers de randonnée pédestre, qui a fait ses preuves depuis des décennies et qui laisse la liberté nécessaire aux cantons et aux communes», a-t-il souligné en vain. «Les cantons restent responsables de la construction de pistes cyclables. Il n’y a aucune obligation», a répondu la ministre des Transports Simonetta Sommaruga.
La nouvelle loi confie aux cantons la responsabilité d’aménager et de réaliser des réseaux de voies cyclables. Les plans devront être contraignants pour les autorités. Des objectifs de qualité devront être respectés. Les réseaux seront interconnectés, directs, sûrs et attrayants. Ils devront en outre être remplacés dès qu’ils ne répondent plus aux exigences en matière de sécurité. Mais il pourrait y avoir des exceptions si la mesure est trop contraignante.
Les pistes devront être interconnectées
S’ils approuvent la nouvelle loi, les sénateurs tiennent toutefois à laisser plus de marge de manœuvre aux cantons et communes. Les voies cyclables ne seront remplacées que si cela répond à un intérêt public manifeste. Leur tracé devra être aussi direct et leur qualité aussi homogène que possible. Le gouvernement était plus exigeant.
Les pistes cyclables devront en revanche être continues. Le Conseil des États a refusé de suivre une minorité, dont faisait partie le sénateur Olivier Français (PLR/VD) qui voulait laisser plus de liberté aux cantons en la matière. Selon lui, il y a parfois des contraintes topographiques ou géométriques qui l’empêchent, puisque les routes sont limitées dans l’espace. «Cela entraîne des coûts supplémentaires. Or, qui paie? Ce sont les cantons et les communes».
Des sénateurs se sont aussi inquiétés de la gêne occasionnée pour les engins agricoles. «Un tracteur ne passe pas toutes les minutes sur les routes de campagne», a rétorqué Eva Herzog (PS/BS). «Il est question ici d’un élément central de la loi et de la sécurité des cyclistes». Le plénum l’a suivie par 26 voix contre 18.
Pas de droit de recours pour les organisations spécialisées
Le Conseil des États a outre décidé de suivre sa commission et de supprimer du projet le droit de recours des organisations spécialisées. Les compétences de ces dernières seraient trop étendues par rapport aux organisations défendant les autres utilisateurs de la route, comme les piétons ou les automobilistes, a estimé Thierry Burkart (PLR/AG). Une minorité souhaitait maintenir la version du Conseil fédéral, faisant valoir que le droit de recours offre aux organisations spécialisées un instrument leur permettant d’apporter leur expertise.
Berne pourra en revanche faire appel à des organisations spécialisées et les rémunérer. Inquiets pour l’argent public, les élus de droite ont encore voulu biffer en vain du projet l’information du public. Enfin, les arrêts de transports publics seront considérés comme faisant partie de la route. Le Conseil des États a tacitement ajouté ce point au projet.
Le dossier passe au National.
Les Verts satisfaits
Les Verts se réjouissent de la décision du Conseil des États. «Cette loi promeut le vélo comme moyen de transport respectueux du climat et économe en espace, mais aussi comme activité bonne pour la santé. Un avis que partage une grande majorité de la population, comme l’a montré la votation de 2018 sur l’arrêté fédéral concernant les voies cyclables», estime le sénateur glaronais Mathias Zopfi.
Le dossier passe au National. Le sénateur estime que le projet peut encore être amélioré. Selon lui, les pistes cyclables supprimées doivent être remplacées dans la mesure du possible. «Au lieu de remplacer les pistes cyclables dangereuses, mieux vaut prendre d’autres mesures pour les rendre plus sûres, comme, par exemple, améliorer l’éclairage public», propose-t-il. Les organisations cyclistes devraient en outre jouir d’un droit de recours afin de pouvoir défendre les intérêts des cyclistes devant les tribunaux, ajoute-t-il.