NeuchâtelAccident mortel de Boveresse: «Il y a une malédiction sur ce tronçon»
Partis au milieu de la nuit de la fête de Fleurier (NE), deux jeunes de 19 et 21 ans ont perdu la vie à pleine vitesse contre un frêne.
- par
- Vincent Donzé
Désignée comme la plus grande fête populaire du Val-de-Travers, l’Abbaye de Fleurier s’est prolongée jusqu’à lundi soir, comme le veut la tradition. Cette nuit-là, vers 1 h 30 du matin, deux jeunes rentraient au Val-de-Ruz en passant par la route cantonale H10, toute en enfilade. C’est là qu’ils ont perdu la vie au sortir d’une longue courbe à gauche.
«Je passe là sans problème à 120 km/h», dit mercredi un promeneur qui longe l’Areuse, en contrebas de la H10, très fréquentée par des régionaux et des frontaliers. Façon de dire que le conducteur de la VW Golf accidentée roulait vite, très vite, entre Fleurier et Boveresse.
L’accident s’est produit à l’entrée du parking de la piscine des Combes. Les traces indiquent que la Golf d’environ 300 CV a d’abord mordu le talus sur sa droite, en faisant gicler un poteau de signalisation et en projetant une pierre sur le parking. La voiture a filé tout droit en vol plané pour percuter un frêne. «Elle a décollé», dit un proche d’une victime.
Perdu de vue
Mardi déjà, «20 Minuten» identifiait les deux occupants de la Golf: S., 21 ans, et son copain K., 19 ans. L’annonce mortuaire de K. dit qu’il s’en est allé suite à «un regrettable accident», lui qui avait encore sa grand-maman. Les deux amis aimaient la vitesse, mais qu’est-ce qui les a poussés mardi matin à rouler beaucoup trop vite dans une longue courbe à gauche?
La police neuchâteloise a rapporté qu’une patrouille était en train d’observer la circulation lorsqu’elle a aperçu un véhicule roulant à vive allure sur la rue de la place d’Armes, à Fleurier, en direction de Boveresse.
La patrouille a tenté de contrôler le véhicule, mais l’a rapidement perdu de vue à la hauteur du giratoire du pont des Chèvres. Selon le Ministère public, le conducteur de la Golf ignorait qu’il était suivi: ce n’est donc pas pour échapper aux policiers qu’il a roulé trop vite.
À la hauteur de la piscine, la patrouille est passée tout droit sans remarquer la sortie de route, la Golf étant accidentée en contrebas d’un talus, dans un ruisseau. C’est une riveraine qui a signalé l’incendie d’une voiture, visible depuis une zone résidentielle. Les deux occupants éjectés de l’habitacle ont été retrouvés sans vie.
«Il est parti énervé»
Mercredi, il flottait sur le site une vilaine odeur d’huile brûlée. Pourquoi le conducteur a-t-il roulé trop vite, en direction de Fontaines? Par peur de perdre son permis? Ceux qui le connaissent disent qu’il ne conduisait pas quand il avait bu.
Pour les proches des victimes, il s’agit d’abord de déterminer qui conduisait. Seule certitude: le propriétaire de la Golf n’était pas dans un bon jour, lui qui «aime bien les voitures». À une peine de cœur, s’est ajouté un report dans l’obtention d’un certificat fédéral de capacité, comme mécanicien agricole.
La fête prévue n’a pas eu lieu: «Sous le coup de la colère, il est parti énervé», dit un proche. Le propriétaire de la Golf a quitté Fleurier sous le coup de la colère et de la déception, suite à un «problème de cœur de jeunesse», selon un proche.
Des fleurs déposées
À la piscine, ce mercredi, des écoliers sautaient des plongeoirs, tandis que sur le parking, les proches des deux victimes déposaient des fleurs au pied de l’arbre percuté et dans le champ situé en contrebas.
Pour les habitants du Val-de-Travers, la route cantonale reliant Fleurier et Boveresse prend l’allure d’un endroit maudit: «Il y a déjà eu des morts ici», dit quelqu’un. Personne n’a oublié la voiture qui s’est encastrée dans le passage piéton sous la route qui mène à la piscine, avec cinq jeunes dans l’habitacle.
«Tellement d’accidents»
Cette nuit-là déjà, des «jeunes du coin» rentraient de la Fête des vendanges. «Ils ne sont pas mieux les uns que les autres», dit une voix. Ceux qui roulent en Golf forment une sorte de «club rodéo». Mais qui conduisait mardi matin? Celui qui avait le moins bu? C’est ce que pensent les villageois, mais rien n’est moins sûr.
«Il y a une malédiction sur ce tronçon», dit une distillatrice d’absinthe, en évoquant le gibet où les sorcières, les voleurs et les assassins étaient pendus là dès le XIIIe siècle. «Il y a eu tellement d’accidents à cet endroit qu’il est forcément maudit», conclut la productrice d’absinthe.