CommentaireÉnergie nucléaire: c’est reparti pour un tour!
Relancer le nucléaire en Suisse? Pourquoi pas. Mais qui voudra une nouvelle centrale près de chez lui?
- par
- Eric Felley
Ce dimanche, la presse dominicale a annoncé qu’un comité de droite lance cette semaine la récolte des signatures pour une initiative intitulée: «De l’électricité pour tous en tout temps. Stop au black-out». Alors que d’éventuelles pénuries se profilent pour cet hiver, le moment est tout trouvé pour descendre dans la rue et obtenir des paraphes. Qui s’opposerait à ce que tout le monde ait de l’électricité en tout temps? C’est d’ailleurs le cas depuis de nombreuses décennies.
En 2067?
En réalité, cette initiative veut réhabiliter l’énergie nucléaire dans le mix énergétique. Elle ne va pas résoudre les problèmes actuels. Car il faut en moyenne quatre ans pour qu’une initiative passe devant le peuple. Ensuite, en cas de oui, il faudrait des années pour faire aboutir un projet qui soulèverait quantité d’oppositions. Dans la presse du dimanche, Roger Nordmann estime qu’au mieux, il pourrait y avoir une centrale en 2067. Les initiants sont plus optimistes et articulent un horizon de huit à quinze ans.
10 ans en arrière
Avec le lancement de cette initiative, on a l’impression de revenir 10 ans en arrière. C’est en 2011, après la catastrophe de Fukushima, que le conseiller national Roberto Schmidt avait déposé à Berne une motion intitulée «Sortir du nucléaire». Le Valaisan et les élus du PDC s’étaient alliés à la gauche pour la faire passer. L’UDC était contre et le PLR divisé. Six ans plus tard, en mai 2017, le peuple suisse confirmait dans les urnes la volonté du Parlement et de Doris Leuthard de sortir progressivement du nucléaire, le temps d’utiliser les centrales existantes jusqu’à leur terme.
On prend les mêmes…
Dimanche, à l’annonce de cette initiative, on retrouve les mêmes camps, les mêmes arguments et certains mêmes acteurs. Ainsi Bruno Pellaud, l’ancien président du Forum nucléaire suisse, a repris du service pour défendre sa cause avec nostalgie: «Renoncer à l’atome à l’avenir serait une erreur» confirme-t-il au «Matin Dimanche». La scène politique suisse va reprendre le débat, là où elle l’avait laissé lors de la campagne de 2017, où le peuple avait accepté par 58,2% la Stratégie énergétique 2050.
Ce fut une décision assez claire. Les perdants d’alors (en particulier l’UDC et une partie du PLR) remettent aujourd’hui le couvert dans un contexte qu’ils estiment différent, où ils peuvent jouer sur la peur des gens de manquer de courant pour leur téléphone... Mais une chose n’a pas changé: lorsqu’il faudra trouver un endroit pour implanter dans la petite Suisse une nouvelle centrale, personne n’en voudra près de chez soi. Même chose pour les déchets.