Procès du 13-NovembreLa cour d’assises spéciale face à un accusé mutique
L’un des suspects n’a pas pipé mot jeudi devant le tribunal qui doit le juger pour les attentats du 13 novembre 2015.
Absent du box des accusés depuis le 25 novembre, sauf brièvement le 6 janvier à la demande de la cour, Osama K. s’est présenté à l’audience du procès du 13-Novembre jeudi pour son interrogatoire, mais il est resté totalement muet, faisant usage de son droit au silence. «Osama K., c’est bien d’être venu spontanément», l’a accueilli le président de la cour d’assises spéciale Jean-Louis Périès dont aucune question n’a reçu de réponse.
Par la voix de son interprète, le Suédois de 29 ans, longs cheveux bruns, barbe épaisse sous un masque bleu, tout de noir vêtu, s’est contenté de dire en arabe qu’il n’avait aucune déclaration à faire et qu’il ne répondrait à aucune question. Il est ensuite resté assis fixant la cour d’un regard méprisant.
Le 6 janvier, à la reprise du procès, son avocate, Me Margaux Durand-Poincloux avait lu une courte lettre de son client. «Au début, je pensais m’exprimer devant cette cour. Puis, j’ai vu comment se déroulaient les débats et j’ai perdu espoir. Tout le monde fait semblant. Ce procès n’est qu’une illusion. Je ne pense plus aujourd’hui que m’exprimer sur ce qu’on me reproche change quoi que ce soit», écrivait Osama K.
Long monologue
D’où cette audience étrange, caractérisée par un long monologue du président Périès. Le président a rendu compte de plusieurs procès-verbaux d’audition de l’accusé, arrêté en Belgique en avril 2016, après les attentats de Bruxelles. Il devait être un kamikaze du métro mais avait finalement fait demi-tour avec son sac.
Suspecté d’être l’un des principaux protagonistes de la cellule à l’origine des attaques qui ont fait 130 morts à Paris et Saint-Denis le 13 novembre 2015, il est jugé à Paris pour son rôle présumé dans la fabrication, la détention ou le transport des ceintures d’explosifs ainsi que pour l’acquisition et la détention des armes de la cellule jihadiste à l’origine des attentats.
«On avait envie de vous demander»
«Vous avez combattu, assisté à des exactions en Syrie (…) On peut se demander le niveau que vous aviez atteint au sein de l’État islamique même si nous n’aurons pas de réponse sur ces éléments», a regretté le président Périès évoquant notamment le rôle de Osama K. dans l’assassinat d’un pilote jordanien brûlé vif dans une cage.
On a vu «la vidéo insoutenable» de cette exécution à l’audience, a rappelé Jean-Louis Périès à l’adresse d’un accusé imperturbable. «On avait envie de vous demander si vous avez participé à des combats, où, quand, comment», a poursuivi le président face à un mur de silence.
Bataillon «d’élite»
Selon la DGSI, Osama K. a fait partie en Syrie d’un bataillon «d’élite» du groupe État islamique. «Ses membres recevaient une formation militaire et religieuse plus poussée que les autres combattants. (Ce bataillon) était chargé de missions stratégiques : prendre possession de points tactiques sur les champs de bataille, protéger les personnalités de Daech (acronyme de l’État islamique, ndlr). Mais aussi organiser les opérations extérieures», avait témoigné devant la cour un enquêteur de la DGSI en novembre.
Rapportant des échanges entre Osama K. et sa sœur Asma, restée en Suède, le président Périès a rappelé que l’accusé lui avait confié en 2015 qu’il comptait mourir en martyr lors d’une opération suicide.