AnimauxLe caractère d’un chien n’est pas déterminé par sa race
Une étude publiée jeudi démontre que la race d’un chien ne permet pas de prédire son caractère, contrairement à la croyance populaire.
Tout le monde le sait, les pitbulls et les rottweilers sont agressifs, tandis que les labradors sont affectueux. Sauf que non. Selon une nouvelle étude publiée jeudi dans la prestigieuse revue «Science», ces stéréotypes liés aux races canines sont largement infondés.
De nombreux traits comportementaux peuvent bien être hérités. Mais la race ne permet de prédire que partiellement la plupart des comportements -- voire pas du tout pour certains traits de caractère, comme l’affection ou la propension à s’énerver.
«La génétique joue un rôle dans la personnalité de tout chien individuellement, mais la race ne permet pas de prédire ces traits efficacement», a expliqué Elinor Karlsson, l’une des auteures de ces travaux, qui ont impliqué plus de 2000 chiens et plus de 200’000 réponses de la part de propriétaires.
«Ce que nous avons démontré, c’est que les critères définissant un golden retriever sont ses caractéristiques physiques -- la forme de ses oreilles, la couleur et la qualité de son pelage, sa taille. Mais pas s’il est affectueux», a-t-elle ajouté. De tels stéréotypes se retrouvent pourtant parfois dans la loi, comme pour l’interdiction des pitbulls au Royaume-Uni et dans de nombreuses villes américaines.
«Aucun effet»
Les chercheurs ont séquencé l’ADN de 2155 chiens de race ou croisés, afin de trouver des variations génétiques communes qui pourraient permettre de prédire leur comportement. Ils ont combiné ces résultats avec les réponses à des questions de la part de 18’385 propriétaires de chien.
Le site utilisé s’appelle Darwin’s Ark, et représente une base de données en accès libre réunissant les informations livrées par des propriétaires sur les comportements de leur animal. Les chercheurs ont pris en compte dans leurs analyses les stéréotypes affectant possiblement les réponses.
Ils ont établi des définitions fixes pour certains comportements, comme l’obéissance, la sociabilité, ou encore l’intérêt pour les jouets. Les traits physiques ont également été étudiés. Les scientifiques ont finalement trouvé 11 endroits du génome associés à des différences comportementales, dont l’obéissance, la capacité à rapporter un objet, ou encore les hurlements.
Dans ces cas-là, la race jouait bien un certain rôle: les beagles et les limiers ont tendance à davantage hurler, les border collies sont obéissants, bien davantage que les shiba inus. Mais l’étude a malgré tout montré qu’il existait à chaque fois des exceptions. Ainsi, même si les labradors étaient ceux ayant le moins tendance à hurler, 8% d’entre eux le faisaient quand même. Et si 90% des lévriers n’enterraient pas leur jouet, 3% le faisaient fréquemment.
De plus, en observant les réponses à plusieurs questions portant sur les possibles réactions agressives des chiens, «nous n’avons vu aucun effet de la race», a expliqué Elinor Karlsson. Au total, la race n’expliquait que 9% des variations comportementales. L’âge permettait ainsi de mieux prédire certains traits, comme le fait de s’amuser avec un jouet. Les traits physiques pouvaient eux être cinq fois mieux prédits par la race que le comportement.
Idéaux physiques
Avant les années 1800, les chiens étaient d’abord sélectionnés pour leurs rôles dans la chasse, pour garder la maison ou les troupeaux. Mais le concept «de race canine moderne, mettant l’accent sur des idéaux physiques et la pureté de la lignée, est une invention victorienne», souligne l’étude.
Les chiens au sein d’une race peuvent avoir des comportements différents, certains ayant hérité des variations génétiques de leurs ancêtres, et d’autres non. Fait intéressant: la sociabilité envers les humains est très héréditaire chez les chiens, quoique ne dépendant pas de la race.
Les chercheurs ont localisé un endroit de l’ADN canin qui pourrait expliquer 4% des différences de sociabilité entre les individus. Et cet endroit correspond à celui, dans le génome humain, responsable de la formation de la mémoire longue. «Il se pourrait que comprendre la sociabilité envers les humains chez les chiens aide à comprendre comment le cerveau se développe et apprend», a avancé Kathleen Morrill, auteure principale de l’étude, lors d’une conférence de presse.