Droit du travail – Le premier syndicat chez Starbucks aux Etats-Unis est né

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Droit du travailLe premier syndicat chez Starbucks aux États-Unis est né

Les employés de deux cafés Starbucks ont remporté une victoire historique jeudi en votant pour la création d’un syndicat dans leurs établissements, une première au sein de la chaîne aux États-Unis.

Un café Starbucks à Buffalo.

Un café Starbucks à Buffalo.

AFP

Les cris de joie et les embrassades ont fusé jeudi juste après la proclamation des premiers résultats dans la salle où s’étaient retrouvés les meneurs de la campagne. «Starbucks avait tout fait pour que ce soit quasiment impossible», a réagi l’une d’entre eux dans la foulée, Casey Moore. «Après tout ce qu’on vient de traverser, gagner est le sentiment le plus incroyable au monde.»

Deux stars de l’aile gauche du parti démocrate américain ont rapidement félicité les salariés sur Twitter, Bernie Sanders saluant une victoire «historique» tandis qu’Alexandria Ocasio-Cortez a accompagné son message d’un poing levé.

L’ambiance s’est un peu assombrie au fur et à mesure que le dépouillement des votes des salariés d’un autre café de la zone de Buffalo a montré qu’ils s’étaient prononcés en majorité contre la création d’un syndicat. Mais les sourires sont revenus après le décompte en faveur du «oui» dans un troisième café. Des recours ayant été déposés par le syndicat et l’entreprise sur ce scrutin spécifiquement, les résultats finaux doivent encore être confirmés.

Les cris de joie et les embrassades ont fusé jeudi juste après la proclamation des premiers résultats dans la salle où s’étaient retrouvés les meneurs de la campagne.

Les cris de joie et les embrassades ont fusé jeudi juste après la proclamation des premiers résultats dans la salle où s’étaient retrouvés les meneurs de la campagne.

AFP

Les organisateurs de la campagne avaient déposé un dossier pour se syndiquer sous la bannière de l’organisation «Starbucks Workers United» (SWU) fin août et les bulletins de vote avaient été envoyés à tous les salariés le 10 novembre. Ces derniers avaient jusqu’à mercredi pour les renvoyer à l’agence américaine en charge du droit du travail (NLRB), qui effectuait jeudi le décompte en ligne.

Grogne ambiante

Plus tôt dans la journée, aucun signe du vote historique n’était visible dans l’établissement situé à Elmwood Avenue. La dizaine de serveurs s’empressaient simplement de préparer les commandes des clients. «Ils font partie de mon quotidien et c’est normal qu’ils aient un salaire décent», remarquait Steve Boyd, avocat de 60 ans, à sa sortie de l’établissement. S’il faut créer un syndicat pour avoir de meilleures conditions de travail, «alors je les soutiens», a-t-il dit.

Comme la tentative de syndicalisation menée dans un entrepôt d’Amazon dans l’Alabama au printemps, la campagne des salariés de Starbucks a attiré l’attention bien au-delà des rues de Buffalo, dans le nord de l’État de New York. Elle reflète la grogne d’employés décidés à se battre, à un moment où la dynamique sur le marché du travail leur est favorable, remarque Cedric de Leon, professeur de sociologie à l’université Massachusetts Amherst.

Alors que de nombreux employeurs peinent à recruter, «le pouvoir de négociation des salariés est très élevé en ce moment», explique-t-il en évoquant les nombreuses grèves ayant émaillé le mois d’octobre ou les millions d’Américains ayant choisi ces derniers mois de démissionner.

Cadences intenses

Quand il a rejoint Starbucks en mai, Will Westlake, 24 ans, se félicitait de travailler pour un groupe brandissant régulièrement ses valeurs progressistes et offrant généralement de meilleures conditions de travail que les autres cafés.

«Mais quand j’ai commencé, je me suis rendu compte que ce n’était pas forcément le cas», raconte-t-il à l’AFP. Il a été particulièrement choqué de découvrir que des personnes travaillant depuis plusieurs années gagnaient à peine plus que lui, mais se plaint aussi de cadences intenses. «On vend des boissons à huit, neuf dollars, toutes les 30 secondes, tout au long de la journée, mais l’entreprise n’a pas rattrapé la demande» en embauchant plus de salariés.

La pandémie a accentué les frustrations des salariés, nombre d’entre eux estimant n’avoir pas reçu suffisamment de soutien pour faire face aux nouvelles exigences sanitaires.

Les pro-syndicats étaient d’autant plus motivés que Starbucks a fait preuve de résistance. Quelques semaines après le lancement de la mobilisation syndicale, le groupe a annoncé plusieurs mesures comme le relèvement de son salaire minimum ou une meilleure prise en compte de l’ancienneté. Mais il a aussi, selon les organisateurs de la campagne, déployé les grands moyens pour tenter de convaincre les employés de voter non, envoyant notamment un bataillon de cadres dans la région.

Starbucks assure ne pas être contre les syndicats mais estime que les conditions de travail et les avantages que l’entreprise propose ne justifient pas la création d’une organisation intermédiaire entre les salariés et la direction. Si le groupe s’inquiète tellement de l’arrivée d’un syndicat, même dans un seul café, «c’est bien parce que cela pourrait déclencher une vague au sein de l’entreprise», remarque Cedric de Leon.

(AFP)

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