CoronavirusL’ombre du variant Delta s’étend sur l’économie américaine
Aux États-Unis, le variant Delta progresse, freinant indirectement la consommation. Pourtant, des experts estiment que la croissance devrait «rester rapide».
Maintenant que l’effet initial de la vaccination s’est estompé et que les aides versées aux Américains par le gouvernement se tarissent, le variant Delta jette une ombre de plus en plus forte sur la reprise économique aux États-Unis. Les Américains ont consommé beaucoup moins que prévu en juillet. Leurs dépenses ont reculé de 1,1% par rapport à juin, selon les chiffres publiés mardi par le Département du commerce.
Cette donnée est importante pour évaluer la santé de la première économie du monde, car les dépenses de consommation y représentent les trois quarts du PIB et sont la locomotive de la croissance. «Les gens ont beaucoup mangé au restaurant et acheté des appareils électroniques et électroménagers, mais c’est tout», résume l’économiste Joel Naroff.
Les stations-services s’en sortent
Certes, la production automobile, toujours fortement ralentie à cause des pénuries de semi-conducteurs, qui font plonger les ventes de voitures neuves, a lourdement pesé. Mais les achats de vêtements, ainsi que de matériel de construction et de jardinage sont également à la baisse. En revanche les stations-services s’en sortent bien, mais c’est grâce à la hausse du prix du plein depuis des mois.
L’économie avait fortement rebondi au printemps, lorsque la campagne de vaccination avait permis de renouer sans trop de scrupules avec les restaurants et bars en intérieur, les voyages en avion, les vacances à l’hôtel.
Ces dépenses avaient été soutenues par les chèques du gouvernement versés en mars et en avril, et par les allocations chômage encore généreuses accordées à des millions de sans-emploi, et prolongées. Mais celles-ci sont progressivement supprimées. C’est déjà le cas dans la moitié des États, avant l’ensemble du pays, début septembre.
Conséquences plus fortes en août
Et c’est désormais le variant Delta qui menace de ralentir la reprise, et pourrait faire passer l’économie américaine «d’une croissance très rapide à une croissance juste rapide», a déclaré Jason Furman, ancien conseiller économique du président Barack Obama et professeur à Harvard. «Je pense que cela affectera l’économie, mais pas au point où la croissance sera de nouveau négative ou perdra de nouveau des emplois.»
Le variant Delta «a commencé à affecter les restaurants et le transport aérien fin juillet», selon l’économiste Ian Shepherdson, de Pantheon Macroeconomics. Et il anticipe des conséquences encore plus fortes en août, tablant désormais sur une hausse de 3% des dépenses de consommation au troisième trimestre, contre 6% anticipés auparavant.
Confiance sapée
La résurgence du virus pourrait empêcher les écoles de rouvrir, ralentir le retour au bureau, voire contraindre restaurants et commerces à diminuer de nouveau leur activité. «L’économie ralentit-elle? Oui. Est-ce une surprise? Non. Y a-t-il lieu de s’inquiéter? Pas encore. Le gros problème auquel est confrontée l’économie, encore une fois, c’est le virus. Cela sape la confiance des consommateurs», souligne Joel Naroff.
Ceux-ci avaient en effet cru, au printemps, à la fin proche de la pandémie. Par conséquent, leur confiance a chuté début août, tombant même à son niveau le plus bas depuis près de dix ans, selon l’indice mesuré par l’Université du Michigan.
Rythme ralenti par la Fed?
Le géant de la distribution Walmart, qui a dévoilé, mardi, des résultats trimestriels meilleurs que prévu et a même relevé ses prévisions de croissance pour 2021, a cependant indiqué surveiller la montée en puissance du variant Delta.
Fin juillet, le groupe, numéro un du secteur aux États-Unis, avait annoncé la réimposition du masque dans les zones où le coronavirus est virulent, et a par ailleurs obligé les employés de son siège à se vacciner avant le 4 octobre. «Fait intéressant, ces chiffres négatifs arrivent au moment même où la Fed envisage d’annoncer son intention de réduire ses achats d’actifs», relève encore Joel Naroff.
La Banque centrale américaine pourrait en effet, dès septembre, faire part du rythme auquel elle envisage de ralentir, progressivement, son soutien à l’économie.