11-SeptembreChez les pompiers de Brooklyn, le souvenir toujours vif des «frères» disparus
Le 11 septembre 2001, 343 pompiers new-yorkais ont perdu la vie dans les attentats contre le World Trade Center. Vingt ans plus tard, leurs proches n’oublient pas.
Dans une caserne de pompiers de Brooklyn, il ne reste plus qu’un soldat du feu présent le 11 septembre 2001 toujours en exercice, mais le souvenir des douze «frères» morts dans les décombres du World Trade Center est toujours vif et a été célébré dans l’émotion ce samedi.
«Nous ne les oublierons jamais»: sur le fronton en pierre sculptée de cette compagnie, appelée «Squad One», dans le quartier coquet de Park Slope, à New York, les noms des douze hommes disparus sont inscrits en permanence, à la vue des passants.
Moment intime
Autour du drapeau américain, collègues à la retraite et des familles se sont retrouvés samedi, comme chaque 11 septembre, pour un moment plus intime que la cérémonie officielle organisée en grande pompe à Manhattan, au mémorial du 11-Septembre, autour du président américain Joe Biden.
«Je suis le dernier de la compagnie parmi ceux qui travaillaient avec eux. Ce matin, la souffrance revient, mais je suis heureux aussi de voir des familles, de voir comment elles vont», souffle, sur le trottoir, Paul Stallone, 54 ans, avant la minute de silence à 8h46 (14h46 en Suisse), l’heure précise à laquelle la tour nord a été percutée par le premier avion détourné par les djihadistes d’Al-Qaïda.
«J’étais chez moi»
Depuis deux décennies, Paul Stallone, arrivé à Brooklyn, avec sa famille, «le 12 septembre 1976», du sud de l’Italie, vit avec «la culpabilité de la survie». Si son nom n’apparaît pas sur le fronton ou sur l’un des camions de la «Squad 1», ou sur les T-shirts portés samedi, c’est parce qu’il avait «terminé son tour la nuit précédente».
«Quand les tours ont été touchées, j’étais chez moi, et je suis revenu à la caserne. C’est ce qui m’a sauvé la vie, parce que le temps que j’arrive en ville, les tours étaient tombées. Les gars qui ont pris leur tour, cette nuit-là ou ce matin-là, ne sont jamais rentrés chez eux», raconte-t-il, bouleversé.
Il avait traversé à pied un tunnel
Parmi ses douze «frères», il y avait Stephen Siller, 34 ans. Ce père de cinq enfants venait de terminer son service, quand le premier avion a frappé le World Trade Center. Son matériel sur le dos, il avait traversé à pied un tunnel reliant Brooklyn à Manhattan pour participer aux secours, mais n’est jamais revenu vivant.
Son frère, Frank Siller, a symboliquement emprunté, samedi, le même tunnel pour achever un parcours de plus de 800 km commencé cet été depuis Washington, afin de recueillir des fonds pour son association d’aide aux familles, Tunnel 2 Towers. «Mon frère me manque tellement, même vingt ans après. On apprend à vivre avec, mais on ne s’en remet pas», confie-t-il.
343 pompiers de 78 compagnies
Au matin du 11 septembre 2001, un très grand nombre d’unités ont été mobilisées et 343 pompiers, provenant de 78 compagnies situées jusque dans le Queens et le Bronx, ont perdu la vie.
À la «Squad 1», au-delà de la cérémonie, suivie d’une messe dans une église du quartier, c’est aussi un moment de retrouvailles entre familles, l’occasion de prendre des nouvelles et de discuter, au milieu des crépitements des talkies-walkies. Mais Theresa Johnson, la cousine de Matthew Garvey, disparu à 37 ans, ressent toujours de «l’anxiété».
«Se souvenir…»
«J’ai mal au cœur», dit cette femme de 50 ans, vêtue de noir. «Vingt ans plus tard, nous avons encore des attaques terroristes en Afghanistan. C’est toujours là. J’ai l’impression que je ne surmonterai jamais ça», ajoute-t-elle, sous le même ciel bleu que le matin du mardi 11 septembre 2001.
Frank Siller, lui, ne veut pas évoquer le retrait américain d’Afghanistan. Il veut qu’«on se souvienne» de ceux qui sont morts et il reste optimiste. «Ce n’est pas aussi fort pour ceux qui n’étaient pas nés, parce qu’ils n’ont pas vu les tours tomber. Mais l’Amérique n’a jamais oublié Pearl Harbor. Et elle n’oubliera jamais le 11-Septembre», assure-t-il.