Royaume-UniBoris Johnson exclut un retour à l’économie pré-Brexit
Malgré les pénuries, le Premier ministre britannique refuse de revenir au modèle économique «cassé» qui prévalait au Royaume-Uni avant sa sortie de l’Union européenne.
Malgré des pénuries persistantes dans les supermarchés ou à la pompe, accentuées par le Brexit, le Premier ministre britannique Boris Johnson a exclu dimanche de revenir au modèle économique «cassé» qui prévalait au Royaume-Uni avant sa sortie de l’Union européenne. Au premier jour de la grande conférence annuelle de son Parti conservateur, le dirigeant s’est employé à rassurer, affirmant qu’il voulait donner un nouvel élan au pays, actuellement confronté à une multiplication des crises, de la hausse des prix du gaz à la rupture des chaînes d’approvisionnement faute de main d’œuvre suffisante.
En votant pour le Brexit en 2016 puis en élisant les conservateurs trois ans plus tard, les Britanniques «ont voté pour mettre fin à un modèle économique cassé au Royaume-Uni qui reposait sur de bas salaires, de faibles qualifications et une productivité chroniquement basse. Et nous nous éloignons de cela», a-t-il déclaré sur la BBC. Prévue de dimanche à mercredi à Manchester (nord-ouest de l’Angleterre), la grand-messe des tories, la première en présentiel depuis deux ans en raison du coronavirus, représente une occasion pour Boris Johnson de s’exprimer devant ses troupes. Son discours est prévu mercredi.
Arrivé au pouvoir en juillet 2019, vainqueur des élections générales organisées quelques mois plus tard sur la promesse de «réaliser le Brexit», Boris Johnson, 57 ans, doit à présent convaincre les Britanniques des bienfaits de la sortie de l’Union européenne qu’il a tant vantés. Car pour l’heure, ses effets ne semblent qu’aggraver certaines conséquences de la pandémie, notamment quant à la difficulté à trouver des chauffeurs routiers – jusqu’à 100’000 manquent au Royaume-Uni – pour approvisionner rayonnages des supermarchés et cuves de stations-services.
«Période d’ajustement»
Boris Johnson n’a, lui, de cesse de répéter que ces «tensions et difficultés» pour l’économie britannique sont liées à la reprise sur les chapeaux de roue de l’économie mondiale après la pandémie et à une demande exceptionnelle causée par des achats de panique dans les stations d’essence. Dès lundi, environ 200 militaires seront déployés pour approvisionner les stations, devant lesquelles de longues files d’attente se forment depuis deux semaines. D’après la Petrol Retailers Association, les pénuries restent «vraiment très problématiques» à Londres et dans le sud-est de l’Angleterre.
Le Royaume-Uni manque aussi de milliers de bouchers, faisant craindre des pénuries de produits traditionnels pour Noël et des abattages massifs de porcs faute de pouvoir transformer la viande, selon des professionnels du secteur. Face à la menace de rayons vides à Noël, le gouvernement a amendé sa politique d’immigration, durcie après le Brexit, pour accorder jusqu’à 10’500 visas de travail provisoires. Boris Johnson n’a pas exclu que davantage de permis temporaires puissent être délivrés, tout en lançant une mise en garde. «Ce que nous ne pouvons pas faire dans tous ces secteurs, c’est simplement retourner au vieux modèle fatigué et déficient, et recourir au levier de l’immigration incontrôlée», a-t-il insisté. «Donc oui, il y aura une période d’ajustement».
Soulignant que son gouvernement avait tenu sa promesse de campagne en réalisant le Brexit et qu’il avait vacciné massivement contre le Covid-19, il avait assuré samedi vouloir prendre des «décisions audacieuses» pour répondre aux priorités des Britanniques, comme l’emploi, la sécurité et le changement climatique. «Tout ceci montre que nous tenons parole, et il est maintenant temps d’aller plus loin, non seulement pour se remettre mais aussi reconstruire en mieux», a-t-il ajouté. Jusque dans son propre camp, certains voient toutefois la hausse des prélèvements sociaux comme un frein à cet objectif.
Malgré ces difficultés, les conservateurs (39%) continuent de devancer les travaillistes (35%) dans les intentions de vote, selon un sondage Opinium Poll publié samedi soir. Quelque 59% des sondés estiment toutefois que le Brexit se passe mal et 69% pensent que le gouvernement a mal géré la crise des chauffeurs routiers.