ONULe déploiement d’une force internationale autorisé en Haïti
L’ONU a donné son feu vert au déploiement d’une force internationale, menée par le Kenya, en Haïti pour aider les autorités locales face aux gangs.
Après un an d’atermoiement, le Conseil de sécurité de l’ONU a donné son feu vert lundi à l’envoi en Haïti d’une mission multinationale menée par le Kenya pour aider la police dépassée par les gangs, élargissant également l’embargo sur les armes.
Viols utilisés comme arme de terreur, snipers sur les toits, personnes brûlées vives, enlèvements contre rançons… Alors que la violence des gangs qui contrôlent la majorité de la capitale Port-au-Prince ne cesse de s’aggraver, le premier ministre haïtien Ariel Henry et le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres réclament depuis un an presque jour pour jour l’envoi d’une mission de soutien à la police.
Mais, au sein d’une communauté internationale échaudée par les expériences passées dans le pays et les risques de se retrouver piégée dans un bourbier meurtrier, il a été difficile de trouver un volontaire pour en prendre la tête. Jusqu’à fin juillet dernier où le Kenya a finalement annoncé être prêt à mener cette force non onusienne et à déployer 1000 hommes dans le pays pauvre des Caraïbes.
«Douze mois»
Selon la résolution adoptée lundi par 13 voix pour et 2 abstentions (Chine et Russie) après de difficiles négociations, cette «mission multinationale de soutien à la sécurité», non onusienne, est créée pour «une période initiale de douze mois», avec une réévaluation au bout de neuf.
Elle vise à «apporter un soutien opérationnel à la police haïtienne» dans sa lutte contre les gangs et pour la sécurisation des écoles, ports, hôpitaux et aéroports. Avec l’objectif d’améliorer suffisamment la sécurité pour organiser des élections, alors qu’aucun scrutin n’a eu lieu depuis 2016.
En coopération avec les autorités haïtiennes, la mission pourra, «pour empêcher des pertes de vies», employer des «mesures d’urgence» temporaires et proportionnées «sur une base exceptionnelle», notamment via des arrestations, dans le respect du droit international.
Dans un récent rapport, Antonio Guterres soulignait que la crise économique, politique et sécuritaire que traverse Haïti s’est encore aggravée depuis un an, avec des gangs «plus nombreux et mieux armés» que les quelque 14’000 policiers comptabilisés fin juin 2023. Au total, près de 2800 meurtres ont été dénombrés entre octobre 2022 et juin 2023, dont près de 80 mineurs, selon ce rapport.
Trafic d’armes
Cette violence est alimentée par le trafic d’armes en provenance principalement des États-Unis, en particulier de Floride via la diaspora haïtienne. Une situation largement montrée du doigt ces derniers mois par la Chine, qui a estimé qu’une éventuelle mission n’avait pas de sens sans un arrêt du flux d’armes à destination des gangs.
Sous la pression de la Chine, qui dispose d’un droit de veto au Conseil, la résolution généralise d’ailleurs l’embargo sur les armes légères et munitions, jusqu’ici uniquement applicable aux chefs de gangs visés par le régime de sanctions mis en place en octobre 2022 et qui ne concerne à ce stade qu’un individu.
«Le trafic d’armes est une question que les États-Unis prennent très sérieusement, y compris en Haïti», a assuré lundi un responsable de l’administration américaine. Washington entend d’autre part fournir un soutien logistique et financier à la nouvelle mission mais pas de forces de sécurité sur le terrain.
La résolution ne précise pas la composition de la mission, notant que le calendrier du déploiement et le nombre de personnel seront élaborés par les futurs participants avec le gouvernement haïtien. Le chiffre de 2000 membres des forces de l’ordre a toutefois été souvent évoqué ces derniers mois.