Justice - Suicide assisté: la condamnation de l’ancien vice-président d’Exit annulée

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JusticeSuicide assisté: la condamnation de l’ancien vice-président d’Exit annulée

En procurant du pentobarbital à une femme de 86 ans en bonne santé, le Dr Pierre Beck n’a pas enfreint la loi sur les produits thérapeutiques, a décidé le Tribunal fédéral. Mais peut-être celle sur les stupéfiants. La cause revient devant la justice genevoise.

Eric Felley
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Eric Felley
Pierre Beck a obtenu gain de cause sur la forme, mais peut-être pas sur le fond.

Pierre Beck a obtenu gain de cause sur la forme, mais peut-être pas sur le fond.

Yvain Genevay / LMD

Il y a quatre ans, Pierre Beck, médecin genevois et ancien vice-président d’Exit, avait établi une ordonnance pour fournir du pentobarbital (produit utilisé pour le suicide assisté) à une femme âgée de 86 ans. Celle-ci était en bonne santé et capable de discernement. Elle souhaitait mettre fin à ses jours en même temps que son mari gravement malade. Ils sont tous deux décédés en avril 2017, la femme ayant attesté devant notaire qu’elle ne voulait pas lui survivre. Mais le Tribunal de police du canton de Genève a estimé que le praticien avait fauté. Il devait être condamné pour infraction à la loi fédérale sur les produits thérapeutiques.

En 2019, il a écopé d’une peine pécuniaire de 120 jours-amendes ainsi qu’à une amende de 2400 francs. Le jugement a été confirmé en appel par la Chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice. Selon cette instance, prescrire du pentobarbital à une personne en bonne santé viole les directives de l’Académie suisse des sciences médicales et le devoir de diligence.

Pas un geste thérapeutique

Le Dr Pierre Beck a donc fait recours au Tribunal fédéral, où il a obtenu gain de cause sur la forme, mais peut-être pas sur le fond. Le TF relève que dans le cas présent la prescription de pentobarbital n’est pas intervenue pour répondre à «une volonté suicidaire due à une maladie de nature physique ou psychique». Le TF parle d’un cas de «Bilanzsuizid» concernant une personne en bonne santé: «Dans une telle configuration, la prescription de pentobarbital ne repose sur aucune indication médicale, pas même sous l’angle d’un but thérapeutique au sens large».

Un problème de stupéfiants?

Ainsi, en toute logique, le médecin genevois ne peut pas être condamné pour une violation de la loi sur les produits thérapeutiques. Mais, car il y a un grand mais, le TF renvoie la cause à la justice genevoise, pour qu’elle étudie une autre piste. La prescription de pentobarbital à une personne en bonne santé pourrait être sanctionnée par la loi fédérale sur les stupéfiants. «Il appartiendra à la Cour de justice genevoise d’examiner, en premier lieu, si, sur le plan procédural, une appréciation juridique différente de celle retenue jusqu’ici demeure possible, écrit le TF. Dans l’affirmative, il lui appartiendra de déterminer si la prescription de pentobarbital sans indication médicale est autorisée ou non selon la loi sur les stupéfiants».

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