Commentaire: La Constitution suisse: 175 ans et presque toutes ses dents

Bon anniversaire la Suisse! tel est le message que l’on voit ci et là sur les réseaux sociaux en ce 12 septembre. S’agirait-il de la date de naissance de Guillaume Tell ou du président Alain Berset? Ni l’un ni l’autre. Guillaume Tell n’est jamais né et Alain Berset est du 9 avril. Non le 12 septembre est l’anniversaire de la Suisse moderne sur le papier, soit l’entrée en vigueur de sa Constitution en 1848. «Un coup de maître, un acte fort, risqué et particulièrement audacieux…», a déclaré ce mardi le président de la Confédération, Alain Berset.

Le président a diffusé sur le réseau social X un court message pour marquer le coup. Le Département fédéral des affaires étrangères d’Ignazio Cassis aussi. Son ambassadeur Nicolas Bideau en a profité pour relever qu’en 1848, les affaires étrangères comptaient trois collaborateurs. Aujourd’hui, il en compte 5000 pour faire rayonner la petite Suisse de par le vaste monde. Quel formidable réseau!

Mais, il faut constater que, à côté des festivités prévues de longue date autour du Palais fédéral, la population se sent encore peu concernée par cette journée symbolique. Mais c’est à tort. Certes l’histoire de la Suisse au XIIIe siècle que représente la date du 1er août est importante et doit le rester, mais l’histoire récente et la création des mécanismes qui fondent la Suisse moderne l’est tout autant.

En ce jour, Alain Berset a rappelé devant l’Assemblée fédérale que la Suisse avait acquis «cette faculté à intégrer des cercles toujours plus larges de la population dans la culture démocratique (…). C’est un processus d’inclusion qui n’est pas toujours allé de soi, qui a donné lieu à de hautes luttes politiques et qui, d’ailleurs, est toujours en cours».

Il a rappelé aussi que l’État fédéral helvétique est né en 1848, alors que le continent européen était agité par des révolutions et que «les grandes puissances conservatrices menaçaient d’intervenir militairement dans notre pays». À ce moment-là: «La Suisse était synonyme d’espoir pour toutes les forces libérales et révolutionnaires en Europe, qui étaient alors vivement réprimées dans leur propre pays. Mais la Suisse ne s’est pas laissée intimider. Et si un avenir meilleur semblait possible dans toute l’Europe, c’est en Suisse que cet espoir est devenu réalité».

Aujourd’hui, la réalité est différente. La Suisse apparaît repliée sur elle-même, comme un hérisson tétanisé par les phares d’un tracteur. Les forces conservatrices sont à l’intérieur du pays et veulent mener la barque. Heureusement, l’UDC, pour ne pas la nommer, fait beaucoup de bruit, mais ne gouverne pas la Suisse. Elle revendique pourtant être sa seule vraie force politique.

Avec sa Constitution, la Suisse a visé l’équilibre et la dispersion des pouvoirs. Elle a créé un modèle d’État fédéral doté d’instruments démocratiques populaires que sont l’initiative et le référendum. La séparation des pouvoirs, le rôle des partis, ainsi que les trois étages institutionnels que sont les communes, les cantons et la Confédération, confèrent à l’ensemble une grande diversité, mais aussi une grande solidité.

Une proposition est à l’ordre du jour à Berne pour que le 12 septembre devienne un jour férié. En mai dernier, le Conseil national a accepté l’idée grâce au Centre qui a voté avec la gauche. Mais elle doit être avalisée par le Conseil des États le 27 septembre prochain. Cela va être très serré. Mais, avec le 1er janvier et le 1er août, ce serait un troisième jour férié au plan national. Un cadeau que la Suisse pourrait bien offrir à sa population si méritante!