Suite du Covid-19La Suisse alémanique paralysée par des «objecteurs d’État»
Selon un reportage de la SRF, des milliers de Suisses alémaniques libertaires défient aujourd’hui l’État en refusant de s’acquitter des impôts par exemple.
- par
- Eric Felley
Selon une enquête de la SRF, reprise ce vendredi par la RTS, il serait une dizaine de milliers en Suisse alémanique à revendiquer la posture d’«objecteur d’État» (Staatsverweigerer). Cela n’a rien à voir avec celle des «objecteurs de conscience», qui refusent de faire l’armée et qui sont plutôt de gauche. Au contraire, ce sont plutôt des personnes de droite issues en partie de la contestation contre les mesures sanitaires de la loi Covid-19.
«Attaquer l’État»
Selon l’enquête de la SRF, ces personnes ont choisi d’adopter une attitude de défiance systématique envers l’État. Celle-ci se traduit par le refus de payer des impôts et un comportement résolument antiétatique. Le phénomène est pris au sérieux. La SRF a interrogé Dirk Baier, directeur de l’Institut pour la délinquance et la prévention de la criminalité à la Haute école zurichoise des sciences appliquées. Celui-ci y voit une volonté «d’attaquer l’État, de le paralyser». Il a constaté qu’un des narratifs utilisés «est de dire que l’État est une entreprise. Alors on s’oppose activement à lui, et on justifie tout cela de manière conspirationniste en disant qu’il est trop puissant, que certains veulent s’enrichir sur le dos de la collectivité».
Pression sur les offices de poursuites
Cet activisme provoque une forte augmentation de la charge de travail pour les fonctionnaires, en particulier dans les offices de poursuites. Le président de l’Association des offices du canton de Zurich, Thomas Winkler, observe la volonté d’entraver leur travail par un comportement quérulent et chronophage: «Jusqu’à ce qu’un acte administratif puisse être exécuté, on se retrouve à devoir rajouter de très nombreuses étapes supplémentaires».
Certes, les fonctionnaires des offices sont habitués à des situations tendues, mais les objecteurs d’État «utilisent des méthodes qui leur étaient jusqu’ici inconnues. (…) La principale différence par rapport à ce qu’on connaissait déjà, c’est que les objecteurs d’État sont parfaitement connectés entre eux et savent exactement comment rendre la vie des autorités la plus difficile possible».
Moins visible en Suisse romande
Encore une fois, c’est la période du Covid-19, où de très fortes résistances ont été observées en Suisse alémanique contre la «dictature sanitaire», qui a favorisé la mise en réseau de ces jusqu’au-boutistes libertaires. L’enquête de la SRF n’a pas porté sur la Suisse romande. Selon la RTS, le phénomène y est moins visible, même si «certains offices des poursuites vaudois ont cependant déjà été confrontés à de telles pratiques».