Procès en France«Il m’a utilisée», clame l’ex-épouse du tueur en série Fourniret
Jugée pour complicité d’enlèvements et meurtres depuis mardi, Monique Olivier a nié tout «pacte criminel» entre elle et son ex-mari Michel Fourniret, surnommé «l’ogre des Ardennes».
«Il m’a utilisée», a affirmé mardi à plusieurs reprises Monique Olivier, évoquant sa relation avec son ex-mari, le tueur en série Michel Fourniret, au premier jour de son procès devant la cour d’assises des Hauts-de-Seine pour complicité dans les enlèvements et meurtres d’Estelle Mouzin, Joanna Parrish et Marie-Angèle Domèce.
«Correspondance d’adolescents»
Pendant de longues heures mardi après-midi, la septuagénaire, cheveux courts et pull blanc, a été interrogée sur son parcours, de son enfance, qu’elle a décrit comme «solitaire», à son incarcération. Sur sa jeunesse puis sa relation avec André Michaut, son premier mari avec qui elle a eu deux enfants, elle répond simplement et concrètement, avec un peu d’assurance. Mais aux questions concernant sa relation avec Michel Fourniret, Monique Olivier, 75 ans, élude, parfois se perd, laisse perdurer des silences. Sur les lettres échangées alors qu’il était en prison pour viols, elle répond, d’un air las, haussant les épaules, que «c’était ridicule», une «correspondance d’adolescents».
Dans cette correspondance commencée en 1987, il lui promettait de s’en prendre à son ex-mari -qu’elle a décrit comme violent et dont elle voulait se venger- si elle lui livrait des jeunes filles vierges. Mais elle nie tout «pacte criminel» entre elle et «l’ogre des Ardennes». Et quand le président Didier Safar lui demande ce qu’il y avait «derrière les promesses» épistolaires, elle répond d’abord par un long silence, avant d’expliquer que c’était «pour lui obéir en tout».
- «Mais concrètement?», insiste M. Safar.
- «Concrètement, je ne sais pas, je n’en sais rien, je n’ai pas de réponse».
«Appât» contre son gré
Sur sa vie conjugale avec Fourniret, de 1987 à 2004, elle explique avoir vécu dans la «peur», sans avoir elle-même subi de violences physiques, mais craignant qu’il lui arrive «quelque chose» à elle et au fils né de leur union, Selim. Elle a aussi affirmé avoir servi «d’appât» contre son gré lors d’enlèvements de jeunes filles, comme Isabelle Laville en 1987, à la sortie de prison de Fourniret. Elle était alors enceinte de son fils Selim. « Il m’a utilisée «, a-t-elle dit plusieurs fois au cours de son interrogatoire. Mais elle décrit aussi le tueur en série comme quelqu’un de «gai, qui aimait plaisanter», «en dehors de «la chose»».
Le président lui rappelle qu’elle a su quitter son premier mari violent. Alors pourquoi pas Fourniret? «Je suis incapable de me débrouiller toute seule», dit-elle en secouant la tête et en tremblant, affirmant qu’elle «ne sait pas pourquoi» elle est «restée aussi longtemps avec lui».
«Elle est quand même moins là»
«Quand il s’agit de dire sa souffrance et ses difficultés, elle est là» mais «quand il s’agit d’évoquer les faits «auxquels elle a participé», «elle est quand même moins là», a commenté Me Didier Seban, qui défend les familles Mouzin et Parrish. «Elle s’exprime un peu plus que les autres fois» où Michel Fourniret était à côté d’elle dans le box, concède Corinne Herrmann, avocate des frère et soeurs de Marie-Angèle Domèce. «On va voir où ça va aller.»
C’est la première fois que l’ex-femme du tueur en série, décédé en 2021, se retrouve seule face à une cour d’assises. Elle encourt cette fois encore la perpétuité. A l’ouverture des débats, elle a exprimé des regrets après la lecture des faits par le président. En 2003, Estelle Mouzin, 9 ans, avait disparu sur le chemin du retour de l’école. Il faudra attendre 2019 pour que Monique Olivier contredise l’alibi fourni par Michel Fourniret, qui avouera quelques mois plus tard sa responsabilité à la juge Sabine Kheris. Elle reconnaîtra sa participation en 2021 dans la séquestration d’Estelle, précisant avoir accompagné son ex-mari près du bois d’Issancourt-et-Rumel (Ardennes) pour enterrer le corps de la fillette, jamais retrouvé.