ItalieMeloni inquiète l’opposition en s’en prenant aux rave-partys
Au nom de l’ordre et pour lutter contre les nuisances, le gouvernement italien est parti en guerre contre les rave-partys en musclant les peines prévues pour les organisateurs et participants.
Le texte approuvé lundi en Italie en conseil des ministres préoccupe l’opposition, qui craint qu’il ne puisse s’appliquer arbitrairement à toute forme de manifestation publique. Le gouvernement de Giorgia Meloni est parti en guerre contre les rave-partys en musclant les peines prévues pour les organisateurs et participants. «C’est une erreur gravissime. Les raves n’ont rien à faire dans un tel texte. C’est la liberté des citoyens qui est remise en cause», s’est alarmé le patron du Parti démocrate, Enrico Letta, sur Twitter.
L’écrivain Erri di Luca a ironisé sur le «grave danger des manifestations musicales libres et gratuites». «La jeunesse condamnée à l’échafaud», a-t-il réagi lui aussi sur le réseau social.
L’indignation est d’autant plus vive que les forces de l’ordre ont confisqué une sono d’une valeur de 150’000 euros lundi lors d’une intervention contre une rave à Modène (nord) alors que 2000 personnes ont rendu hommage dimanche sans être inquiétées au dictateur fasciste Benito Mussolini dans sa ville natale de Predappio (nord). «Qui décide de ce qui est dangereux? Une rave ou un rassemblement de chemises noires qui insultent notre constitution?» s’interrogeait mardi la députée démocrate Ilenia Malavasi.
Pour Dario Accolla, militant de la communauté LGBT dont Giorgia Meloni dénonce régulièrement le «lobby» et qu’elle accuse de promouvoir «les théories de genre», «ils veulent simplement nous interdire de manifester». L’opposition critique également les priorités du gouvernement qui, pour son premier conseil des ministres, a approuvé des sanctions contre les rave-partys et autorisé la réintégration de milliers de soignants «no vax» mais fait l’impasse sur l’aide aux ménages et aux entreprises face à l’inflation.
«La fête est finie»
Du côté de la majorité, on se félicite de la réforme qui prévoit désormais jusqu’à six ans de prison et 10’000 euros d’amende pour les organisateurs ou les promoteurs de fêtes illégales occasionnant «l’invasion de terrains et d’édifices en présence de plus de 50 personnes» et sont susceptibles de provoquer «des dangers pour la sécurité publique, l’ordre public ou la santé publique». «La fête est finie», a twitté Matteo Salvini, chef de la Ligue et ministre des Infrastructures.
Ces dispositions légales, a plaidé le ministre de l’Intérieur Matteo Piantedosi, sont «déjà en vigueur dans d’autres pays». «Elles offrent des instruments nouveaux et plus efficaces grâce auxquels il sera possible d’intervenir rapidement pour endiguer un phénomène particulièrement coûteux pour l’État, et donc pour la collectivité, en ce qu’il exige l’engagement de ressources importantes et de nombreux agents des forces de l’ordre», a-t-il expliqué. Pour lui, la rave de Modène et la réunion de nostalgiques fascistes à Predappio sont «deux choses totalement différentes»: «Predappio est une manifestation qui se tient depuis de nombreuses années. S’agissant de la rave party, il y a eu une plainte du propriétaire» des terrains.
Interrogée par la presse italienne sur le soupçon de complaisance de sa majorité envers les militants néofascistes de Predappio, Giorgia Meloni a répondu: «Vous savez ce que je pense, politiquement, c’est très éloigné de moi».
Plusieurs membres de son gouvernement et du parlement ont été épinglés par les médias ces dernières semaines pour leurs déclarations passées ou récentes concernant le fascisme et Mussolini. Lundi, la Première ministre a entériné la nomination des ministres délégués. Parmi eux, Galeazzo Bignami, nommé aux Infrastructures, photographié en 2005 avec un brassard nazi lors d’une fête privée. «Quand le passé ne passe pas. Ombres noires sur le choix des ministres délégués», a titré mardi le quotidien de centre-gauche La Repubblica.
Depuis sa victoire aux élections du 25 septembre, Mme Meloni, qui a fondé le parti post-fasciste Fratelli d’Italia, n’a de cesse de prendre ses distances avec le régime du «Duce». Elle qui déclarait, jeune militante de 19 ans, que Mussolini avait été «un bon politicien», condamne aujourd’hui son autoritarisme, ses lois antijuifs et la déportation des juifs vers les camps nazis. Il s’agit pour elle «du point le plus noir de l’Histoire de l’Italie, une honte qui entachera notre peuple à jamais».