TennisPlus fort que la défaillance et les polémiques, Nadal file en demies
Victime d’un coup de fatigue et de douleurs à l’estomac, Rafael Nadal aurait pu tout perdre contre un Denis Shapovalov très remonté contre l’arbitre (6-3, 6-4, 4-6, 3-6, 6-3).
- par
- Mathieu Aeschmann
Rafael Nadal est passé par tous les états d’âme et physiques sur la route d’une septième qualification en demi-finale de l’Open d’Australie. L’Espagnol a survécu à la colère de Denis Shapovalov (lire ci-contre), sa révolte et, surtout, une terrible défaillance avant de retrouver ses esprits pour l’emporter à la limite des cinq sets (6-3, 6-4, 4-6, 3-6, 6-3). Retour sur un étrange match en trois actes qui soulève pas mal de questions.
Acte un: la leçon. Durant plus de deux sets, l’affaire semblait sans histoire tant «Rafa» maîtrisait son sujet. Une domination qui aura autant reposé sur la qualité intrinsèque de son jeu que sur une option tactique gagnante. Pour ne pas trop s’exposer au tennis explosif du Canadien, Rafael Nadal avait décidé de jouer plus vite que lui. Il frappait très fort, très vite, bien aidé par une première balle très efficace et ce coup droit éternel. Un choix fort, aux antipodes de sa filière d’usure historique, qui lui aura assuré deux bénéfices. Le premier, immédiat, fut de coincer «Shapo» sur le pied arrière et de profiter ainsi de ses lacunes défensives. Le second, conséquence du premier, se matérialisa par le déchet offensif de son adversaire lorsque, enfin, il avait le temps de s’organiser. «Pile, je gagne; face, tu perds.» La définition d’une «master class» tactique.
L’estomac plutôt que le pied
Le deuxième acte s’est invité de manière insidieuse, pile au milieu du troisième set. Au sixième jeu, Rafael Nadal offrit deux balles de break à Denis Shapovalov en commettant autant de doubles fautes. Une étrange faiblesse dont il minimisa d’abord l’impact avant qu’elle ne s’étende à tout son jeu. L’Espagnol ne bougeait plus, ou presque. Il ne glissait plus en bout de course, parvenait plus à se décaler pour tourner autour de son revers (72% de coups droits lors des deux premiers sets, 50% au troisième). Le Canadien ne pouvait qu’en profiter. Et alors que «Rafa» demandait l’aide du physio – il montrait son ventre et cherchait à faire redescendre sa température corporelle – «Shapo» égalisait à deux manches partout en affichant une mainmise évidente à l’échange.
Le troisième acte débuta par une absence. Celle de Rafael Nadal, parti se faire examiner entre le quatrième et le cinquième set (un «examen médical» que le règlement ne limite pas dans la durée) . «J’ai commencé à me sentir très fatigué à la fin du troisième puis j’ai eu des problèmes d’estomac, expliquera le Majorquin au micro de Jim Courier. Le docteur m’a pris la tension, vérifié que tout était OK. Il m’a donné des médicaments pour le ventre. Et heureusement que j’ai bien servi au cinquième set.» En effet. Mais heureusement surtout que Denis Shapovalov se montra assez immature pour s’agacer de cette absence (lire ci-dessous). Résultat: le Canadien croqua des balles de break dans les deux premiers jeux de service de «Rafa» et offrit son engagement comme un junior. À 3-0, Nadal pouvait retrouver un peu d’air et de marge. Elle allait lui suffire pour passer la ligne d’arrivée. «Je ne sais pas comment j’ai gagné, j’ai eu de la chance», souffla-t-il avant de quitter la Rod Laver Arena. Peut-être. Mais d’un autre côté, sans défaillance physique, l’Espagnol aurait déroulé en trois sets.