FootballÀ Bâle, Benjamin Kololli retrouve la Suisse dans un rôle de taulier
À l’heure de retrouver la Super League, ce dimanche à Zurich (16h30), l’attaquant vaudois revient sur sa signature à Bâle, les polémiques qui l’ont émaillée et son expérience au Japon.
- par
- Brice Cheneval
Le hasard fait parfois bien les choses. De retour en Suisse après deux ans et demi au Japon, Benjamin Kololli (31 ans) s’apprête à retrouver la Super League là où il l’avait quittée: au Letzigrund, chez ce FC Zurich où il a évolué de 2018 à 2021. Ce dimanche, c’est sous la tunique du FC Bâle qu’il foulera la pelouse de l’enceinte zurichoise. Le club rhénan n’a plus grand-chose à voir avec celui qu’il a connu à son départ au Shimizu S-Pulse. Encore 2e à l’issue de la saison 2020-2021, il végète actuellement à l’avant-dernière place. C’est dans ce triste contexte que débarque le polyvalent attaquant vaudois. Cela ne l’empêche pas d’avoir les yeux qui brillent. «Tu te rends compte que tu es dans un grand club, hallucine-t-il. Au niveau du stade, des fans, de l’organisation, c’est juste fantastique.»
Non prolongé par le Shimizu S-Pulse au terme du championnat japonais, mi-novembre, Kololli représentait une cible de choix pour le marché helvétique. Bâle a sauté sur l’occasion et rapidement passé la seconde, devançant toute concurrence. «Je ne pouvais pas refuser, dit-il. Je n’ai pas hésité une seconde.» Un temps évoqué avec insistance, un retour au Lausanne-Sport, où il aurait retrouvé Ludovic Magnin (son ancien entraîneur à Zurich), ne s’est jamais concrétisé. «Il y a eu un léger contact mais ce n’est pas allé plus loin. La possibilité s’est réellement présentée l’an dernier mais à ce moment-là, je voulais rester au Japon. Cela n’empêche que j’ai énormément de respect pour le LS, qui me tient à cœur.»
Avec Fabio Celestini, une estime mutuelle
Autre ex-coach de Kololli, Fabio Celestini s’est lui montré plus insistant pour le récupérer. Les deux hommes se sont côtoyés dans la capitale olympique de 2016 à 2018 et ont, depuis, toujours maintenu le contact. «On n’a pas eu besoin d’une énorme discussion. Fabio me connaît mieux que personne, il était clair dès le début qu’il souhaitait ma venue. J’ai beaucoup apprécié travailler avec lui, c’est un grand entraîneur», loue le joueur, à rebours des réserves parfois émises sur le management du technicien vaudois. «Ça peut ne pas passer avec certains humainement parlant, parce c’est quelqu’un de sanguin et très exigeant, mais je n’ai jamais entendu quiconque remettre en cause ses compétences footballistiques, développe-t-il. Et encore, je constate une nette amélioration au niveau du relationnel entre le Fabio d’aujourd’hui et celui que j’ai connu à Lausanne.»
L’estime est mutuelle. Celestini voit en Kololli l’un des cadres de son FC Bâle. «Je suis là pour apporter mon expérience et mes qualités, a priori dans le registre offensif. Étant donné que je suis polyglotte, je servirai de lien dans une équipe très jeune (ndlr: 24,1 ans de moyenne d’âge selon Transfermarkt, seul Grasshopper en affiche une plus basse parmi les pensionnaires de Super League) et internationale.»
Fasciné par son aventure japonaise
Un rôle de taulier, dans le club suisse le plus emblématique du XXIe siècle, dirigé par un entraîneur dont il est proche: le projet bâlois avait tout pour convaincre l’international kosovar (24 sélections, 4 buts) de rentrer au pays. «C’était mon objectif, confesse-t-il. Je voulais me rapprocher de ma famille, mes amis.»
À l’heure du bilan, les superlatifs pleuvent pour décrire la parenthèse japonaise. «J’ai vécu une expérience incroyable, hors du commun. Dans tous les domaines: l’organisation, les infrastructures, la gastronomie, le tourisme… C’est un pays unique, fabuleux.» Son passage au Shimizu S-Pulse a certes été émaillé par plusieurs contrariétés. D’ordre sportif tout d’abord, entre un temps de jeu irrégulier, une instabilité chronique sur le banc (quatre entraîneurs se sont succédé durant son passage) et une relégation en 2e division. Social, ensuite. «Pour habiter au Japon, il faut avoir les nerfs solides, raconte-t-il. La barrière de la langue m’a coupé de pas mal d’interactions et m’a empêché de nouer des affinités.»
En revanche, l’aventure culturelle a surpassé ses attentes. Idem sur le plan footballistique: «J’ai découvert un football à la fois très technique, beau à regarder, et intense. Quand je suis arrivé, j’accusais un retard athlétique par rapport aux autres. Et le jeu allait plus vite. Le niveau était plus élevé, tout simplement. J’ai dû bosser ma condition physique ainsi que la prise d’informations. Aujourd’hui, je suis un joueur plus affûté. Plus polyvalent et intelligent, aussi.»
Critiqué à son arrivée
Fort d’un bagage enrichi, le natif d’Aigle présente d’incontestables atouts pour aider le FC Bâle dans son opération redressement. Toutefois, sa signature n’a pas fait que des heureux. La faute à son passé chez le rival zurichois, d’une part, et à une polémique autour de propos homophobes dont il s’était fait l’auteur au LS. Faisant suite au coming-out de l’arbitre Pascal Erlachner, l’attaquant vaudois avait été interrogé par le Blick sur l’existence de coéquipiers homosexuels dans son équipe. «J’espère que non, avait-il répondu. Mais c'est possible. Si c'est le cas, la personne concernée ferait mieux de garder cela pour elle». Sous prétexte que «cela pourrait générer des conflits», avait-il ajouté.
«Quand on me connaît un minimum, on se rend vite compte que je ne suis pas homophobe, assure-t-il. Je n’ai aucune réticence vis-à-vis de qui que ce soit. Partout où je suis passé, j’ai toujours essayé de bien m’entendre avec tout le monde. Sur un terrain, on ne se soucie pas de la religion, la couleur de peau ou l’orientation sexuelle.» Par son passif, Benjamin Kololli a suscité de la méfiance chez une partie de la communauté bâloise. «Je n’ai pas reçu l’accueil le plus chaleureux de ma carrière, concède-t-il, mais hormis une minorité de messages négatifs, je n’ai pas ressenti un énorme rejet.»
Le déplacement à Zurich, ce dimanche, lui offre une première occasion de dissiper le scepticisme à son égard. «Ça me tient à cœur de remonter le FC Bâle à la place où il doit être, annonce-t-il, car on est beaucoup à être peinés par la situation de ce club qui nous a tant fait rêver en Coupe d’Europe. Je veux faire les choses comme il faut ici.»
Place aux actes, désormais.