FootballCommentaire: un nouveau fiasco pour une décennie d’échecs
Malgré les milliards investis par les Qataris depuis 2012, la Ligue des champions se refuse toujours au club parisien. Tout sauf une surprise.
Ce printemps, le Paris SG fêtera le dixième titre de champion de France de son histoire. Le huitième en dix ans pour Qatar Sports Investments. Un record qui ne suscitera pourtant aucune joie ni fierté particulières. Ni chez son richissime propriétaire, ni au sein du groupe, ni même chez ses supporters. Il faudra en effet beaucoup de temps au club parisien et à tous ceux qui l’aiment pour digérer l’énième affront subi mercredi sur le terrain.
Tomber contre le Real Madrid n’a rien d’infamant, mais cette nouvelle élimination est de celles qui peuvent marquer la fin d’une aventure. Ou, il faut l’espérer pour les Parisiens, la fin d’une époque.
Plutôt que s’en prendre une nouvelle fois à l’arbitrage – l’habituelle excuse des faibles –, les décideurs parisiens devraient plutôt commencer par bien se regarder dans le miroir et reconnaître l’échec flagrant d’une politique «sportive» davantage axée sur les paillettes que sur l’essentiel.
Avec les milliards investis depuis dix ans dans le seul but de gagner la Ligue des champions, le PSG s’est toujours plus entêté à monter une équipe marketing plutôt que de patiemment construire une vraie équipe de football. Un échec dont Neymar est le parfait reflet. À son arrivée à Paris, en 2017, le Brésilien avait devant lui la perspective grisante de remporter la première Ligue des champions de l’histoire du club et détrôner du toit du monde le duo Messi-Ronaldo. Or, depuis bientôt cinq ans, le capitaine de la Seleção ne fait que régresser pour devenir aujourd’hui un attaquant presque ordinaire.
Un départ au Real sans contrepartie
Comme la plupart de ses coéquipiers, Neymar n’a aucun respect pour un club qui n’en mérite peut-être pas. Au lieu de sanctionner ses caprices de starlette, le PSG préfère constamment lui trouver de bonnes excuses. Comment, dans ces conditions, exiger un professionnalisme exemplaire de sa part et de celles de ses coéquipiers, composante essentielle pour avoir du succès sur le terrain?
Kylian Mbappé le sait mieux que personne. Raison pour laquelle celui qui est actuellement le meilleur joueur du monde préférera rejoindre le Real Madrid l’été prochain. Sans que le PSG ne récupère le moindre centime des quelque 150 millions versés à Monaco en 2017 (30 millions des 180 annoncés étaient liés à une prolongation de son contrat avec le PSG). Ce qui démontre une fois de plus que l’argent n’a aucune valeur pour des Qataris, qui avaient refusé plus de 200 millions l’été dernier pour céder leur joueur emblématique, certains qu’il allait non seulement assouvir leur obsession de gagner la Ligue des champions cette année, mais peut-être aussi finir par céder devant une énième proposition de prolongation de contrat – dont la dernière est supérieure à une bonne soixantaine de millions d’euros annuels nets – d’ici au 30 juin.
Pour que ce plan réussisse, le PSG a cru bon ajouter Ramos, Hakimi, Wijnaldum, Donnaruma et, surtout, Lionel Messi au duo Mbappé-Neymar. Un septuple Ballon d’or, éjecté du Barça, qui s’est vite rendu compte dans quel monde, si différent de celui dans lequel il avait grandi, il avait atterri. Or, pour être compétitif, un joueur, si talentueux soit-il, doit d’abord être heureux là où il joue. Un détail auquel personne n’avait pensé du côté du Parc des Princes. Ou alors qu’une pluie d’euros suffirait à régler le problème.
Le plus retentissant de l’histoire du club
Ce fiasco, qui est certainement le plus retentissant de l’histoire du club même si la concurrence est relevée ces dernières années, ne changera probablement rien dans le fond. Pour son plus grand soulagement, Maurizio Pocchettino sera désigné comme premier responsable de ce désastre et sera viré en fin de saison. Comme avant lui Laurent Blanc, Unaï Emeri et Thomas Tuchel, tous d’excellents coachs qui ont prouvé, à l’exception du premier, en connaissant beaucoup de succès sur d’autres bancs, qu’il était tout simplement impossible de gérer un groupe de stars gâtées par le Qatar. Quant à Carlo Ancelotti, le bourreau, avec Karim Benzema, des Parisiens mercredi, il faut lui donner l’immense crédit de l’avoir compris avant qu’on ne lui demande de prendre la porte.
Le départ de Pocchettino sera probablement accompagné par celui de Leonardo, cet été. De retour à Paris en 2019 après une première expérience interrompue par une agression envers un arbitre français, l’arrogant directeur technique parisien symbolise lui aussi cette cascade d’échecs successifs.
Sans Mbappé et, peut-être, avec un Messi désireux de retourner le plus vite possible à Barcelone, le PSG aura beaucoup de mal à poursuivre sa politique de stars. D’autant plus que le principal objectif sportif du club, le Norvégien Erling Haaland, ne semble pas prêt du tout à céder aux sirènes qatariennes. Comme toute la forte majorité des grands joueurs actuels, il préfère renoncer à quelques millions supplémentaires pour gagner les titres les plus prestigieux. Et tous savent bien, désormais, que Paris n’est pas la bonne adresse pour cela.
Il faut espérer pour le PSG que cette élimination marque donc la fin d’une époque et que, dès l’été prochain, le futur directeur sportif et le futur entraîneur auront un peu moins de moyens et davantage de liberté pour construire une vraie équipe autour des valeurs sûres que restent, malgré leurs errements contre le Real, Donnaruma, Marquinhos, Hakimi, Verratti et quelques autres. Et qui sait si, forts de cette nouvelle philosophie, les Parisiens n’obtiendront pas le graal tant espéré. Un défi qui mérite d’être tenté et ne pourra pas plus décevoir que la politique actuelle.