GUERRE EN UKRAINELes jeunes veulent une Suisse plus neutre que leurs aînés face à Kiev
Selon un sondage du «SonntagsBlick», les opinions divergent entre jeunes et plus âgés quant à la position à adopter par la Suisse dans le conflit. Les 18-35 ans et les femmes veulent plus de neutralité.
Vendredi prochain, cela fera un an que la Russie a attaqué l’Ukraine, rappelle le «SonntagsBlick» du jour en préambule à un sondage mené auprès de 16’249 Suisses. Les questions principales: Berne doit-elle s’engager plus en faveur de l’Ukraine? La Suisse peut-elle autoriser des exportations d’armes? Et faut-il adapter la politique de neutralité?
Poutine à juger pour crimes de guerre
A la question «Vladimir Poutine doit-il être traduit devant un tribunal pour crimes de guerre?» 63% des personnes sondées disent un franc oui, et 11% y sont plutôt favorables. Les opinions divergent bien davantage, notamment entre jeunes et plus âgés, quant à la position à prendre par la Suisse dans le conflit: près de la moitié (49%) des 18-35 ans souhaitent que la Suisse se comporte de manière plus neutre. Et seuls 33% d’entre eux sont favorables à une politique plus offensive.
Le résultat est totalement inversé chez les plus de 55 ans: 49% des répondants demandent un plus grand engagement de la Suisse en faveur de l’Ukraine, et seul un tiers (33%) souhaite plus de retenue. Dans ce cadre, Michael Hermann, directeur de l’institut Sotomo qui a réalisé l’étude d’opinion, estime que l’initiative de l’UDC sur la neutralité aura du mal à trouver une majorité car le nombre de partisans et d’opposants n’a guère changé depuis le dernier sondage sur ce thème il y a un an: «Bien qu’une forte minorité d’un peu plus de 40% soutienne l’initiative, les opinions sont faites à ce sujet.»
Livraison d’armes et reconstruction
Les avis entre générations divergent également sur la livraison à l’Allemagne de chars Leopard, note le journal dominical: les deux tiers des jeunes s’y opposent, tandis que les personnes plus âgées sont presque aussi nombreuses à y être favorables (59%).
Les jeunes sont également nettement plus sceptiques sur la question de savoir si les avoirs des oligarques doivent être utilisés pour la reconstruction de l’Ukraine. 60% des plus de 55 ans se prononcent en faveur d’une confiscation de ces fonds, et seuls 45% des jeunes l’approuvent.
Clivage générationnel d’avant et après-guerre froide
Selon Michael Hermann, directeur de l’institut Sotomo, ce clivage entre générations s’expliquerait par le fait que «celui qui a vécu la guerre froide a une autre approche de la Russie. L’Union soviétique avait à l’époque l’image d’un ennemi.» Par ailleurs, les sondés plus âgés consomment plutôt des médias traditionnels, majoritairement positionnés en faveur de l’Ukraine, note Michael Hermann: «Les plus jeunes, en revanche, fréquentent plutôt les médias sociaux, ce qui les confronte à d’autres points de vue, favorables à la Russie.»
Le fossé se creuse entre femmes et hommes
Un fossé similaire qu’entre générations, bien que moins prononcé entre hommes et femmes, ressort aussi du sondage. Les deux groupes ont peu de sympathie pour Vladimir Poutine, mais les femmes sont nettement moins enclines à reconnaître à la Suisse un rôle actif dans le conflit. Les hommes sont, eux, majoritairement favorables aux livraisons d’armes et à un engagement plus fort de la Suisse et rejettent également majoritairement l’initiative de neutralité de l’UDC. Au contraire des femmes pour qui le nombre de partisanes et opposantes à l’initiative s’équilibre pratiquement. Et une courte majorité s’oppose à l’exportation de matériel de guerre suisse vers l’Ukraine.
Divergences des partis politiques
Le sondage a également classé les réponses selon l’appartenance politique des sondés. En matière de politique étrangère, il apparaît que les électeurs Vert’libéraux sont les plus clairement pro-ukrainiens et attendent plus d’engagement en faveur de l’Ukraine du Conseil fédéral. Ils demandent la livraison de chars à l’Allemagne et se prononcent plus clairement que tous les autres pour une étroite collaboration avec l’OTAN.
A l’extrémité opposée, les sympathisants de l’UDC sont trois quarts à demander un comportement plus neutre à Berne et la grande majorité s’oppose à la livraison de chars à l’Allemagne. Un point de vue en accord avec la défense de la neutralité prônée par le parti.