CroatieL’UE réagit aux enquêtes sur les refoulements de migrants
Plusieurs médias se sont unis pour enquêter sur la pratique illégale dite des «pushbacks». Des «unités spéciales» seraient à la manœuvre d’un vrai «système».
La commissaire européenne Ylva Johansson s’est dite jeudi «extrêmement inquiète» à la suite des informations de presse sur de nouveaux refoulements illégaux de migrants, parfois violents, aux frontières de l’UE, notamment en Grèce et en Croatie, appelant ces pays à enquêter.
Des enquêtes parues mercredi dans plusieurs médias, dont le magazine allemand Spiegel et le quotidien français Libération, s’appuyant notamment sur des enregistrements vidéo, documentent une stratégie de renvoi des migrants orchestrée par des «unités spéciales» de police, soutenues en partie par des fonds de l’UE, en Croatie, Grèce et Roumanie.
Ces refoulements allégués «ternissent vraiment notre réputation en tant qu’Union européenne», a déclaré la responsable suédoise, qui doit rencontrer dans la soirée les ministres grec et croate de l’Intérieur.
Elle s’est aussi inquiétée d’un possible «mauvais usage des fonds européens» alloués à ces États membres, rappelant que l’UE peut suspendre les versements en cas de violations de l’État de droit.
Enquête internationale
Cette enquête, mise en ligne mercredi soir, est le fruit d’une collaboration entre la télévision publique allemande ARD, le quotidien français Libération, des médias croate et serbe et la plateforme d’investigation néerlandaise Ligthouse reports. «Une équipe d’experts est aujourd’hui (jeudi, ndlr) sur le terrain avec pour devoir d’établir ce qui s’est passé, qui a participé (à ces événements) et où ils ont eu lieu», a déclaré jeudi à la presse le ministre de l’Intérieur Davor Bozinovic.
«Certaines de ces informations sont choquantes et je suis extrêmement inquiète», a réagi Ylva Johansson, alors que de telles accusations sont régulières.
«Bien sûr, cela doit faire l’objet d’enquêtes», a-t-elle dit, à la veille d’une réunion à Luxembourg des ministres de l’Intérieur des Vingt-Sept.
«Il semble y avoir une forme d’orchestration de la violence à nos frontières extérieures et il semble y avoir des preuves crédibles d’un mauvais usage des fonds européens», a-t-elle poursuivi, précisant qu’il était du ressort de la Commission de veiller au bon usage de ces fonds.
Vaste enquête
Le Premier ministre croate Andrej Plenkovic a annoncé jeudi avoir immédiatement demandé «une vaste enquête» de terrain pour établir ce qui s’est passé.
La Croatie «respecte les lois et les réglementations internationales», a-t-il dit, ajoutant que «comme n’importe quel pays, nous avons pour mission de protéger nos frontières et d’arrêter les migrations illégales».
Dans un communiqué, le ministre grec des Migrations Notis Mitarachi a «catégoriquement démenti les allégations de refoulements», refusant de «présenter des excuses pour l’engagement continu» de la Grèce à «démanteler les réseaux de trafic humain et à protéger les frontières de l’Europe».
La Grèce dément systématiquement ce type d’allégations.
«Les frontières grecques sont les frontières de l’UE et nous agissons dans le cadre du droit international et européen pour les protéger», a déclaré jeudi M. Mitarachi, jugeant «extrêmement dangereux» les flux de migrants clandestins, exploités par les «passeurs» pour lesquels «l’Europe demeure une cible».