CEDHL’Italie encore condamnée face à des violences conjugales
Une avocate italienne avait déposé plainte à 12 reprises contre son ancien conjoint entre 2007 et 2013. La Cour européenne des droits de l’Homme épingle la lenteur de la justice italienne.
La Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) a condamné une nouvelle fois jeudi l’Italie pour n’avoir pas agi assez rapidement afin de protéger une femme des violences domestiques commises par son ex-mari, malgré plusieurs plaintes.
«Les autorités italiennes ne peuvent passer pour avoir agi avec une promptitude suffisante et avec une diligence raisonnable» pour juger l’ex-mari accusé d’agression et de harcèlement envers la plaignante, a souligné la CEDH, selon laquelle «le résultat de cette défaillance est que» ce dernier «a joui d’une impunité presque totale».
Douze plaintes déposées
La requérante, une avocate italienne née en 1962, avait déposé plainte à 12 reprises contre son ancien conjoint entre 2007 et 2013. Elle avait aussi déposé une première plainte en 2004 pour agression, alors que le couple était toujours ensemble. Selon la requérante, son ancien mari a ensuite été renvoyé trois fois devant le tribunal, mais «plusieurs procédures se sont éteintes par le jeu de la prescription à cause de leur durée», indique la Cour.
Une quatrième procédure pour harcèlement commis entre le 4 et le 20 novembre 2013 est toujours en cours, note la CEDH. Cette dernière a estimé que les faits avaient été jugés trop tardivement, pour certains dix ans après, et que Rome avait mené «les poursuites pénales avec une passivité judiciaire incompatible» avec le cadre juridique italien.
«Manqué à leur devoir»
Les sept juges du bras judiciaire du Conseil de l’Europe ont aussi estimé qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’Homme (interdiction des traitements inhumains ou dégradants) pour la période allant de janvier 2007 à octobre 2008. Ils ont estimé que les autorités locales avaient «manqué à leur devoir d’effectuer une évaluation immédiate et proactive du risque de récidive» en ne prenant aucune mesure à l’encontre de l’ex-mari entre janvier 2007 et octobre 2008.
La requérante avait pourtant «averti à plusieurs reprises de la violence» de ce dernier: elle a expliqué que les autorités n’avaient «pas empêché la commission d’autres violences domestiques». La Cour a toutefois jugé qu’il n’y avait pas eu violation de l’article 3 entre octobre 2008 et 2019, la police italienne ayant cette fois-ci mené une enquête, demandé une mesure de protection et «correctement» pris en compte «les risques de violence récurrente». Rome, déjà condamné en juin dernier dans un dossier similaire, devra verser 10’000 euros (quelque 9907 francs) à la requérante pour «dommage moral».