Non-consentement des mineursHuit ans de prison pour le viol d’une fille de 11 ans
Cette affaire avait éclaté en avril 2017 et initié un débat sur le non-consentement.
L’affaire avait lancé le débat sur le non-consentement des mineurs: un homme de 33 ans a été condamné vendredi à Pontoise à huit ans de prison pour avoir, en 2017 dans le Val-d’Oise, violé une fille de 11 ans qu’il avait alors jugée «consentante».
«La cour estime que les actes sexuels ont été commis par contrainte morale et par surprise», a déclaré le président de la cour criminelle, composée de cinq juges professionnels, sans jury populaire. Le verdict a été prononcé en public. Mais les trois jours d’audience s’étaient tenus dans un huis clos total. La victime, à «11 ans et 10 mois ne présentait pas la maturité suffisante ni le discernement pour consentir à la relation sexuelle», a argumenté le président de la cour, à l’issue d’un délibéré de plus de trois heures.
Serinte Sangare a «abusé de la vulnérabilité» de la victime «pour parvenir à la satisfaction immédiate de (ses) désirs et (de son) excitation sexuelle» et ne pouvait ignorer l’âge de l’enfant. Malgré son apparence physique, «son âge réel est très rapidement perceptible lorsqu’on échange avec elle», a appuyé le magistrat. Reconnu coupable de viol sur mineur, Serinte Sangare a été condamné à huit ans de prison avec mandat de dépôt, une décision légèrement en-deçà des réquisitions. Il lui est aussi interdit de travailler avec des enfants pendant dix ans.
Comparaissant libre, celui qui n’avait pas effectué de détention provisoire est resté sans réaction lors du verdict. Il devait ensuite être écroué. À l’opposé de la salle, la victime est demeurée stoïque et discrète, entourée de ses parents et de sa psychologue. D’après son avocate, elle est dans un état de dissociation depuis les faits.
«Victoire du droit»
«La famille est soulagée, c’était un parcours très long qui a duré cinq ans et demi pour obtenir une requalification pour viol. Cette affaire a amené un changement de la loi donc c’est également une victoire du droit et de la justice», a réagi auprès de l’AFP Me Carine Durrieu-Diebolt, avocate de la jeune fille désormais âgée de 17 ans et de ses parents. Elle a salué «une décision juste» et un «soulagement pour toutes les victimes enfants à venir». Quatre associations de protection de l’enfance et féministes étaient parties civiles au procès.
«Huit ans… c’est dix qui avaient été requis, c’est très dur à entendre», a déclaré Dylan Slama, avocat de la défense. «Tant que la décision n’est pas définitive, on réfléchit» à un éventuel appel, a-t-il ajouté. Cette affaire «emblématique», selon les associations de protection de l’enfance, avait abouti à la loi d’avril 2021 fixant un seuil de non-consentement à 15 ans. L’accusé a toutefois été jugé selon l’ancienne loi, la loi pénale plus sévère n’étant pas rétroactive.
Le 24 avril 2017, la collégienne est assise dans un parc à proximité de chez elle, à Montmagny (Val-d’Oise). Elle discute avec un homme de 28 ans, qui l’a déjà abordée deux semaines plus tôt. Intérimaire de profession, père d’un enfant de neuf ans, ce dernier l’invite à le suivre dans son immeuble.
Dans une cage d’escalier, à la demande de l’homme, elle lui fait une fellation. Puis dans son appartement, un rapport avec pénétration vaginale a lieu, sans violence. Une fois sortie, elle appelle sa mère et lui dit avoir été violée. La poursuite initiale, pour «atteinte sexuelle», avait suscité l’ire des associations. Une instruction avait finalement été ouverte. Depuis la loi promulguée en avril 2021, un adulte ne peut se prévaloir du consentement sexuel d’un enfant s’il a moins de 15 ans (ou moins de 18 ans en cas d’inceste).