Formule 1: Ferrari: patron et pilote en désaccord

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Formule 1Ferrari: patron et pilote en désaccord

Bien des fans de Ferrari comptaient sur cette saison 2023 pour voir la Scuderia jouer enfin ce titre mondial qui lui échappe depuis 2007. A Bahrein, le premier Grand Prix a remisé leurs espoirs dans les placards. A moins que….

Luc Domenjoz Sakhir (Bahreïn)
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Luc Domenjoz Sakhir (Bahreïn)

Fred Vasseur garde le cap…

C’était sa première conférence de presse d’après-course en tenue rouge. Chez Sauber, ces dernières années, il suffisait de rôder autour de l’hospitalité de l’écurie, après les courses, pour finir par croiser le patron et lui soutirer quelques réflexions bien senties sur les performances des voitures.

Chez Ferrari, tout est bien plus cadré. Sylvia Frangipane, la responsable de presse, ne plaisante pas avec le protocole du point de presse d’après-course. La salle est petite, il y a au plus une vingtaine de chaises en plastique qui font face au bureau derrière lequel attend Frédéric Vasseur, l’œil goguenard. Le micro tendu aux journalistes fonctionnant mal, le Français suggère de s’en passer, avant un holà de Sylvia Frangipane, qui tient à enregistrer toutes les questions - et les réponses -, histoire d’éviter que quelque journaliste mal intentionné puisse prétendre avoir entendu ce qui n’a pas été dit. Frédéric Vasseur a obtempéré en souriant et en simulant un geste de «garde à vous» montrant qu’il ne maîtrise pas tout chez Ferrari…

Frédéric Vasseur reste optimiste.

Frédéric Vasseur reste optimiste.

Getty Images

Une fois la conférence de presse débutée, le Français restait étonnamment optimiste au terme d’une course qui vit pourtant la voiture de Charles Leclerc abandonner alors qu’elle visait la troisième place, puis celle de Carlos Sainz doublée par l’Aston Martin de Fernando Alonso.

«Ce que je retiens, c’est que nous pouvions égaler les chronos des Red Bull lors des qualifications, et que Charles tenait le rythme de Max Verstappen en début de course, au moins pendant les quinze premiers tours… En fait, on pensait même que les Red Bull seraient plus loin devant en qualifications.»

Voilà ce qui s’appelle un optimisme acharné après une course terriblement décevante si on se rappelle que les deux Ferrari étaient qualifiées en deuxième ligne.

Charles Leclerc dévasté

Ça recommence. Il semble que l’image d’un Charles Leclerc descendant d’une voiture en panne revient chaque année, comme la répétition d’un mauvais rêve.

Dimanche, le Monégasque était sur le point de terminer troisième quand son moteur a lâché sans prévenir, à 17 tours de l’arrivée. La cause de la panne n’était pas connue après la course, l’écurie allant probablement devoir ramener le moteur à Maranello pour l’analyser.

«C’est dur, admettait Charles Leclerc, parce que nous avons énormément travaillé la fiabilité au cours de l’hiver, on a couvert 6000 ou 7000 kilomètres au banc d’essais sans jamais avoir ce problème. Ça prouve qu’on va devoir encore travailler.»

Sur son rythme en course, le pilote est, là aussi, plus pessimiste que son patron. «Jusqu’à la panne, je me sentais un peu seul en piste, mais ça ne marchait pas trop mal… enfin, dans la mesure où on peut se satisfaire de chronos à une pleine seconde du plus rapide. Ce qui n’est pas bon du tout, évidemment. Les Red Bull semblent avoir trouvé un truc en rythme de course.»

Le problème des Ferrari semble venir principalement de la dégradation de leurs pneus. Bonne nouvelle pour elles: le circuit de Sakhir, de ce point de vue, se pose comme le pire de la saison. Ça devrait aller mieux à Djeddah, dans deux semaines.

Charles Leclerc n’avait pas la tête du vainqueur après la course.

