Guerre en UkraineLes roquettes américaines longue portée, nouvel atout majeur de Kiev
Les roquettes longue portée américaines que Moscou affirme avoir identifiées sur le champ de bataille peuvent s’avérer un atout stratégique pour Kiev dans les mois à venir.
Faire reculer les Russes et faciliter une contre-attaque ukrainienne. La Russie a affirmé mardi avoir abattu une roquette longue portée GLSDB, un engin de petit diamètre et de haute précision fabriqué par l’Américain Boeing et le Suédois Saab, d’une portée de 150 kilomètres. Cette arme pourrait s’avérer un atout stratégique pour Kiev dans les mois à venir. Or, les Ukrainiens ne bénéficiaient jusqu’à présent que d’une capacité de frappe de 80 km derrière les lignes russes avec les lance-roquettes multiples américains.
Frapper plus loin
«Les Himars avaient déjà obligé les Russes à réorganiser leur commandement et leur logistique, soit en les rendant plus discrets près du front, soit en les reculant au-delà de 80 km de celui-ci», explique à l’AFP Léo Péria-Peigné, de l’Institut français des relations internationales (IFRI).
Avec des GLSDB mobiles montées sur camions à roues ou à chenilles, «les Russes devront trouver d’autres solutions», notamment doubler les distances «avec un parc de véhicules déjà limité». Le littoral de la mer Noire contrôlé par les Russes devient par ailleurs accessible aux frappes, compliquant considérablement l’approvisionnement russe par bateau. Kiev n’avait pas confirmé l’information de Moscou mercredi. Mais le Pentagone avait annoncé en février qu’il livrerait ces roquettes à son allié, sans préciser de délai.
Précises au mètre près
«La Russie sera probablement préoccupée que des explosions inexpliquées surviennent dans une zone probablement jugée auparavant comme au-delà des capacités de frappes ukrainiennes», estime le ministère britannique de la Défense. Reste à en mesurer l’impact militaire.
Ces roquettes n’ont été testées la première fois en Suède qu’en 2015, selon le site de Boeing. «Ce sera le premier engagement réel et massif de cette arme qui mettra à l’épreuve leurs performances, notamment en termes de précision», note Léo Péria-Peigné, sachant que les fabricants revendiquent une exactitude de frappe d’un mètre.
L’annonce de Moscou intervient juste après la confirmation de la livraison de blindés britanniques, américains et allemands, véhicules clés, selon Kiev, pour ses ambitions de reconquête militaire. «Cinquante chars, même si ce sont les meilleurs chars du monde, peuvent difficilement avoir un effet stratégique, contrairement à 10’000 GLSDB si ces systèmes tiennent leurs promesses», relève à cet égard l’expert français.
«L’introduction de nouveaux systèmes peut changer la dynamique du front», admet Ivan Klyszcz, chercheur au Centre international pour la défense et la sécurité (ICDS) en Estonie. Mais pour l’heure, «l’effort de guerre repose sur les hommes et les obus». Le récent accord de l’Union européenne de livrer un million d’obus à l’Ukraine «me semble plus conséquent».
Lenteurs occidentales
L’autre impact de cette nouvelle aide capacitaire réside dans le symbole qu’elle véhicule: les Occidentaux hésitent souvent avant de livrer de nouvelles armes mais finissent tout aussi souvent par franchir le pas. Comme lorsque Pologne et Slovaquie ont récemment accepté de livrer des avions de chasse, après des mois d’insistance des Ukrainiens.
Une lenteur liée aux difficultés des alliés à s’accorder sur une stratégie commune, estime Ivan Klyszcz, mais aussi à la crainte de s’attirer les foudres de Moscou, voire d’irriter des opinions publiques fatiguées par l’effort de guerre.
Poutine ne peut pas attaquer ailleurs
Moscou, pour sa part, ne peut guère que protester. Le président russe Vladimir «Poutine gesticule, mais que peut-il faire de si grave en termes de représailles purement militaires?», s’interroge Léo Péria-Peigné. En dépit de son usage régulier du chiffon rouge de l’arme suprême, «son arsenal nucléaire n’a pas changé de posture», fait-il valoir. «Il ne peut pas attaquer un autre pays puisqu’il n’arrive déjà pas à battre l’Ukraine. Et il ne peut pas attaquer l’Otan parce qu’il sait qu’il perdra.»
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