États-UnisL’accès au vote, un sujet de discorde au Congrès américain
Le Sénat américain doit voter pour débattre ou non du projet de loi «Freedom to Vote»: des mesures sur le droit de vote, le redécoupage électoral et le financement des campagnes.
L’élection présidentielle américaine de 2020 fut celle à la plus forte participation de l’histoire du pays, malgré la pandémie et les efforts de Donald Trump et ses alliés pour saper la confiance du public dans le système électoral.
En dépit de ce nombre de votants inédit, l’élection est largement considérée comme la plus sûre de l’histoire électorale des États-Unis. Pourtant, plusieurs États à travers le pays se sont attelés ces derniers mois à utiliser les allégations infondées de fraudes pour faire passer des lois qui visent, selon leurs détracteurs, à restreindre les droits de vote des minorités. Ces dernières penchent historiquement du côté démocrate.
«Le droit de vote est vraiment une pierre angulaire de notre démocratie, et il est aujourd’hui attaqué», affirme la sénatrice démocrate Patty Murray. «État après État, les mêmes voix de l’extrême droite qui mettent en doute de manière infondée et dangereuse les résultats de la dernière élection travaillent désormais à saper la prochaine en restreignant l’accès aux urnes», ajoute-t-elle.
En Géorgie, dans le sud des États-Unis, les personnes distribuant des boissons et des encas aux électeurs qui attendent de voter peuvent désormais être poursuivies. Au Texas, la promotion du vote par correspondance par les responsables électoraux est à présent bannie. Des lois similaires dans une dizaine d’autres États rendent l’accès au vote plus difficile, selon des associations.
«Ces lois à l’échelle des États ciblent souvent les électeurs historiquement sous-représentés, notamment ceux issus de minorités, de même que les plus pauvres et ceux en situation de handicap», soutient le Center for American Progress.
Début octobre, au moins 19 États avaient ratifié 33 lois restreignant l’accès au vote, selon le Brennon Center for Justice, classé à gauche.
«Freedom to Vote»
Au niveau fédéral, le Sénat doit voter mercredi pour débattre ou non d’un projet de loi intitulé «Freedom to Vote», soit «Liberté de voter», un ensemble de mesures sur le droit de vote, le redécoupage électoral et le financement des campagnes.
Pour les responsables républicains au Congrès, si la dernière élection n’a peut-être pas été volée, de nouvelles lois comme l’obligation de présenter une pièce d’identité avec photo pour voter – une disposition normale dans beaucoup de pays — relèvent du bon sens.
Parmi les mesures proposées par les démocrates, figurent l’enregistrement automatique et possible le jour du vote sur les listes électorales, ou encore la mise en place d’un jour férié pour les jours de vote, qui ont toujours lieu un jour de semaine aux États-Unis.
Réduire l’influence de l’argent
Mais plus fondamentalement, le projet cherche à réduire l’influence de l’argent dans la politique, à mettre fin au redécoupage partisan des circonscriptions et à renforcer les élections face aux ingérences étrangères.
Les démocrates ne possèdent cependant pas les 60 votes nécessaires au Sénat, le responsable républicain Mitch McConnell appelant ses pairs à rejeter «la dernière tentative de mainmise des démocrates sur la manière dont vote chaque Américain à travers le pays».
Les élections sont gérées au niveau local aux États-Unis et les républicains considèrent souvent les directives venant de Washington sur le processus électoral des États comme une ingérence fédérale malvenue. Pour autant, c’est ce que s’efforce de faire Donald Trump depuis plus d’un an.
Impact du «grand mensonge» de Trump
Avant même sa défaite, et sans une once de preuve, le milliardaire s’est lancé dans une croisade pour convaincre des millions d’Américains que l’élection présidentielle de 2020 était frauduleuse.
Faisant pression sur les responsables électoraux de plusieurs États afin qu’ils invalident les résultats après le vote, le républicain a fait la promotion de théories du complot afin d’attiser une colère parmi ses électeurs qui a culminé avec l’assaut sur le Capitole à Washington le 6 janvier.
Joe Biden a été investi comme président, mais le «Big Lie», le «Grand mensonge» de Donald Trump, continue son travail de sape. Pour Fiona Hill, une ancienne conseillère de Donald Trump, tout cela relève d’un «coup d’État au ralenti».
En août, un sondage de YouGov affirmait que deux tiers des républicains pensaient que la dernière élection avait été volée à Donald Trump. «Nos élections sont à la source de la démocratie (…). Malheureusement, le «Grand mensonge» de Donald Trump se répand comme un cancer parmi les républicains», a déploré devant la presse le responsable des démocrates au Sénat Chuck Schumer.