États-UnisWatergate: Il y a 50 ans, des «plombiers» allaient noyer Nixon
La nuit du 16 au 17 juin 1972 marque le début de l’un des scandales politiques les plus retentissants de l’histoire des États-Unis.
Dans la nuit du 16 au 17 juin 1972, cinq hommes sont arrêtés au siège du Parti démocrate, au 6e étage de l’immeuble du Watergate à Washington. Les «faux plombiers», portant des gants chirurgicaux, sont équipés d’appareils photo et de matériel d’écoute.
Le lendemain, le Washington Post fait sa Une sur cette étrange intrusion survenue en pleine campagne de réélection du président républicain Richard Nixon. Deux jeunes journalistes, Bob Woodward et Carl Bernstein, insistent sur la présence de James McCord, membre du Comité pour la réélection du président Nixon, parmi les cinq intrus. L’homme est également un ancien de la CIA.
Pour les reporters, le lien avec la Maison-Blanche est évident. Le 22 juin, Richard Nixon dément toute implication de son administration. Bizarrement, l’affaire intéresse peu l’opinion publique.
«Gorge profonde»
Bientôt, les deux reporters apprennent que deux hommes qui ont travaillé pour Nixon et son conseiller spécial Charles Colson ont guidé les «cambrioleurs» avec des talkies-walkies depuis un hôtel proche du Watergate.
Leur source: «Gorge profonde» («Deep throat»), surnom emprunté à un film pornographique populaire alors. On apprendra en 2005 qu’il s’agit de Mark Felt, directeur-adjoint du FBI. Entre octobre 1972 et novembre 1973, il rencontre Bob Woodward six fois dans un parking près de Washington.
Le 10 octobre 1972, les deux journalistes révèlent un gigantesque scandale d’espionnage et de sabotage politiques menés par la Maison-Blanche pour la réélection de Nixon. Des centaines de milliers de dollars de dons faits à la campagne de Nixon ont été détournés pour financer des opérations de déstabilisation des démocrates.
Malgré la polémique, Richard Nixon est triomphalement réélu le 6 novembre face au démocrate George McGovern.
Les sénateurs démocrates ouvrent une enquête
Le 8 janvier 1973, le procès des «cambrioleurs» du Watergate s’ouvre dans une quasi-indifférence.
Le 7 février, la majorité démocrate du Sénat crée une Commission d’enquête sur la campagne électorale de 1972. Retransmises à la télévision, les audiences passionnent vite les Américains.
Peu après, James McCord reconnaît avoir menti devant le tribunal sous la pression de la Maison-Blanche.
Le 30 avril, le ministre de la Justice Richard Kleindienst et deux conseillers du président – Bob Haldeman, John Ehrlichman – démissionnent. Un troisième conseiller – John W. Dean – est limogé.
Le 25 juin, ce dernier affirme devant la Commission que le président était au courant dès le 15 septembre 1972 des dispositions prises pour étouffer l’affaire du cambriolage. Il affirme aussi que le président était prêt à acheter le silence des cambrioleurs pour près d’un million de dollars. C’est le premier témoin à mettre directement en cause M. Nixon.
Le Bureau Ovale sur écoute
Coup de tonnerre le 16 juillet: un collaborateur de la Maison-Blanche affirme devant la Commission que le Bureau Ovale est truffé de micros. Ce dispositif secret d’écoutes a été installé en 1970 dans un but historique. C’est le début d’un nouveau scandale.
Le 23 juillet, Nixon refuse de transmettre ces enregistrements à la Commission. Acculé par la justice, il finit le 20 octobre par remettre neuf bandes. Mais il manque deux bandes et une conversation entre Nixon et son conseiller Dean du 20 juin 1972, soit trois jours après l’effraction au Watergate, est inaudible.
La démission avant la destitution
Le 9 mai 1974, la Commission judiciaire de la Chambre des représentants commence son enquête sur l’opportunité de destituer le président.
Le 24 juillet, après un an d’âpre bataille, la Cour suprême ordonne au président de remettre la totalité des bandes. Dos au mur, Nixon obtempérera le 5 août.
Le 30 juillet, la Commission retient trois chefs d’inculpation contre lui: obstruction à la justice, abus de pouvoir et refus de se soumettre aux assignations. La procédure de destitution est irrémédiable.
Pour éviter l’affront, Richard Nixon annonce sa démission le 8 août, une première aux États-Unis.
Le 8 septembre, son successeur Gerald Ford le gracie.