EgypteAlaa Abdel Fattah n’est plus en grève de la faim, annonce sa famille
Le blogueur prodémocratie emprisonné n’avait avalé pendant sept mois que 100 calories par jour, avant de cesser de manger le 2 novembre.
Le détenu politique égypto-britannique Alaa Abdel Fattah a écrit qu’il n’était plus en grève de la faim dans une lettre mardi à sa famille, qui espère le voir jeudi après avoir été privée de visite pendant un mois. Mona Seif, la soeur du blogueur prodémocratie, icône du Printemps arabe et bête noire du régime d’Abdel Fattah al-Sissi, a mis en ligne une photo de la lettre remise à sa mère en prison.
Dans cette missive datée de mardi, Alaa Abdel Fattah, qui aura 41 ans le 18 novembre, écrit: «j’ai mis un terme à ma grève de la faim» et «je veux fêter mon anniversaire avec vous jeudi, ramenez un gâteau». Sa mère, Laila Soueif, l’a vu pour la dernière fois le 17 octobre, lors de sa visite familiale mensuelle. Depuis, elle n’a reçu que des lettres remises par des officiers de l’administration pénitentiaire qui, par deux fois, ont refusé les permis de visite de son avocat, Khaled Ali. Ce dernier ne l’a pas vu depuis mars 2020.
Avocat en prison
L’autre avocat d’Alaa Abdel Fattah, Mohammed al-Baqer, a été arrêté alors qu’il le défendait devant la justice militaire en septembre 2019 après son arrestation. Depuis, les deux hommes ont été condamnés aux côtés du blogueur Mohamed Ibrahim, à cinq ans de prison pour «fausses informations» après qu’Alaa Abdel Fattah a partagé sur Facebook un texte, écrit par quelqu’un d’autre, accusant un officier de police d’avoir torturé à mort un prisonnier.
Pour dénoncer son incarcération et celle des 60’000 détenus d’opinion que compte l’Egypte selon des ONG, Alaa Abdel Fattah n’a avalé pendant sept mois que 100 calories par jour. Le 2 novembre, il avait cessé de manger et le 6 novembre, à l’ouverture de la COP27 en Egypte, il avait décidé de ne plus boire non plus. Sa famille, qui le disait en danger de mort, n’a cessé d’alerter le monde entier.
Son autre soeur, Sanaa Seif, a participé à deux conférences de presse remarquées à la COP27 et depuis la semaine dernière, le président égyptien Abdel Fattah al-Sissi a dû répondre aux interrogations de plusieurs dirigeants occidentaux, notamment le président américain Joe Biden, à son sujet. Semblant faire un appel du pied, devant la presse rassemblée et aux côtés de Abdel Fattah al-Sissi, Joe Biden a salué la commission des grâces présidentielles réactivées en avril en Egypte après des années de sommeil.
«Fausses informations»
Vendredi, Mona Seif a déposé une nouvelle demande à cette commission, plaidant que son frère était «le seul homme de la famille après le décès de son père», grand avocat des droits humains, et que son fils, «atteint d’autisme avait perdu la parole» depuis sa dernière arrestation en 2019. Des arguments qui semblent avoir porté puisque l’un des présentateurs de talk-shows les plus influents du pays, Amr Adib, grand partisan de Abdel Fattah al-Sissi, a plaidé pour une grâce «dans l’intérêt de l’Egypte». Les médias proches du pouvoir, eux, assurent, comme les autorités, «douter» qu’Alaa Abdel Fattah ait jamais été en grève de la faim.
Ses soutiens, en revanche, n’ont cessé de répéter que s’ils survivaient tant de jours sans eau, c’est qu’il était «nourri de force». Le journaliste Ahmed Fayez l’a écrit sur Facebook le 8 novembre et a depuis été arrêté et inculpé pour «fausses informations», accuse le Comité pour la protection des journalistes, basé à New York. Selon cette ONG, «en l’arrêtant pour avoir parlé d’Alaa Abdel Fattah, le pouvoir égyptien montre au grand jour sa campagne contre la presse».