CinémaUn des plus grands magiciens de Hollywood est mort
Douglas Trumbull est décédé à 79 ans. On lui doit, notamment, les effets spéciaux extraordinaires de «2001, l’Odyssée de l’espace», «Rencontre du troisième type» et du premier «Blade Runner».
![Laurent Siebenmann](https://media.lematin.ch/4/image/2024/09/04/dbd8d7ba-3528-4969-9fb1-0f36126cfc03.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=crop&w=400&h=400&rect=0%2C0%2C1091%2C614&fp-x=0.48120989917506873&fp-y=0.3839779005524862&crop=focalpoint&s=258df76b10461d819c8a4f1fd9d421e1)
![Une des scènes les plus célèbres de «Rencontre du troisième type» (1977) réalisée grâce aux effets imaginés par Douglas Trumbull. Une des scènes les plus célèbres de «Rencontre du troisième type» (1977) réalisée grâce aux effets imaginés par Douglas Trumbull.](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/139f11c3-db52-4220-9263-3e2e34b2eb9c.jpeg?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C1280%2C720&fp-x=0.5&fp-y=0.5&s=4353d60b1a4e467a4d3f33d63cb62fa3)
Une des scènes les plus célèbres de «Rencontre du troisième type» (1977) réalisée grâce aux effets imaginés par Douglas Trumbull.
Capture écranMonument du cinéma étasunien, Douglas Trumbull s’en est allé discrètement, le 7 février dernier, à 79 ans. Il se battait depuis quelques mois contre une tumeur au cerveau.
Producteur, réalisateur et spécialiste en effets spéciaux, cet homme hors du commun a marqué Hollywood de son empreinte. Car c’est grâce à Douglas Trumbull que certains films sont entrés dans la légende.
![Douglas Trumbull en 1981, devant un des décors qu’il a créés pour «Blade Runner». Douglas Trumbull en 1981, devant un des décors qu’il a créés pour «Blade Runner».](https://media.lematin.ch/4/image/2023/11/08/fca1a64d-2038-4a75-a193-9f7acfeba3d0.png?auto=format%2Ccompress%2Cenhance&fit=max&w=1200&h=1200&rect=0%2C0%2C670%2C611&fp-x=0.5&fp-y=0.5008183306055647&s=fb5ced3e1037ad610a1a07324e4c8da0)
Douglas Trumbull en 1981, devant un des décors qu’il a créés pour «Blade Runner».
DRFils de Donald Trumbull qui avait imaginé les trucages du «Magicien d’Oz» – le grand écran, déjà – Douglas a été repéré par Stanley Kubrick grâce à divers travaux réalisés en collaboration avec la NASA. Le cinéaste préparait «2001, l’Odyssée de l’espace» et cherchait quelqu’un capable de concrétiser ses visions sur pellicule.
Pour ce film, Douglas Trumbull imaginera d’abord les effets visuels époustouflants simulant l’apesanteur qui permettront certains plans délirants, à une époque, en 1968, où le numérique n’existait quasi pas, où les personnages sembleront s’affranchir de la physique élémentaire.
Il adaptera également le slit-scan, ce procédé photographique qui autorisera la création des plans colorés et psychédéliques accompagnant le voyage de l’astronaute David Bowman (joué par Keir Dullea) à travers l’espace, où se côtoient phénomènes cosmiques et paysages extraterrestres.
Douglas Trumbull ne s’arrêtera pas là. Pour Steven Spielberg, il conçoit en 1977 tout l’univers visuel (et les procédés qui vont avec) pour donner vie aux engins venus d’ailleurs du film «Rencontre du troisième type». Il imagine les OVNI les plus fous, dont le gigantesque vaisseau illuminé à la fin du long-métrage. Ces techniques, Trumbull les utilisera à nouveau pour le premier «Star Trek» au cinéma, en 1979.
C’est en 1981 qu’il signera les effets spéciaux de «Blade Runner». Dans ce film futuriste signé Ridley Scott et porté par Harrison Ford, Douglas Trumbull se surpasse. Il imagine les effets visuels les plus complexes pour immerger les spectateurs dans cette dystopie qui dépeint une Los Angeles enfumée, gigantesque et glauque, dans une ambiance cyberpunk. Ne perdant jamais de vue que le public doit pouvoir croire à cette cité du futur, Trumbull s’attache à créer un gigantisme à taille humaine. Quiconque à vu «Blade Runner» ne peut oublier les survols de la ville, de nuit et sous la pluie, sur fond de musique planante signée Vangelis.
Douglas Trumbull sera d’ailleurs sans pitié avec «Blade Runner 2049» (2017), une suite dont il trouvera les effets numériques intéressants mais finalement trop gigantesques. «À tout permettre, la CGI finit par trop en montrer. Et à casser la magie», dira-t-il.
Génie des effets visuels, Trumbull était aussi un réalisateur à qui l’on doit deux métrages: «Silent Running» (1971), où il a utilisé certains trucages qu’il avait mis au point pour «2001, l’Odyssée de l’espace» mais non incorporés dans le film de Kubrick. Et «Brainstorm», où des scientifiques mettent au point un procédé permettant d’enregistrer tout ce que voit et ressent un être humain.
Pour ce long-métrage qui sera le dernier de Natalie Wood, Douglas Trumbull met au point une nouvelle technique, le showscan, qui devait améliorer la netteté et la luminosité de l’image afin d’en augmenter le sentiment de réalité et de profondeur. Si malheureusement, ce procédé ne pourra finalement pas être utilisé dans «Brainstorm», il le sera dans des animations du parc d’attractions Universal Studios, à Los Angeles, pour lequel Trumbull a créé l’animation autour du film «Back To The Future», par exemple. On lui doit aussi «Star Tours», à Disneyland.
Il va sans dire que Douglas Trumbull a fréquemment été nommé aux Oscars (cinq fois). Il a finalement reçu une statuette pour l’ensemble de sa carrière.