Etats-Unis: Au coeur du Midwest, l’Illinois, «sanctuaire» pour l’avortement

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États-UnisAu cœur du Midwest, l’Illinois, «sanctuaire» pour l’avortement

Le Missouri s’est vanté d’être le premier État américain à bannir l’avortement. Du coup, des habitantes de Saint-Louis conduisent des femmes en banlieue, de l’autre côté du Mississippi, pour une IVG en Illinois.

Assise sur son canapé, une tasse «Détruisons le patriarcat» à la main, Lori Lamprich évoque son avortement, il y a 15 ans: à l’époque, l’intervention n’était pas aussi difficile qu’aujourd’hui dans son Missouri natal, État conservateur du Midwest américain.

C’est ce qui a poussé cette Américaine de 39 ans à rejoindre, en 2020, la Midwest Access Coalition (MAC), une association qui aide des femmes désirant pratiquer une interruption volontaire de grossesse (IVG). «Tout ce que je peux faire pour rendre le processus plus facile, je veux le faire», s’exclame-t-elle auprès de l’AFP.

«Il va y avoir de plus en plus de monde, toutes les personnes qui se rendaient au Planned Parenthood à Saint-Louis vont devoir être emmenées en Illinois»

Lori Lamprich, qui conduit des femmes dans l’Illinois pour une IVG

Chez elle, à Saint-Louis, dans le Missouri, à la frontière naturelle du fleuve Mississippi avec l’État voisin de l’Illinois, se faire avorter relevait de la gageure. C’est désormais illégal. Le Planned Parenthood (planning familial), dernière clinique à pratiquer l’IVG, a dû cesser ses opérations le 23 juin, quand cet État républicain est devenu le premier, aux États-Unis, à interdire l’avortement après la décision choc, une heure plus tôt, de la Cour suprême, à Washington, annulant l’arrêt historique «Roe versus Wade», qui garantissait le droit fédéral à l’avortement dans tout le pays depuis 1973.

Les États américains fédérés vont pouvoir dorénavant l’autoriser ou l’interdire. Vingt-six devraient mettre fin à l’IVG, selon le Guttmacher Institute, et une dizaine ont déjà sauté le pas.

Vingt minutes de voiture

Depuis Saint-Louis, 300’000 habitants, Lori Lamprich n’a qu’à traverser en voiture le pont sur le Mississippi, et un panneau souhaite «la bienvenue en Illinois». L’avortement y est toujours légal. «En 20 minutes, on entre dans un monde complètement différent», se désole la bénévole.

Plusieurs fois par mois, Lori Lamprich aide des femmes à se rendre en Illinois. Et elle va être de plus en plus sollicitée. «Il va y avoir de plus en plus de monde, toutes les personnes qui se rendaient au Planned Parenthood à Saint-Louis vont devoir être emmenées en Illinois», explique-t-elle. Elle les conduit au centre de soins Hope Clinic for Women, à Granite City. À l’entrée, des bénévoles accompagnent des patientes cachées derrière des parapluies aux couleurs arc-en-ciel.

Les antiavortements mettent la pression

John, militant contre l’avortement, brandit une pancarte avec une photo de fœtus ensanglanté. «Donnez-vous une chance d’aimer votre enfant et de le tenir dans vos bras», crie-t-il aux femmes. Un peu plus loin, une dizaine de fidèles catholiques prient. Pour leur prêtre, qui tient à rester anonyme, la décision de la Cour suprême ne met pas un terme à son combat. «Ce n’est pas vraiment une grande victoire. L’avortement est toujours possible, il suffit de prendre sa voiture», souffle-t-il.

L’Illinois, État ancré dans le camp démocrate, est entouré d’États républicains qui ont interdit ou s’apprêtent à interdire l’avortement. À des centaines de kilomètres à la ronde, ce sera donc le seul État proposant des IVG. En 2020, sur les 46’000 patientes qui y ont eu une IVG, 20% venaient d’un autre État. Selon Planned Parenthood, de 20’000 à 30’000 femmes de plus pourraient s’y rendre chaque année. Le gouverneur démocrate, J.B. Pritzker, a condamné la décision «abjecte» des «extrémistes» de la Cour suprême et promis de faire de l’Illinois un «sanctuaire» pour l’avortement.

«Ça ne va pas m’arrêter!»

Entre 500 et 2500 dollars, sans les frais de déplacement

(AFP)

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