EspaceLe Biennois devenu astronaute «espère toujours garder les pieds sur terre»
Marco Sieber est le deuxième Suisse à être sélectionné par l’Agence spatiale européenne. Interview.
- par
- Vincent Donzé
Après Claude Nicollier, le sergent Marco Sieber est le deuxième Suisse à devenir astronaute au sein de l’Agence spatiale européenne. Détenteur d’une licence de pilote et membre du commando de parachutistes de l’Armée suisse, cet urologue de 33 ans engagé au Centre hospitalier de Bienne fait partie d’un groupe de cinq sélectionnés parmi 22 000 candidats.
Marco Sieber, pourquoi vous, sur 22 000 candidats?
C’est une très bonne question, à laquelle je ne suis pas non plus tout à fait en mesure de répondre. Les candidats que j’ai rencontrés sont vraiment tous des personnes passionnantes et très talentueuses. Bien sûr, je me suis toujours préparé minutieusement aux étapes de sélection. Mais au final, ce qui compte, c’est de trouver la personne qui correspond le mieux au profil recherché. Et il a certainement aussi fallu un peu de chance pour réussir cette sélection.
C’est comme gagner au Lotto?
C’est exactement ce que je ressens.
Il reste cinq candidats, quelles sont vos chances d’aller dans l’espace?
Selon l’Agence spatiale européenne (ESA), les cinq candidats ont de bonnes chances d’être sélectionnés pour une mission spatiale s’ils réussissent les entraînements et les tests qui suivent. Mais nous ne savons pas encore quand cela aura lieu.
Pourrez-vous emporter quelque chose de biennois? Une montre?
On peut dire que j’ai certainement beaucoup appris à Bienne, que ce soit sur le plan médical ou, surtout, en ce qui concerne le français. Le bilinguisme est quelque chose de fascinant, et j’ai eu beaucoup de plaisir à travailler dans un tel environnement. Je n’ai pas reçu de montre, mais j’ai rencontré beaucoup de gens formidables.
En quoi votre profession d’urologue vous servira dans l’espace?
Au cours de ma carrière médicale, j’ai eu l’occasion de découvrir de nombreuses disciplines différentes (chirurgie, anesthésie, médecine d’urgence, médecine intensive et, en effet, l’urologie). Il est certainement important d’avoir de vastes connaissances et compétences pour une éventuelle mission spatiale. En ce qui concerne l’urologie et l’espace, il n’existe pas encore beaucoup de données scientifiques, mais certaines études montrent qu’environ 10% des problèmes médicaux observés dans l’espace relèvent du domaine de l‘urologique. Il s’agit principalement d’infections urinaires, de rétentions urinaires ou de calculs rénaux. Ce sont des problèmes qui peuvent rapidement compromettre une mission. Il est donc utile d’avoir des compétences et des connaissances de base dans ce domaine.
Trente-trois ans, l’âge du christ, avez-vous peur de la mort?
Je peux dire que j’apprécie et valorise beaucoup la vie. Bien sûr, il y a certains risques dans l’espace, mais le travail hautement professionnel de toutes les personnes impliquées est conçu pour minimiser ces risques afin que les astronautes retournent en bonne santé.
Pourrez-vous garder votre moustache?
Elle a déjà disparu, mais elle reviendra certainement à un autre moment.
Depuis quel âge rêvez-vous d’espace?
Évidemment, depuis mon enfance, et ce rêve ne m’a jamais vraiment quitté.
Vos parents vous ont-ils initié?
Oui, peut-être. En tout cas nous avions à la maison un livre avec les (à l’époque encore) 9 planètes, que je regardais presque tous les jours et j’étais émerveillé.
Avez-vous lu les albums Tintin «Objectif Lune» et «On a marché sur la lune»?
Malheureusement non, j’ai lu quelques BD de Tintin, mais pas celles-ci. Dans mon enfance, c’était plutôt Globi, qui était aussi dans l’espace.
Quelle est votre planète préférée?
La Terre, bien sûr. Il n’y a probablement aucune autre planète aussi belle que la nôtre, c’est pourquoi il est important que nous veillions à la protéger. Bien entendu Mars est également très intéressante, surtout si l’on pense qu’il est possible d’y vivre un jour. Et quand j’étais enfant, j’ai toujours été fasciné par Saturne et ses anneaux, mais je laisse volontiers à d’autres le soin d’y vivre.
Arrivez-vous à redescendre sur terre?
J’espère toujours garder les pieds sur terre, que ce soit dans les airs, dans l’espace ou sur terre. Personne n’aime vivre six mois dans un espace confiné avec quelqu’un de trop prétentieux.