MusiqueMarc Aymon: de chanteur à chercheur d’or suisse
Le Valaisan a réuni une dizaine d’artistes romands pour réinterpréter 15 chansons et poèmes de notre patrimoine. Rencontre.
- par
- Laurent Flückiger
Quel chemin parcouru par Marc Aymon, 40 ans, chanteur de variété française, folk, blues-rock et désormais glaneur. C’est le nom de son dernier projet, passionnant, une fois de plus. «Glaneurs» avec un «s», car le Valaisan s’est entouré d’une dizaine d’artistes romands de toutes générations, de la prometteuse Milla à Henri Dès en passant par Julie Berthollet, Aliose, Carrousel, Jérémie Kisling, François Vé, Michel Bühler et Pascal Auberson, pour la première fois réunis.
Comme souvent avec Marc Aymon, c’est d’une aventure qu’a découlé une autre. En automne 2017, il revisite le patrimoine chanté suisse dans un disque et livre (illustré par Cosey) intitulé «Ô bel été! Chansons éternelles». L’accueil chaleureux du public lui donne l’idée d’inviter les gens à pousser la porte de leur grenier afin de découvrir leurs vieux carnets de chant et partitions qui seront ensuite redécouverts et réinterprétés de manière folk et moderne. Plusieurs centaines de documents sont récoltées.
Une expérience sur quinze jours
Durant quinze jours, fin 2019, se déroule alors une expérience filmée par trois caméras et retransmise en direct aux Arsenaux de Sion et au MCBA de Lausanne. «On ouvrait les documents, et quand les chansons étaient belles et qu’on avait envie de les chanter on les chantait. Quand les textes étaient beaux et que la guitare ne faisait que suivre, on les mettait naturellement en musique», explique Marc Aymon. L’accompagnent: le multi-instrumentiste et réalisateur Frédéric Jaillard et Xavier Michel, moitié d’Aliose mais aussi historien. Des amis musiciens passent les voir et font acte de création à leur tour.
Quarante-deux pistes sont enregistrées. Mais, pour Marc Aymon, pas question d’en faire un disque, c’est l’expérience qui comptait. «Puis le Covid est arrivé, j’ai pris le temps de les réécouter et j’ai trouvé dommage qu’elles ne soient pas diffusées, raconte le Valaisan. J’ai appelé les copains pour leur proposer de continuer ce laboratoire et de réenregistrer certaines choses. Jusqu’à trouver les 15 poèmes et chansons qui allaient construire ce projet physique de 72 pages, un carnet de chant imprimé en Suisse et illustré par Albertine.» Et disponible en librairie.
Deux femmes en haut de la liste
«Glaneurs, trésors éternels», c’est une aventure humaine, des duos inédits, «Le bonheur» de Jean Villard-Gilles réinterprété, mais aussi la (re)découverte de deux femmes issues du patrimoine suisse, en particulier. Premièrement, la jeune poétesse neuchâteloise Alice de Chambrier, décédée en 1882 d’une grippe à l’âge de 21 ans. En ouverture du disque et chanté par huit des dix artistes, «L’esquif» est l’un de ses poèmes, mis en musique par Marc Aymon. Ce dernier s’émeut: «Elle parle de la condition humaine, de la futilité des choses. C’est un texte qu’on aurait tous voulu écrire. Son histoire me touche: c’est une femme pleine de promesses brisée en plein vol.» En second, l’artiste pluriforme Marguerite Burnat-Provins, très inspirante encore aujourd’hui. Son «Cœur sauvage» écrit en 1907, qui décrit le plaisir charnel, est chanté par Milla, 22 ans sur une musique de Jérémie Kisling.
«Avec ce projet, on présente un patrimoine très moderne qui a une résonance avec beaucoup de choses actuelles. Il encourage à être curieux et à se rassembler», conclut Marc Aymon qui rêve à présent de réunir tout ce petit monde en live. Encore une aventure.
En dédicace dans les librairies Payot: 20 octobre à Morges, 21 octobre à Genève, 22 octobre à Sierre, 12 novembre à Vevey, 19 novembre à Nyon (de 11 h à 12 h 30) et à Yverdon-les-Bains (de 15 h à 17 h 30), le 26 novembre à Lausanne