Guerre en UkraineLa pasionaria de la cause animale refuse de quitter Kiev
Jointe mercredi matin au téléphone, Tamara Tarnawska se terre dans une station de métro de la capitale. Elle risque gros mais n’abandonnera pas ses 1000 chiens et 300 chats.
- par
- Victor Fingal
Le retour d’un gouvernement à la solde de Moscou lui fait craindre le pire. Tamara Tarnawska, la pasionaria de la cause animale en Ukraine, avait été l’une des figures marquantes de l’opposition au président prorusse Viktor Ianoukovytch (2010-2014) et avait été la cible de plusieurs attentats. Elle ne lui avait pas pardonné le massacre organisé des chiens errants sous son règne, certains à coups de marteau, et en avait alerté la planète entière.
Aujourd’hui, elle s’abrite des bombardements dans une station de métro à Kiev poche de son domicile. «Par crainte de possibles représailles, je préfère ne pas donner plus de précisions sur l’endroit où je me trouve.»
La voix brisée par l’émotion, au bord des larmes, elle raconte au téléphone par bribes son calvaire. «Je suis seule, la plupart de mes amis ont quitté la ville. Je tremble surtout pour la survie des 1000 chiens et 300 chats du refuge de SOS Animals que j’ai créé. Je ne peux plus m’y rendre: il est situé à dix kilomètres de Kiev et la ville est encerclée par les forces russes.»
Heureusement, une responsable du refuge et deux aides, inaptes au service militaire, sont encore sur place. «Ils reçoivent de la nourriture pour les animaux de généreux donateurs de passage. Mais nul ne sait combien de temps cet approvisionnement aléatoire va encore durer. De plus, avec l’exode d’un million d’Ukrainiens, je m’attends, comme lors de la guerre du Donbass en 2014, à une augmentation drastique d’animaux domestiques abandonnés.»
«Se nourrir devient vraiment difficile»
Dans son abri, Tamara Tarnawska tente de survivre. «Je n’ai plus d’argent. Les banques sont fermées et les distributeurs de billets ne fonctionnent plus. Se nourrir correctement devient difficile. Impossible d’acheter quoi que ce soit. Je ne mange plus beaucoup. Quelques crackers, de l’eau, parfois du thé, c’est à peu près tout. Mais ceux qui ont plus donnent ce qu’ils peuvent. La solidarité en Ukraine, ça existe!» Pour couronner le tout, Tamara Tarnawska devait subir une opération des yeux avant l’invasion, mais l’intervention avait dû être reportée le chirurgien ayant attrapé le Covid. «Je devrais mettre des gouttes dans mes yeux, mais les pharmacies, comme le reste des commerces, sont fermées.»
Le sort de l’amie ukrainienne des animaux a ému son alter ego helvétique. Tomi Tomek de SOS Chats à Noiraigues (NE) s’est mobilisée, avec son énergie coutumière: «Une levée de fonds est organisée actuellement sur notre site et avec la collaboration en France de la Fondation Brigitte Bardot via son site. J’ai aussi alerté Frank Weber du refuge St-Franziskus à Hambourg. Ce dernier va affréter un camion pour transporter des vivres et des médicaments destinés au refuge de SOS Animals, près de Kiev, quand la situation le permettra.»