Football – Brian Beyer: «Vu d’où je pars, ce n’est que du bonus»

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FootballBrian Beyer: «Vu d’où je pars, ce n’est que du bonus»

Recruté en janvier par Yverdon, l’attaquant français de 25 ans découvre le monde professionnel. Déjà titulaire et décisif à plusieurs reprises, il raconte son rêve éveillé.

Brice Cheneval
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Brice Cheneval
Brian Beyer (à gauche), ici au duel avec Elton Monteiro du Lausanne-Sport le 8 février, s’est rapidement adapté à la Challenge League.

Brian Beyer (à gauche), ici au duel avec Elton Monteiro du Lausanne-Sport le 8 février, s’est rapidement adapté à la Challenge League.

Pascal Muller/freshfocus

Le secteur offensif d’Yverdon Sport est décidément un nid à belles histoires, cette saison. Il y avait déjà Koro Koné, en pleine résurrection après une une fin d’aventure compliquée à Servette, et Steve Beleck, le héros de la Coupe. Un troisième nom s’est ajouté à la liste: Brian Beyer. Le Français est l’homme en forme dans le Nord vaudois. Titularisé lors des 5 derniers matches, il totalise 2 buts et 2 passes décisives à son actif. Pas mal pour un joueur arrivé début janvier. D’autant plus remarquable en sachant qu’il a découvert le monde professionnel au même moment.

Jamais, avant cette année, Beyer n’avait évolué à un tel niveau. Il en était même très loin il y a peu. Ses débuts dans la catégorie senior, il les a effectués en 10e division française, en 2015. Deux ans plus tard, il n’avait gravi que deux échelons. Et sa carrière n’a pas subitement décollé en traversant la frontière. Il y a huit mois, il n’évoluait encore qu’en 1re Ligue.

Conscient du caractère atypique de sa trajectoire, Brian Beyer ne cherche pas à masquer son originalité. Mieux, il la revendique.

Brian, que ressentez-vous après vos trois premiers mois à Yverdon?

Je me sens super bien, ce n’est que du plaisir. Je suis tombé dans un super groupe. Joueurs, staff… Partout, il y a de bonnes personnes. J’appréhendais un peu avant de venir et aujourd’hui, j’ai l’impression d’être ici depuis toujours.

Racontez-nous comment s’est concrétisée votre arrivée… 

J’ai commencé la saison avec Bienne en Promotion League. Début septembre, je réalise un gros match à Chiasso, où je marque un but. Marco Degennaro (ndlr: le directeur général d’Yverdon Sport) était en tribune ce jour-là et quelque temps après, il est venu me voir. Il m’a proposé de venir à Yverdon dès janvier, davantage dans l’optique de préparer la saison prochaine, car il y avait déjà beaucoup d’attaquants dans l’effectif à ce moment-là, ou de faire encore six mois à Bienne. Mais je voulais saisir ma chance. Ça ne me faisait pas peur d’arriver en tant que 5e attaquant.

À partir de là, comment en êtes-vous arrivé à vous retrouver titulaire dès fin février?

Je ne savais même pas si j’allais rester dans le groupe car il existait la possibilité que je sois prêté. Et au moment où je suis arrivé, Shkelqim Vladi s’en est allé (ndlr: retour de prêt à Young Boys). C’était le bon timing. Le stage en Turquie (ndlr: du 12 au 22 janvier) s’est bien passé, j’ai pu montrer ce que je valais, et le club a décidé de me garder. Ensuite, j’ai continué à travailler sérieusement à l’entraînement, jusqu’au moment où l’entraîneur (ndlr: Uli Forte) a décidé de m’aligner pour la première fois contre Thoune, le 25 février. J’ai fait une bonne performance, ponctuée d’un but, et il faut croire que je suis parvenu à confirmer derrière.

«J’ai l’impression d’être ici depuis toujours»

Brian Beyer, attaquant d’Yverdon Sport

Qu’est-ce qui vous a marqué en arrivant à Yverdon, par rapport à ce que vous avez connu en amateur?

Déjà, je ne connaissais pas les entraînements le matin. Ensuite, les joueurs sont ensemble au quotidien. On se voit plus que nos propres familles, ça crée des liens forts. Honnêtement, je ne m’attendais pas à ce que ce soit si exigeant. Tu es focalisé foot tout le temps. Sur le terrain, ce qui me change beaucoup, c’est l’homogénéité du niveau global. Les coéquipiers autour de moi sont meilleurs, donc je reçois plus de bons ballons. Je suis mieux servi.

Avez-vous eu besoin d’un temps d’adaptation pour hausser le curseur?

Pas tellement. Je n’ai pas eu de soucis là-dessus. Quand tu arrives du monde amateur, tu as faim de réussir. J’étais beaucoup plus concentré, beaucoup plus appliqué et, par conséquent, beaucoup plus performant. J’ai haussé mon niveau inconsciemment. Après, j’apprends énormément de tout ce qui m’entoure.

En Challenge League, vous vous démarquez par votre style très «amateur», brut. À la fois spontané, généreux et sans retenue…

J’ai un profil atypique. En amateur, j’avais l’habitude de faire la différence seul. J’ai conservé cette tendance à prendre des risques et suivre mon instinct. Ça déstabilise les défenseurs adverses parce que je fais des choses auxquelles ils ne s’attendent pas.

«J’étais beaucoup plus concentré, beaucoup plus appliqué et, par conséquent, beaucoup plus performant»

Brian Beyer

Vous semblez parfaitement gérer la pression inhérente au haut niveau…

Je la ressens, mais c’est de la bonne pression. Elle me galvanise. Je ne suis plus crispé, j’ai appris de mes erreurs. En 2018, quand j’évoluais à Belfort en 4e division française, j’avais l’impression de ne pas être à ma place par rapport à mon parcours. Je n’arrivais pas à me libérer, je ne faisais que des passes vers l’arrière. L’entraîneur, pas convaincu, m’a très vite écarté. Cette expérience m’a servi. À partir de là, je me suis dit que je devais jouer mon foot sans me soucier de ce qu’on pensait de moi.

Quels rapports entretenez-vous avec votre entraîneur?

Il m’a toujours mis en confiance et j’essaye de la lui rendre à chaque match. J’apprends beaucoup à son contact, notamment à canaliser mon énergie. On travaille sur les zones. L’imprévisibilité c’est bien, mais je ne peux pas non plus faire n’importe quoi.

Avec un peu de recul, quel regard portez-vous sur l’évolution de votre carrière?

Vu d’où je pars, ce n’est que du bonus, ce que je suis en train de vivre. À aucun moment je n’avais l’espoir de devenir footballeur professionnel. Comme je ne suis pas passé par un centre de formation, je ne me suis jamais dit que je laissais passer ma chance. Au contraire, je vis chaque étape avec fierté. J’aurais pu rester dans des clubs où j’étais titulaire, dans une bonne situation, mais je ne me suis jamais contenté de mon confort. J’ai toujours cherché à évoluer. Et si je continue comme ça, je peux encore grimper plus haut. Je dois aussi dire que j’ai eu la chance, en Suisse, de tomber sur les bonnes personnes pour lesquelles je suis extrêmement reconnaissant. Comme Anthony Sirufo (ndlr: ex-entraîneur de Bienne, limogé ce lundi).

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