ArrêtLa Suisse condamnée pour l’internement irrégulier d’un meurtrier
La CEDH a estimé mardi que la Suisse avait commis plusieurs violations de la Convention européenne des droits de l’homme dans l’internement en 2013 d’un meurtrier.

Vue sur l’immeuble de la CEDH à Strasbourg.
AFPLa Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a condamné mardi la Suisse pour avoir interné de façon irrégulière, après une peine de prison pour deux homicides, un homme dont la maladie mentale était jugée incurable. Le requérant, âgé de 61 ans, avait été condamné dans les années 90 à 20 ans de prison pour deux homicides particulièrement violents, dont celui d’une femme dont il avait démembré le corps, indique la Cour dans son arrêt.
Sa pathologie relevait «d’un trouble de la personnalité difficile à traiter» et il souffrait au moment des faits d’une altération de son discernement, avait alors noté un expert psychiatre. Une fois sa peine purgée, en 2010, il fut placé en détention provisoire, le tribunal ayant demandé son internement en application de nouvelles dispositions pénales.
En 2012, le Tribunal fédéral décida de rouvrir la procédure au vu de certains éléments dont il estimait que le jury d’assises n’avait pas eu connaissance, «notamment le fait qu’aucun traitement ne pouvait guérir» le requérant, poursuit la Cour. L’année suivante, la justice décida de l’interner sans réexaminer les faits, concluant qu’il «risquait fort de commettre à nouveau des infractions violentes» et que le traitement psychiatrique qu’il suivait «avait peu de chances de succès». Il fut alors maintenu dans la même prison que celle où il avait purgé sa peine.
Internement «non régulier»
Pour la CEDH, si le requérant pouvait effectivement être détenu «en tant qu’«aliéné», son internement «ne peut pas passer pour régulier puisqu’il n’a pas été mis en œuvre dans un établissement adapté au traitement des patients souffrant de troubles mentaux».
Cet internement a du reste été décidé «dans le cadre d’une procédure de révision» qui n’a fourni «aucun élément nouveau concernant la nature de l’infraction ou l’étendue de la culpabilité» du requérant, «puni deux fois pour les mêmes faits», poursuit la CEDH, qui a conclu à plusieurs violations de la Convention européenne des droits de l’homme. La Suisse devra verser un total de plus de 48’000 francs au requérant.