ClimatLa Confédération s’attaque à la production de viande en Suisse
Plusieurs offices fédéraux ont mis au point une stratégie de l’agriculture favorable au climat. Les paysans pas contents.
- par
- Eric Felley
Au pays du cervelas et de la saucisse veau, c’est un dossier hyperchaud. Les paysans sont appelés à réduire leur nombre de bêtes au profit de protéines végétales et le système des paiements directs sera modifié en conséquence. La Confédération a annoncé mardi qu’elle avait mis au point la «Stratégie Climat pour l’agriculture et l’alimentation 2050» pour soutenir des mesures permettant aux secteurs agricole et agroalimentaire de s’adapter aux changements climatiques, en réduisant leurs émissions de gaz à effet de serre. Les milieux de l’élevage et de l’agroalimentaire sont visés.
Des objectifs chiffrés
Cette stratégie a été conçue conjointement par l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG), l’Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV) et l’Office fédéral de l’environnement (OFEV). Elle répond en partie aux nombreuses interventions au Parlement ces dernières années, mettant en cause la passivité du secteur agricole face au réchauffement climatique. La stratégie veut une réduction «de deux tiers de l’empreinte gaz à effet de serre de l’alimentation par personne par rapport à 2020». Par ailleurs les émissions de gaz à effet de serre provenant de la production agricole devront être «diminuées d’au moins 40% par rapport à 1990».
Un «faux procès»
Cette réduction de la production de viande, donc de l’élevage, passe mal au sein de l’Union suisse des paysans (USP). Michel Darbellay, membre de la direction de l’USP, s’est exprimé en ce sens mardi au «19 h 30» sur la RTS: «On surestime le rôle de l’élevage dans la question climatique, affirme-t-il. Depuis quarante ans on a diminué d’un cinquième nos troupeaux en Suisse. Dans le même temps le climat s’est dégradé, donc notre problème est à chercher ailleurs qu’au niveau de l’élevage, c’est un faux procès qu’on lui fait».
Selon lui, l’agriculture produit en fonction de la demande: «Depuis dix ans la consommation de viande reste relativement stable et, au vu de l’évolution démographique, l’élevage et la production de viande auront toujours leur place en Suisse». Cependant il regrette «une volonté sous-jacente de dicter aux gens ce qu’ils doivent manger. Je pense que nous devons manger plus durable, plus local, privilégier la provenance suisse et éviter de déplacer notre empreinte alimentaire à l’étranger.»
La conseillère nationale Valentine Python (V/VD) répond à l’USP dans 24 heures: «La diminution du cheptel permettra une réduction des gaz à effet de serre ainsi qu’une meilleure adaptation au réchauffement climatique et à l’utilisation de l’eau». Elle estime que l’USP «doit mettre les moyens nécessaires pour s’engager vers une véritable transition écologique. Au final si le consommateur veut manger davantage de produits biologiques, il doit pouvoir le faire».