Hockey sur glacePourquoi Kevin Fiala n’est pas un mauvais Suisse
L’attaquant saint-gallois de Minnesota a renoncé à intégrer la sélection helvétique au Championnat du monde. Un choix légitime à la lumière de sa situation contractuelle en NHL.
- par
- Emmanuel Favre
Swiss Ice Hockey l’a brièvement communiqué le dimanche 15 mai: «Kevin Fiala ne viendra pas renforcer l’équipe nationale suisse lors du Championnat du monde en Finlande. Sa situation contractuelle rend une participation aux Mondiaux impossible.»
Que cela signifie-t-il?
Que l’ailier saint-gallois de 25 ans, qui patine pour le Wild du Minnesota dans le championnat de NHL, ne peut pas courir le risque de se blesser avant de conclure une nouvelle entente avec une organisation de la meilleure ligue du monde.
Alors qu’il vient de compléter la saison régulière la plus productive de sa carrière nord-américaine amorcée avec les Predators de Nashville en 2014-2015 (82 matches, 85 points dont 33 buts), le 11e choix overall du repêchage de 2014 n’a plus d’entente contractuelle avec l’organisation basée à St.Paul.
Et ce à un moment où il ambitionne d’apposer sa signature au fond du pacte le plus lucratif de sa vie. Après avoir empoché 5,1 millions de dollars américains en 2021-2022, Fiala, fort de ses dernières statistiques mirobolantes, peut lorgner une entente à long terme d’une valeur de quelque 7 millions de billets verts par campagne.
Selon les termes utilisés en NHL, il deviendra RFA le 1er juillet. RFA pour Restricted Free Agent.
Joueur autonome avec compensation, en français.
Un statut qui indique que Kevin Fiala n’est pas maître de son destin et qu’il doit se préparer à affronter plusieurs scénarios, dont voici les quatre principaux.
1. Le Wild du Minnesota lui soumet une offre qualificative en adéquation avec ses aspirations. Mais cette issue semble davantage tenir du fantasme que de la froide réalité des chiffres. En effet, le directeur général Bill Guerin ne dispose aujourd’hui que d’une marge de 7,3 millions de dollars sur le plafond salarial fixé à 82,5 millions pour compléter son effectif 2022-2023. Et il a sept postes à combler… Guerin a la réputation d’être malin, mais pas encore celle d’être un magicien.
2. Le Wild lui soumet une offre qualificative qui ne correspond pas à ses attentes. Le joueur peut alors recourir à l’arbitrage salarial. Un juge détermine son salaire pour la saison suivante. Une option qui, souvent, altère les relations entre le joueur et son employeur et qui n’est pas garante d’un long concubinage.
3. Coincé par le plafond salarial, le Wild échange Kevin Fiala. Selon plusieurs experts, il s’agit de l’hypothèse la plus probable. En retour, le club du Midwest américain peut espérer recevoir un choix de première ronde au repêchage qui se tiendra les 7 et 8 juillet au Centre Bell de Montréal ainsi qu’un espoir de premier plan dont le salaire d’entrée n’excède pas les 900’000 dollars. Des rumeurs indiquent que les Devils du New Jersey et les Islanders de New York, notamment, considèrent cette option.
4. Une des 31 autres équipes de NHL soumet une offre hostile à Kevin Fiala. Le cas échéant, si le Suisse signait ce document, le Wild disposerait d’une semaine pour égaler l’offre en sachant qu’il ne pourrait pas échanger le joueur dans les douze mois suivants. Si l’offre n’était pas égalée, la compensation serait tributaire du salaire de Fiala. Ce mécanisme est peu utilisé. Mais les Hurricanes de la Caroline se sont servis de cet outil en 2021 pour chiper le joueur de centre finlandais Jesperi Kotkaniemi au Canadien de Montréal.
Face à ce flot d’incertitudes, Kevin Fiala, qui avait porté le chandail à croix blanche au Championnat du monde de 2014, 2015, 2018 et 2019, a donc décliné l’invitation du sélectionneur suisse Patrick Fischer pour les joutes mondiales de 2022. «Il aurait été illogique qu’il se présente en Finlande, indique un agent canadien rompu au business de la NHL. S’il s’était fait les croisés dans ce tournoi, il aurait perdu plusieurs millions de dollars.»