Crash du Rio-Paris: le représentant d’Air France défend la formation des pilotes

Publié

Crash du Rio-ParisLe représentant d’Air France défend la formation des pilotes

Après un mois d’audience, le tribunal a commencé à questionner mercredi Pascal Weil, ancien chef pilote et instructeur, sur la formation au sein de l’entreprise avant la catastrophe.

La compagnie aérienne est jugée depuis le 10 octobre devant le Tribunal correctionnel de Paris avec Airbus pour homicides involontaires.

La compagnie aérienne est jugée depuis le 10 octobre devant le Tribunal correctionnel de Paris avec Airbus pour homicides involontaires.

AFP

«Il nous semblait que les barrières mises en place étaient suffisantes»: le représentant d’Air France a soutenu mercredi à la barre que la formation et l’information des pilotes du Rio-Paris, qui s’est crashé le 1er juin 2009, n’étaient pas lacunaires.

La compagnie aérienne est jugée depuis le 10 octobre devant le Tribunal correctionnel de Paris avec Airbus pour homicides involontaires, plus de treize ans après l’accident du vol AF447 qui a tué 216 passagers et 12 membres d’équipage. Cette nuit-là, l’A330 traversait le Front intertropical (FIT), une zone météorologique difficile autour de l’équateur, quand trois sondes situées à l’extérieur de l’appareil, les sondes Pitot, ont givré, entraînant la perte des indications de vitesse.

Dans le cockpit, cette panne a provoqué une déconnexion du pilote automatique, un basculement en mode de pilotage dégradé et fait retentir de nombreuses alarmes. Déstabilisés, les pilotes ont adopté une trajectoire ascendante avant de perdre le contrôle de l’appareil.

Air France est soupçonnée de ne pas avoir mis en place une formation adaptée et de ne pas avoir assez informé ses équipages de cette panne et de ses conséquences, alors que des incidents similaires s’étaient multipliés les mois précédents. Après un mois d’audience, le tribunal a commencé à questionner mercredi après-midi son représentant, Pascal Weil, ancien chef pilote et instructeur, sur l’organisation de la formation au sein de l’entreprise avant la catastrophe.

Procédure «inadaptée»

La présidente Sylvie Daunis aborde la procédure alors enseignée en cas de givrage des sondes Pitot. En 2008-2009, Air France avait décidé de faire un «rappel» de cette procédure, mais elle n’était alors étudiée qu’en basse altitude. Or, les incidents dans les mois précédents s’étaient produits en haute altitude, comme l’était l’AF447 au moment de la panne, ce qui a fait dire au premier collège d’experts judiciaires que la procédure était «inadaptée».

«Pourquoi en 2008 ne pas avoir modifié le scénario en constatant que les incidents étaient surtout en croisière?» demande la présidente. «Les formations cherchent à armer les pilotes d’une méthode robuste» mais «l’entraînement ne peut pas épuiser le réel», soutient M. Weil. «On ne peut pas couvrir exhaustivement toutes les situations que va rencontrer un équipage. On fait des choix, qui sont des choix forts, par rapport à des pannes typiques».

L’un des incidents les plus graves a eu lieu lors d’un vol reliant Paris à Antananarivo le 16 août 2008: le pilote avait émis un «Mayday» (appel de détresse). Une situation «pas anodine», mais «maîtrisée», selon le représentant d’Air France. À l’époque, dans l’analyse des rapports d’incidents faite par la compagnie, «les équipages n’avaient pas donné de signe avant-coureur de perte de contrôle de l’appareil», soutient-il.

«Il nous semblait que les barrières mises en place à l’époque étaient opérantes», résume M. Weil, en soulignant que la compagnie avait, dans le même temps, interrogé Airbus sur le sujet, en «augmentant la pression» de ses questions au fil des mois.

Note «tardive»

La présidente aborde ensuite «l’information» des pilotes, en particulier une note de sécurité sur la panne, diffusée le 6 novembre 2008 dans les casiers des pilotes. Cette note de l’Officier de sécurité des vols (OSV) a été jugée «tardive» et «inefficace» par les premiers experts, en particulier par rapport à celles diffusées à la même période par les compagnies Air Caraïbes et XL Airways.

La note fait suite à une réunion avec Airbus, admet M. Weil, mais les pilotes étaient déjà «informés» de certains incidents via la revue interne «Survol». Les notes des autres compagnies «sont faites à la demande expresse de la Direction de l’aviation civile du Nord», dont ne dépendait pas Air France, ajoute-t-il.

Pourquoi la note ne mentionnait-elle pas la procédure à appliquer? L’OSV ne souhaitait pas nommer une procédure qui pouvait «changer de nom quelques semaines après», affirme le représentant de la compagnie. «Le métier de pilote demande d’exercer son sens critique», poursuit-il. «Le risque d’une impulsion un peu trop impérieuse (…) c’est de shunter complètement ce processus qu’on essaie de développer avec les entraînements».

Le représentant d’Airbus doit être interrogé lundi et mardi.

(AFP)

Ton opinion