Charles Leclerc n’avait pas la tête du vainqueur après la course.

AFP

Russell prédit 23 victoires Red Bull

C’est difficile à croire, mais chez Mercedes, la situation est encore pire cette saison que l’an dernier, à la pire époque du «marsouinage» de la W13…

George Russell a terminé cette première course en 7e place, tandis que Lewis Hamilton a fini 5e, incapable de menacer Carlos Sainz pourtant à la peine avec ses gommes. «On était à des kilomètres du podium, reconnaît le septuple champion du monde. Je finis cinquième, mais sans l’abandon d’une Ferrari, je n’étais que sixième. A des kilomètres, je vous dis.»

Lewis Hamilton se montre déjà défaitiste.

Lewis Hamilton se montre déjà défaitiste.

REUTERS

George Russell, plus défaitiste que jamais, pariait sur un solo des Red Bull: «Ils ont le championnat dans leur poche. Je pense que personne n’arrivera à les battre cette saison, je m’attends à ce qu’ils gagnent les 23 courses. C’est ma prédiction! Ils ne signeront peut-être pas toutes les poles, parce que les Ferrari semblent compétitives en qualifications, mais pour les courses, ils sont les plus forts.»

Toto Wolff, le patron de Mercedes, complétait ce tiercé de la déprime: «Aujourd’hui compte parmi nos pires journées de compétition. Tout était mauvais, de tous les points de vue. Ça fait mal. On va mettre un pied devant l’autre, on ne va pas lâcher l’affaire, on va travailler comme des fous. Plus encore que d’habitude. On peut le faire…»

Fernando Alonso à l’attaque

Parti cinquième, Fernando Alonso a réussi un exploit au cours de son premier Grand Prix pour l’écurie Aston Martin. Un dépassement audacieux sur Lewis Hamilton, d’abord, puis une manœuvre tendue au détriment de Carlos Sainz, ont permis à l’Espagnol de terminer sur le podium. Ce n’était que la deuxième fois qu’un pilote Aston Martin de l’ère moderne montait sur un podium - après Sebastian Vettel à Baku en 2021.

Fernando Alonso (à dr.) a réussi un dépassement audacieux sur Lewis Hamilton (à g.).

Fernando Alonso (à dr.) a réussi un dépassement audacieux sur Lewis Hamilton (à g.).

REUTERS

«Ce qui s’est passé est incroyable pour l’écurie, c’est un week-end fantastique», disait Fernando Alonso après avoir déclaré son amour pour sa monoplace pendant la course. «C’est fou ce qu’Aston Martin a réussi pendant l’hiver pour produire la deuxième voiture la plus rapide du plateau (derrière les Red Bull). C’est carrément irréel.»

L’Espagnol a aussi loué la performance de son équipier Lance Stroll, qui a terminé sixième, à peine douze jours après une opération du poignet. Une main qui l’a beaucoup fait souffrir en course, à tel point qu’il n’a pas pu retenir des larmes de douleur. Magnifique exploit de la part du jeune Canadien.

Ocon pénalisé trois fois!

Ce n’était pas le jour d’Esteban Ocon. Pour commencer, le Français a mal placé sa voiture sur la grille de départ, il était plus avant que sa ligne. «Mais on ne voit rien dans ces voitures!, se justifiait-il. Et j’ai regardé les images, il y avait au moins trois autres monoplaces dans le même cas, pourquoi suis-je le seul pénalisé?»

Malheureusement, l’écurie a mal observé les cinq secondes de pénalité, et Esteban Ocon a été condamné à cinq secondes supplémentaires, avec cinq autres secondes pour avoir commis un excès de vitesse dans les stands. La totale! «C’est nul, poursuivait-il. D’habitude, on est plutôt bon dans l’opérationnel, mais là, on va devoir analyser ce qui s’est passé.»

Pour se rassurer, le Français se basait sur la course de son équipier Pierre Gasly: parti dernier, le natif de Rouen a réussi à remonter jusqu’à la neuvième place.

 

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